Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 28 juillet 2020, Mme E... F... épouse D..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 mai 2020 ainsi que les décisions susvisées ;
2°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de la Savoie de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale sous astreinte de cent euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le refus de séjour et la mesure d'éloignement méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire, enregistrée le 14 janvier 2021, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme G..., première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme E... F... épouse D..., ressortissante de la République Démocratique du Congo née le 28 avril 1980, est entrée irrégulièrement en France en 2015. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par décision de la cour nationale du droit d'asile du 8 juillet 2016. Par un arrêté du 4 décembre 2017, le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé et a assorti cette décision de refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination. Par un nouvel arrêté du 10 janvier 2020, le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours sur le fondement des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a fixé le pays de destination. Mme E... F... épouse D... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de ces dernières décisions.
Sur le refus de séjour et la mesure d'éloignement :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Mme E... F... épouse D... se prévaut de sa durée de présence en France et de son mariage avec M. D..., ressortissant français, le 25 août 2018. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ce mariage est récent, à la date d'édiction des décisions contestées, et que l'appelante n'apporte pas d'éléments de nature à démontrer, ainsi qu'elle l'allègue, d'une vie commune depuis juillet 2016 en se bornant à produire des attestations de tiers et des éléments déclaratifs tels que deux courriers de l'assurance maladie pour l'année 2016 et une " fiche de visite " établie en 2017 par l'administration fiscale. Si elle justifie d'une relative intégration associative, la promesse d'embauche dont elle se prévaut datée du 4 février 2020 et du 18 juin 2020 est postérieure à deux décisions contestées. En outre, l'appelante, arrivée sur le territoire français à l'âge de 35 ans, conserve dans son pays d'origine, ses parents et ses quatre enfants ainsi que nécessairement des attaches privées. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le refus de séjour et la mesure d'éloignement qui lui ont été opposées porteraient une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur la décision fixant le pays de destination :
4. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
5. Mme E... F... épouse D... n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques qu'elle allègue encourir personnellement en cas de retour en République Démocratique du Congo. Il suit de là qu'elle n'est pas fondée à soutenir que son éloignement à destination de cet État méconnaîtrait l'article 3 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme E... F... épouse D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation des décisions prises le 10 janvier 2020 à son encontre par le préfet de la Savoie. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente à fin d'injonction et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... F... épouse D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... F... épouse D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme C..., présidente assesseure,
Mme G..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.
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N° 20LY02038