Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 février 2020, le syndicat mixte du lac d'Annecy, représentée par Me Petit, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 décembre 2019 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... et Mme D... devant le tribunal ;
3°) subsidiairement, de réformer ce jugement en limitant le montant de la condamnation à la somme de 10 255,17 euros ;
4°) de mettre à la charge de M. A... et de Mme D... une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les canalisations qu'il a réalisées pour le compte des intéressés sont qualifiables d'équipements propres au sens de l'article L.332-15 du code de l'urbanisme ;
- subsidiairement, la répétition ne peut inclure les dépenses pour la réalisation des 12,34 m, correspondant à la partie du branchement propre aux intéressés et qui s'élèvent à une somme de 2 324,89 euros, toutes taxes comprises.
Par un mémoire enregistré le 2 novembre 2020, M. G... A... et Mme C... D..., représentés par Me E..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 500 euros soit mise à la charge du syndicat mixte du lac d'Annecy en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la taille et la quantité des matériaux utilisés, montrent que les travaux sur le réseau incorporent des constructions existantes ou anticipent des constructions futures ;
- il en est de même de la partie du réseau pour laquelle le requérant présente des conclusions subsidiaires tendant à la limitation de la répétition.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- les observations de Me B..., représentant le Syndicat Mixte du Lac d'Annecy, et de Me E..., représentant M. A... et Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par courrier du 25 avril 2017, M. A... et Mme D..., agissant sur le fondement de l'action en répétition de l'indu prévue par les dispositions de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme, ont demandé au syndicat mixte du lac d'Annecy le remboursement de la somme de 12 580,06 euros qu'ils lui ont versée au titre des travaux de raccordement au réseau public d'assainissement de la construction pour laquelle ils avaient déposé une demande de permis de construire, sur le lot, cadastré AA n°193, de la parcelle cadastrée section AA n° 43, située allée du Panorama sur la commune de Sillingy. Après rejet de leur demande, ils ont saisi le tribunal administratif de Grenoble qui, par un jugement du 19 décembre 2019, a notamment condamné le syndicat mixte du lac d'Annecy à payer la somme de 12 580,06 euros à M. A... et à Mme D.... Le syndicat mixte du lac d'Annecy relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme : " Les taxes et contributions de toute nature qui sont obtenues ou imposées en violation des dispositions des articles L. 311-4 et L. 332-6 sont réputées sans cause ; les sommes versées ou celles qui correspondent au coût de prestations fournies sont sujettes à répétition. L'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l'obtention des prestations indûment exigées. / Les acquéreurs successifs de biens ayant fait l'objet des actes mentionnés à l'article L.332-28 ou situés dans une zone d'aménagement concerté ou dans une zone couverte par une convention de projet urbain partenarial peuvent également exercer l'action en répétition prévue à l'alinéa précédent. Pour ces personnes, l'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter de l'inscription sur le registre prévu à l'article L. 332-29 attestant que le dernier versement a été opéré ou la prestation obtenue. /Les sommes à rembourser au titre des deux alinéas précédents portent intérêt au taux légal majoré de cinq points. "
3. Aux termes de l'article L. 332-6 du même : " Les bénéficiaires d'autorisations de construire ne peuvent être tenus que des obligations suivantes : (...) 3° La réalisation des équipements propres mentionnées à l'article L. 332-15 ;(...) ".
4. Aux termes des dispositions de l'article L. 332-15 du même code : " L'autorité qui délivre l'autorisation de construire, d'aménager, ou de lotir exige, en tant que de besoin, du bénéficiaire de celle-ci la réalisation et le financement de tous travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction, du terrain aménagé ou du lotissement, notamment en ce qui concerne la voirie, l'alimentation en eau, gaz et électricité, les réseaux de télécommunication, l'évacuation et le traitement des eaux et matières usées, l'éclairage, les aires de stationnement, les espaces collectifs, les aires de jeux et les espaces plantés. Toutefois, en ce qui concerne le réseau électrique, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition est redevable de la part de la contribution prévue au troisième alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, correspondant au branchement et à la fraction de l'extension du réseau située sur le terrain d'assiette de l'opération, au sens de cette même loi et des textes pris pour son application. Les obligations imposées par l'alinéa ci-dessus s'étendent au branchement des équipements propres à l'opération sur les équipements publics qui existent au droit du terrain sur lequel ils sont implantés et notamment aux opérations réalisées à cet effet en empruntant des voies privées ou en usant de servitudes. L'autorisation peut également, avec l'accord du demandeur et dans les conditions définies par l'autorité organisatrice du service public de l'eau ou de l'électricité, prévoir un raccordement aux réseaux d'eau ou d'électricité empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve que ce raccordement n'excède pas cent mètres et que les réseaux correspondants, dimensionnés pour correspondre exclusivement aux besoins du projet, ne soient pas destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures. ".
5. Il résulte des dispositions de ces deux derniers articles que seul peut être mis à la charge du bénéficiaire d'une autorisation de construire le coût des équipements propres à sa construction. Dès lors que des équipements excèdent, par leurs caractéristiques et leurs dimensions, les seuls besoins constatés, ils ne peuvent, par suite, être regardés comme des équipements propres au sens de l'article L. 332-15, leur coût ne peut être, même pour partie, supporté par le constructeur.
6. Il résulte de l'instruction et notamment du décompte général définitif établi le 17 janvier 2017 que les travaux financés pour un montant de 12 580,06 euros par M. A... et Mme D... qui ont consisté en l'installation d'un système de raccordement au réseau public d'évacuation des eaux usées par voie gravitaire au sud-ouest du terrain leur appartenant, ont nécessité notamment la pose de 12 mètres de canalisations de 200 mm de diamètre et de deux regards respectivement de 800 et 1 000 mm de diamètre. Le syndicat mixte du lac d'Annecy fait valoir que la pose de ces canalisations et de ces regards s'imposait compte tenu des exigences du règlement d'assainissement et des règles de l'art et de la particularité de ces travaux qui ont nécessité de traverser la parcelle voisine AA 192, le déplacement de la canalisation, du syphon et du regard desservant l'autre parcelle voisine A 44 ainsi que le croisement et la reprise du réseau d'eau pluviales présent dans un fossé. Toutefois, il résulte de l'instruction que le dimensionnement des équipements litigieux autorisait le raccordement d'autres constructions. Les pièces produites au dossier permettent à ce titre d'établir que les constructions des parcelles voisines cadastrées AA 44 et AA n° 192 ont été effectivement raccordées à cette partie du réseau financé par les intéressés. Ainsi, les installations litigieuses ne peuvent être regardées comme étant dimensionnées, dès l'origine, pour les stricts besoins du projet de construction de M. A... et Mme D.... Par suite, et alors même que la desserte des parcelles voisines A 40 et A 41 se ferait depuis un regard existant sur la voie publique et non depuis le regard créé pour desservir la propriété des intéressés, la participation acquittée par M. A... et par Mme D..., lors de la réalisation de ces travaux, qui présentent le caractère d'équipements publics, et dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle entrerait dans les prévisions des articles L. 3114 ou L. 3326 du code de l'urbanisme, est réputée sans cause et sa répétition relève de l'article L. 33230 du code de l'urbanisme.
7. Dès lors, et ainsi qu'il a été exposé précédemment, que les équipements litigieux excèdent, par leurs caractéristiques et leurs dimensions, les seuls besoins de la construction projetée par M. A... et par Mme D... et qu'ils ne peuvent, par suite, être regardés comme des équipements propres au sens de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme, leur coût ne peut être, même pour partie, supporté par le constructeur. Par suite, les conclusions présentées à titre subsidiaire par le syndicat mixte du lac d'Annecy et tendant à ce qu'il soit déduit du montant de la répétition demandée par M. A... et par Mme D... les dépenses exposées pour la réalisation des 12,34 m de canalisation, qui correspondrait à la partie du branchement propre aux intéressés et qui s'élèvent à une somme de 2 324,89 euros, toutes taxes comprises, ne peuvent qu'être rejetées.
8. Il résulte de ce qui précède que le syndicat mixte du lac d'Annecy n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à rembourser la somme de 12 580,06 euros à M. A... et à Mme D....
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que le syndicat mixte du lac d'Annecy demande sur leur fondement soit mise à la charge de M. A... et de Mme D..., qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions du même article, de mettre à la charge du requérant le versement d'une somme de 2 000 euros à M. A... et à Mme D... au titre des frais exposés à l'occasion du litige.
DECIDE :
Article 1er : La requête du syndicat mixte du lac d'Annecy est rejetée.
Article 2 : Le syndicat mixte du lac d'Annecy versera une somme de 2 000 euros à M. A... et à Mme D... au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat mixte du lac d'Annecy, à M. G... A... et à Mme C... D....
Délibéré après l'audience du 25 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme F..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2021.
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N° 20LY00814