Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 février 2017 et 16 octobre 2017, Mme H..., représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 28 novembre 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Dijon du 26 mai 2015 et la décision du 1er septembre 2015 portant rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Dijon une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle a intérêt à agir en qualité de voisine immédiate du projet de construction et qu'il s'agit en outre d'un projet important qui affectera directement les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance du bien qu'elle occupe ;
- le dossier de demande de permis de construire comporte plusieurs incohérences ou insuffisances, s'agissant de la longueur de la façade sud de la voie d'accès au tènement, de l'échelle choisie de 1/500ème pour le plan de masse, de l'absence d'indication de l'échelle pour le plan de situation, le plan cadastral et le plan parcellaire, de l'absence de report des plans de coupe sur les plans de masse, de l'absence d'indication sur les plantations existantes et l'état futur des plantations et enfin du défaut de production d'une note de calcul relative à l'infiltration des eaux pluviales ;
- le projet autorisé méconnaît l'article UG 4 du règlement du plan local d'urbanisme relatif aux débits d'eau pluvial ;
- ce projet méconnaît la limite de 10 % d'emprise au sol fixée par le règlement du plan local d'urbanisme pour le terrain d'assiette du projet qui constitue un secteur d'intérêt paysager, l'exclusion d'une surface de 72 m² du secteur d'intérêt paysager par le plan de zonage du plan local d'urbanisme étant illégale.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 novembre 2017, la commune de Dijon, représentée par MeB..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme H...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir :
- à titre principal, qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé ;
- à titre subsidiaire, que l'éventuelle carence du projet s'agissant du respect de l'article UG 4 est régularisable.
Par des mémoires en défense enregistrés les 5 mai 2017 et 26 février 2018, la SCI Noble 6, représentée par MeG..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de Mme H...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de MmeD..., première conseillère,
- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,
- et les observations de Me A...représentant MmeH..., Me C...représentant la ville de Dijon et de MeG..., représentant la SCI Noble 6.
1. Considérant que par un arrêté du 26 mai 2015, le maire de Dijon a délivré à la société civile immobilière (SCI) Noble 6 un permis portant sur la construction de deux immeubles collectifs de quinze logements sur un terrain situé rue Gustave Noblemaire à Dijon; que Mme H...a formé un recours gracieux contre cet arrêté, lequel a été rejeté par une décision du 1er septembre 2015 ; qu'elle relève appel du jugement du 28 novembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
Sur la légalité des décisions en litige :
En ce qui concerne la composition du dossier de demande de permis de construire :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune ; b) Le projet architectural défini par l'article L. 431-2 et comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 431-8 à R. 431-12. " ; qu'aux termes de l'article R. 431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " ; qu'aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. (...) " ; qu'enfin aux termes de l'article UG 4 du règlement du plan local d'urbanisme : " (...) Eaux pluviales / Principe général / Aucune construction ou installation nouvelle ne devra avoir pour conséquence d'accroitre les débits d'eaux pluviales ; cette disposition ne s'applique pas aux projets entrainant une imperméabilisation supplémentaire inferieure ou égale à 20 m². / Le volume d'eau pluviale à prendre en compte résultera, sauf impossibilité technique à justifier, de l'addition de la surface imperméabilisée à l'occasion du projet et d'une partie de la surface initialement imperméabilisée avant le projet. / En aucun cas, les quantités d'eaux traitées par infiltration et/ou par stockage ne pourront être inferieures après réalisation du projet, à celles existantes auparavant. / Les modalités de calcul des surfaces, des précipitations, et des volumes de stockage figurent dans la note des annexes sanitaires en pièce n° 5.6.1 du PLU. / Mise en oeuvre du principe général / Dans les zones d'infiltrations prioritaires définies en bleu sur le plan (cf chapitre 2 des Dispositions communes a toutes les zones), les eaux de ruissellement seront infiltrées dans le sol ; des solutions mixtes de gestion des eaux pluviales seront acceptées (infiltration, rétention en surface, stockage enterré), le rejet au réseau étant limité à la part non infiltrable. Le débit de fuite sera alors défini en fonction des surfaces correspondant à la part non infiltrée. / En cas d'impossibilité d'infiltration et en dehors des zones d'infiltration prioritaires, les eaux feront l'objet de rétentions avant rejet dans le réseau (...) " ;
3. Considérant que la circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable ;
4. Considérant, en premier lieu, que Mme H...se prévaut d'une incohérence sur la longueur de la voie qui mène au tènement depuis le rue Noblemaire, le plan de masse mentionnant une longueur de 30,18 mètres alors qu'en prenant l'échelle du plan, elle relève elle-même une longueur de 29,50 mètres ; qu'à la supposer établie, cette différence minime de longueur n'est pas de nature à avoir faussé l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'impose qu'une échelle figure sur le plan de situation, le plan cadastral et le plan parcellaire ; que si le plan de masse global présente une échelle large de 1/500ème, en raison de la taille importante du terrain d'assiette du projet, un plan de masse partiel à l'échelle 1/200ème a également été joint à la demande de permis de construire ; que l'ensemble des plans joints permettait de situer le projet sur le terrain communal et sur le terrain d'assiette ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif, tant le plan de masse que le plan de masse partiel, tous deux joints au dossier de demande de permis de construire, localisaient le tracé des plans de coupes ; que ces documents indiquaient également avec précision, au moyen de couleurs distinctes, le nombre et l'emplacement des arbres existants, ceux qui devaient être supprimés et ceux qui seraient replantés ; que la notice descriptive faisait état d'un engazonnement des espaces libres, de haies végétales et de la plantation d'arbustes et d'arbres de haute tige de type " Cognassiers du Japon " et " Lauriers " pour les arbustes ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que Mme H...soutient que la SCI Noble 6 aurait dû produire une note de calcul afin de permettre à l'autorité administrative d'apprécier le respect de l'article UG 4 du règlement du plan local d'urbanisme relatif à la gestion des eaux pluviales ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet se situe en zone d'infiltration prioritaire ; que le projet prévoit l'évacuation des eaux pluviales par infiltration, au moyen de quatre puisards, sans rejet dans le réseau ; que compte tenu de la superficie du terrain d'assiette du projet, de 5041 m², des surfaces imperméabilisées, et du mode d'évacuation des eaux pluviales retenu, l'absence de production d'une note de calcul auprès du service instructeur n'était, en tout état de cause, pas de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative sur le respect de la réglementation applicable en matière de gestion des eaux pluviales ;
En ce qui concerne le respect de l'emprise au sol maximale fixée en espace d'intérêt paysager :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-1-5 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable : " (...) III. Le règlement peut, en matière de caractéristiques architecturale, urbaine et écologique : (...) 2° Identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les quartiers, îlots, immeubles, espaces publics, monuments, sites et secteurs à protéger, à mettre en valeur ou à requalifier pour des motifs d'ordre culturel, historique, architectural ou écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. " ; qu'en vertu des dispositions particulières pour la protection du cadre bâti et naturel du plan local d'urbanisme de la commune de Dijon, les espaces d'intérêt paysager constituent des " secteurs privés non ouverts au public mais avec un impact paysager important. Y sont admis les constructions, ouvrages ou installations dans la limite de 10 % de l'emprise protégée et tenant compte dans la mesure du possible des arbres ou plantations existantes " ;
9. Considérant que Mme H...soutient qu'une superficie de 4 826,60 m² sur le terrain d'assiette du projet, lui-même d'une superficie de 5 041 m², est classée en espace d'intérêt paysager, à l'exclusion de la voie qui mène au tènement depuis le rue Noblemaire, d'une superficie de 142,14 m², de sorte que le projet, qui présente une emprise au sol de 545,28 m², ne pouvait en réalité dépasser 482,66 m² d'emprise au sol ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment du plan de zonage du plan local d'urbanisme de Dijon, qu'au sein de l'espace d'intérêt paysager, effectivement d'une superficie de 4 826,60 m², figure une pastille non classée en espace d'intérêt paysager, qui correspond à un ancien bâtiment en ruine, d'une emprise au sol de 72,29 m² ; que le bâtiment B du projet s'étend en partie sur la surface d'intérêt paysager, mais également sur la totalité de la surface de 72,29 m² ne constituant pas un espace d'intérêt paysager soumis à la limite des 10 % ; que l'emprise au sol totale des deux bâtiments projetés, qui s'étend sur 545,28 m², dont 72,29 m² hors de l'espace d'intérêt paysager et 472,99 m² au sein de l'espace d'intérêt paysager, ne méconnaît donc pas la limite de 10 % de l'emprise protégée prévue par les dispositions citées au point 8 ;
10. Considérant que Mme H...soutient en outre, par la voie de l'exception d'illégalité, que l'exclusion des 72,29 m² de l'espace d'intérêt paysager est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, toutefois, elle n'invoque pas l'illégalité du permis de construire au regard des dispositions antérieures et ne peut dès lors utilement invoquer une telle exception ; qu'en tout état de cause, les dispositions générales du plan local d'urbanisme de la commune de Dijon, relatives aux espaces d'intérêt paysager, compte tenu de l'économie du plan local d'urbanisme, ont vocation à s'appliquer uniquement à des " éléments naturels constitutifs du cadre naturel ", par opposition au cadre bâti ; que dès lors un tel pastillage d'un élément bâti, fût-il en ruine, n'apparaît pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme H...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Dijon, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme H...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme H...le versement à la commune de Dijon et à la SCI Noble 6 d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par chacune d'elles et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme H...est rejetée.
Article 2 : Mme H...versera la somme de 1 500 euros à la commune de Dijon et à la SCI Noble 6 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...H..., à la commune de Dijon et à la SCI Noble 6.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,
M. Souteyrand, président-assesseur,
MmeD..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 25 octobre 2018.
1
2
N° 17LY00634
mpd