Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 10 novembre 2017, M.B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 juillet 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire du 10 octobre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence en qualité de salarié dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient :
Sur la décision de refus de certificat de résidence :
- qu'elle est insuffisamment motivée ;
- qu'elle méconnaît l'article 7 b) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et le 1° de l'article R. 5221-20 du code du travail ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- qu'elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de certificat de résidence ;
- qu'elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision fixant le délai de départ volontaire à 30 jours :
- qu'elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
- qu'elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 avril 2018, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que la demande de première instance était tardive et donc irrecevable.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 19 septembre 2017, M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- la loi n° 9et-647 du la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de MmeA..., première conseillère.
1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien, est entré régulièrement en France le 20 août 2014 avec son épouse et leurs deux enfants mineurs ; que le 11 septembre 2014, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que le préfet de l'Essonne a rejeté sa demande par un arrêté du 28 avril 2015 qui a été annulé par le tribunal administratif de Versailles par un jugement du 30 mai 2016, enjoignant à l'administration de réexaminer sa demande ; que, dans l'intervalle, M. B...a déménagé dans la Loire et a de nouveau sollicité un certificat de résidence en qualité de salarié le 16 décembre 2015 ; que le préfet de la Loire a rejeté sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi par un arrêté du 10 octobre 2016 ; que M. B...relève appel du jugement du 6 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur le refus de certificat de résidence :
2. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision en litige doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 7 de l'accord franco-algérien susvisé : " (...) b) Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention "salarié" ; cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la réglementation française. " ; qu'aux termes de l'article 9 de ce même accord : " (...) Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français au titre des articles 4, 5,7, 7 bis al. 4 (lettre c et d) et du titre III du protocole, les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises (...) " ;
4. Considérant que le préfet de la Loire a refusé la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de salarié à M. B...aux motifs, d'une part, qu'il ne disposait pas d'un visa de long séjour et, d'autre part, qu'il ne fournissait pas de contrat de travail visé par les autorités compétentes ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée : " 1. La présente directive s'applique aux ressortissants de pays tiers qui résident légalement sur le territoire d'un État membre. (...) 3. La présente directive s'applique sans préjudice des dispositions plus favorables : (...) b) des accords bilatéraux déjà conclus entre un État membre et un pays tiers avant la date d'entrée en vigueur de la présente directive " ; qu'aux termes de l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile transposant la directive n° 2003/109/CE : " L'étranger titulaire de la carte de résident de longue durée-CE définie par les dispositions communautaires applicables en cette matière et accordée dans un autre Etat membre de l'Union européenne qui justifie de ressources stables et suffisantes pour subvenir à ses besoins et, le cas échéant, à ceux de sa famille ainsi que d'une assurance maladie obtient, sous réserve qu'il en fasse la demande dans les trois mois qui suivent son entrée en France et sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée : (...) 5° Une carte de séjour temporaire portant la mention de l'activité professionnelle pour laquelle il a obtenu l'autorisation préalable requise, dans les conditions définies, selon le cas, aux 1°, 2° ou 3° de l'article L. 313-10 " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...est entré en France le 20 août 2014 et a sollicité initialement auprès du préfet de l'Essonne un certificat de résidence en qualité de salarié le 11 septembre 2014, demande réitérée le 16 décembre 2015 auprès du préfet de la Loire alors que l'instance relative à l'arrêté précédent était pendante devant le tribunal administratif de Versailles ; qu'étant titulaire d'une carte de résident longue durée-CE délivrée par les autorités italiennes en cours de validité, le préfet de la Loire ne pouvait légalement lui opposer l'absence de production d'un visa de long séjour à l'appui de sa demande ;
7. Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) " ;
8. Considérant que si M. B...soutient qu'il a reçu une formation de boucher et qu'il a exercé cette profession pendant dix ans, cette argumentation est inopérante dès lors que les autorités compétentes n'ont pas contesté l'adéquation entre sa qualification et son expérience et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule mais l'absence de démarches accomplies par la société le Comptoir des viandes auprès de Pôle Emploi ; que M. B...n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'existence de telles démarches ; que le préfet de la Loire aurait pris la même décision en s'appuyant sur le seul motif tiré de l'absence de production d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien doit être écarté ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de certificat de résidence doit être écarté ;
10. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;
Sur les décisions fixant le délai de départ volontaire à trente jours et le pays de renvoi :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français soulevé à l'encontre de ces deux décisions doit être écarté ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire du 10 octobre 2016 ; que, par suite, ses conclusions accessoires à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
Mme Fischer-Hirtz, présidente de chambre,
M. Souteyrand, président-assesseur,
MmeA..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 25 octobre 2018.
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N° 17LY03858