Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 21 août 2018, M. B..., représenté par Selarl Chircop, Chartier, avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 26 juin 2018 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision susmentionnée du 6 janvier 2017 ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du ministre chargé du travail du 6 janvier 2017 est insuffisamment motivée ;
- en l'absence de mention de l'objet de la convocation à l'entretien préalable du 3 mars 2016, la procédure suivie par son employeur est irrégulière ;
- le délai d'un mois prévu au quatrième alinéa de l'article L. 1332-2 du code du travail entre la date de l'entretien préalable et la demande d'autorisation de licenciement n'a pas été respecté ;
- les faits qui lui sont reprochés étaient prescrits ;
- ces faits ne présentent pas le caractère de fautes ;
- la décision du 28 juillet 2016 de l'inspecteur du travail a été prise par une autorité territorialement incompétente ;
- la décision de l'inspecteur du travail est insuffisamment motivée ;
- il existe un lien entre son licenciement et son mandat de délégué du personnel.
En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, l'affaire a été dispensée d'instruction.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
M. B... ayant été régulièrement averti du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;
- les observations de Me Freychet, avocat de M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. La caisse d'épargne de Rhône-Alpes a saisi l'inspecteur du travail, le 9 juin 2016, d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif disciplinaire de M. B..., salarié de l'entreprise depuis 2004, employé en dernier lieu en qualité de directeur d'agence et exerçant alors le mandat de délégué du personnel. Le 28 juillet 2016, l'inspecteur du travail de la 8ème section du Rhône a accordé l'autorisation demandée. Saisi d'un recours hiérarchique, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, le 6 janvier 2017, annulé la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le licenciement de l'intéressé. M. B... fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre du 6 janvier 2017 en tant qu'elle autorise son licenciement.
2. En premier lieu, comme l'a jugé le tribunal administratif, dont le jugement n'est pas contesté sur ce point, la décision de l'inspecteur du travail du 28 juillet 2016 a été annulée, sur recours hiérarchique, par l'article 1er de la décision du ministre du 6 janvier 2017. Cet article étant devenu définitif en cours d'instance, les conclusions de M. B... tendant à son annulation étaient devenues sans objet.
3. En deuxième lieu, la décision du ministre chargé du travail du 6 janvier 2017 vise le code du travail et notamment son article L. 2411-5 et comporte l'énoncé des considérations de fait qui en constituent le fondement. Ainsi, elle est suffisamment motivée.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. / La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. / L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. "
5. Il résulte de ces dispositions que l'employeur qui envisage de sanctionner une faute par un licenciement, auquel les prescriptions de l'article L. 1232-2 du code du travail sont applicables, doit explicitement faire mention de cette éventualité dans la lettre de convocation à l'entretien préalable.
6. Si la lettre de convocation du 19 février 2016 pour un entretien préalable prévu le 2 mars 2016 ne mentionne pas la nature de la sanction envisagée, la nouvelle lettre de convocation du 15 avril suivant, pour un entretien préalable prévu le 27 avril 2016, mentionne la possibilité du licenciement de l'intéressé. Cette dernière lettre de convocation qui a abouti à la décision d'engager une procédure de licenciement, comporte donc la mention explicite de la nature de la sanction. Par suite, le moyen soulevé par M. B..., tiré de l'irrégularité de la convocation à l'entretien préalable, doit être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 1332-2 du code du travail : " (...) La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. (...) ".
8. Si le requérant soutient que le délai d'un mois prévu par les dispositions susmentionnées était expiré le 7 juin 2016, date à laquelle la demande d'autorisation de licenciement le concernant a été adressée à l'inspection du travail, compte tenu du fait que l'entretien préalable s'est tenu le 27 avril 2016, ce moyen est inopérant à l'encontre de la décision du ministre du travail dès lors que la sanction prévue par les dispositions précitées de l'article L. 1332-2 du code du travail ne se rapporte pas à l'autorisation administrative de licenciement mais à la sanction prononcée par l'employeur. En tout état de cause, le délai d'un mois dont dispose l'employeur pour notifier la sanction après l'entretien préalable, se trouve suspendu par la demande d'autorisation de licenciement.
9. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales. "
10. Son employeur a reproché à M. B..., d'une part, d'avoir en 2012 et 2013 souscrit un contrat d'assurance-vie et ouvert un livret d'épargne pour le compte d'un client décédé en 2003 et, d'autre part, d'avoir, d'août 2014 au 8 janvier 2016, accordé des remises commerciales injustifiées à des clients en méconnaissance des règles applicables. L'intéressé fait valoir, sur le premier grief, que le client dont il s'agit est décédé en 2003 et que le service des successions a reçu le certificat de décès en novembre 2015. Toutefois, une enquête interne a été diligentée, dont les résultats n'ont été connus qu'en février 2016 et qui a révélé ce contournement des règles. Il fait valoir aussi qu'il existe des procédures de contrôle interne, que des audits de l'agence qu'il dirigeait étaient régulièrement effectués et qu'aucune anomalie n'a été mise en évidence. Il ressort toutefois des pièces du dossier que son employeur a eu une connaissance complète des faits au plus tôt le 11 février 2016, date à laquelle lui ont été communiqués oralement les résultats de l'enquête interne qu'il a diligentée.
11. M. B... a été convoqué, par lettre du 11 février 2016, à un entretien préalable prévu le 23 février 2016. Une nouvelle convocation lui a été adressée par lettre du 19 février 2016, afin de respecter le délai de cinq jours fixé par l'article L. 1232-2 du code du travail. La procédure a été reprise par une nouvelle convocation à un entretien préalable, par lettre du 15 avril 2016 reçue le 18 avril suivant. Dès lors, les faits n'étaient pas atteints par la prescription.
12. En sixième lieu, il ressort des pièces du dossier que les faits mentionnés ci-dessus sont établis. M. B... se prévaut de la situation de sous-effectifs de l'agence qu'il dirigeait, du manque d'expérience de certains de ses collaborateurs et des exigences excessives de son employeur s'agissant des performances des salariés. Toutefois, compte tenu notamment des responsabilités qui étaient les siennes, les faits rappelés ci-dessus étaient d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
13. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que son licenciement présente un lien avec le mandat détenu par M. B....
14. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... B..., à la caisse d'épargne Rhône-Alpes et à la ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Souteyrand, président assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 mai 2019.
Le rapporteur,
P. DècheLe président,
J.-P. Clot
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 18LY03287