Par un recours enregistré le 29 octobre 2013, le ministre de l'économie et des finances demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon, en date du 4 juillet 2013 ;
2°) de remettre à la charge de M. de la Chapelle les amendes qui lui ont été infligées en raison du défaut de production dans les délais prescrits de ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée des mois de juillet et septembre 2010.
Il soutient que le fait que les déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée déposées tardivement par M. de la Chapelle entraient dans le champ d'application de l'article 1728 du code général des impôts ne suffit pas à faire obstacle à l'application de l'amende prévue à l'article 1729 B du même code, la réforme des pénalités fiscales opérée par l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005, qui a modifié la rédaction de l'article 1725 devenu l'article 1729 B de ce code, ayant entendu faire obstacle au cumul de la majoration proportionnelle, prévue à l'article 1728, et de l'amende forfaitaire, prévue à l'article 1729 B, sans exclure les déclarations ne faisant apparaître aucun droit du champ d'application de l'article 1729 B du code général des impôts, ce qui aboutirait à l'absence de toute sanction pour dépôt tardif d'une déclaration lorsque celle-ci ne donne lieu à aucun droit dû envers le Trésor.
Par une ordonnance du 1er décembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 4 janvier 2016.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement attaqué du fait de la composition de la formation de jugement, le rapporteur public étant mentionné parmi les trois magistrats ayant siégé à l'audience.
Des observations en réponse à cette information, présentées par Me A...pour M. de la Chapelle, ont été enregistrées le 29 décembre 2015.
Un mémoire présenté par Me A...pour M. de la Chapelle a été enregistré postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pourny,
- les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public,
- et les observations de Moulle-Balbi, représentant M. de la Chapelle.
1. Considérant que M. de la Chapelle, qui exerce la profession d'avocat, n'a pas produit dans les délais prescrits les déclarations de chiffre d'affaires qu'il devait remettre à l'administration fiscale au titre des mois de juillet et de septembre 2010 ; que l'administration fiscale lui a infligé pour chacune de ces infractions l'amende de 150 euros prévue par les dispositions du 1 de l'article 1729 B du code général des impôts ; que M. de la Chapelle a obtenu la décharge de ces amendes par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 4 juillet 2013 dont le ministre relève régulièrement appel ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 7 du code de justice administrative : " Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de rapporteur public, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu'elles appellent. " ; et qu'aux termes de l'article L. 10 du même code : " Les jugements sont publics. Ils mentionnent le nom des juges qui les ont rendus. " ;
3. Considérant que le jugement attaqué mentionne le nom d'un même magistrat comme s'étant prononcé publiquement en qualité de rapporteur public sur la demande de M. de la Chapelle, lors de l'audience du 18 juin 2013, et comme ayant siégé lors du jugement de cette affaire à la même audience ; qu'il résulte de ces mentions, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que la composition du tribunal administratif était de ce fait irrégulière ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;
4. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. de la Chapelle au tribunal administratif de Lyon ;
Sur le bien-fondé des amendes litigieuses :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 B du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'un document qui doit être remis à l'administration fiscale, autre que ceux mentionnés aux articles 1728 et 1729, entraîne l'application d'une amende de 150 euros. (...) ", qu'aux termes de l'article 1728 de ce code : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; (...) " et qu'aux termes de l'article 1729 du même code : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que sont exclues du champ d'application de l'article 1729 B du code général des impôts les déclarations mentionnées aux articles 1728 et 1729 de ce code comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ou la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat ;
6. Considérant que, s'il est constant que M. de la Chapelle a déposé tardivement les déclarations de chiffre d'affaires qu'il devait déposer, en application de l'article 287 du code général des impôts, au titre des mois de juillet et septembre 2010, ces déclarations sont au nombre des actes comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt au sens des dispositions des articles 1728 et 1729 du code général des impôts, alors même qu'elles ne comportent qu'un montant de taxe sur la valeur ajoutée déductible et ne permettent pas, en l'absence de droits dûs au Trésor public, de faire application des pénalités prévues par ces articles ; que, par suite, ces déclarations ne sont pas au nombre des documents dont le défaut de production dans les délais prescrits peut légalement justifier l'infliction de l'amende prévue par les dispositions du 1 de l'article 1729 B du code général des impôts ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. de la Chapelle est fondé à demander la décharge des amendes qui lui ont été infligées en raison du dépôt tardif de ses déclarations de chiffre d'affaires des mois de juillet et septembre 2010 ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1102995 du tribunal administratif de Lyon, en date du 4 juillet 2013, est annulé.
Article 2 : M. de la Chapelle est déchargé des amendes en litige.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des finances et des comptes publics et à M. B... de la Chapelle.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
Mme Bourion, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 février 2016.
''
''
''
''
3
N° 13LY02883