Par une requête enregistrée le 22 juillet 2016, M. A..., représenté par la SCP Mendel, Vogue et associés, avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 19 mai 2016 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ou, subsidiairement, d'ordonner une expertise.
Il soutient que :
- il appartient au ministre chargé du travail d'apporter la preuve que Mme D..., signataire de la décision du 23 février 2015, disposait d'une délégation de signature ;
- la décision contestée est fondée sur le rapport du médecin inspecteur régional du travail qui ne précise pas en quoi des améliorations auraient été réalisées dans l'atelier " garnissage " ; c'est la première fois que ce médecin se rendait dans l'entreprise ; il n'avait ni chronomètre, ni thermomètre, ni balance de pesée ; il s'est uniquement basé sur ce que lui a dit la société Appétit de France ; contrairement à ce que mentionne ce rapport, aucune amélioration n'a été apportée à son cadre du travail.
Par un mémoire enregistré le 30 septembre 2016, la société Bourguignonne de pâtisserie, représentée par la Selarl Boulet, Lamberti, Bebon, avocats, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Clot, président ;
- les conclusions de Mme Bourion, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... occupe depuis 1984 un emploi à temps complet d'ouvrier de production dans la société Appétit de France, entreprise de fabrication de pâtisseries industrielles située à Tailly (Côte-d'Or) reprise en 2014 par la société Deliciae, devenue la société Bourguignonne de pâtisserie. Il est investi des mandats de délégué syndical et de membre du comité central d'entreprise. Souffrant de bronchites chroniques, il a bénéficié en 2004 d'une restriction d'aptitude à son poste, afin de ne plus travailler dans les ateliers " garnissage " et " pause tournante ", où la température est maintenue à douze degrés en ambiance contrôlée. Le 1er juillet 2014, le médecin du travail, lors d'une visite périodique, l'a déclaré apte à son poste de travail sans restriction. Le 17 septembre 2014, le médecin inspecteur du travail a émis l'avis selon lequel M. A... était apte au poste d'ouvrier de production polyvalent, sous réserve de disposer des équipements de protection individuelle contre le froid incluant une protection du cou. Le 10 octobre 2014, l'inspectrice du travail l'a déclaré apte à son poste d'ouvrier de production polyvalent mais sans affectation au " garnissage " ni à la " pause tournante ". Le 23 février 2015, le ministre chargé du travail a annulé cette décision de l'inspectrice du travail et déclaré M. A... apte au poste d'ouvrier de production polyvalent sous réserve de disposer des équipements de protection individuelle contre le froid incluant une protection du cou. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
2. L'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 prévoit que : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'État et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité (...) ". Mme D..., signataire de la décision du 23 février 2015 en litige, a été nommée sous-directrice des conditions de travail, de la santé et de la sécurité au travail par arrêté du Premier ministre et du ministre du travail, de l'emploi et de la santé du 23 février 2012 publié au Journal officiel le 25 février 2012. Par suite, Mme C... était compétente pour signer cette décision.
3. Aux termes de l'article L. 4624-1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. / L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. ".
4. Selon l'avis émis le 17 septembre 2014 par le médecin inspecteur régional du travail consulté par l'inspecteur du travail, des modifications intervenues dans l'atelier " garnissage ", s'agissant de l'organisation de la chaîne, du système de refroidissement et de l'hygrométrie, ont entraîné une amélioration des conditions de travail et notamment une réduction du froid ressenti. Il en résulte, selon ce médecin, que les restrictions à l'aptitude de M. A... ne sont plus justifiées. Cet avis a été émis après consultation du dossier de l'intéressé, son examen par ce médecin et l'étude de son poste de travail. La seule attestation d'un salarié de l'entreprise selon laquelle " les conditions de travail à l'atelier de garnissage n'ont pas évolué " ne permet pas de remettre en cause les constatations faites par le médecin inspecteur régional du travail. Dès lors, la décision en litige, qui reprend ces éléments, ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, ni ne procède d'une erreur d'appréciation.
5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Bourguignonne de pâtisserie tendant au bénéfice de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Bourguignonne de pâtisserie tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société Bourguignonne de pâtisserie et au ministre du travail.
Délibéré après l'audience du 26 avril 2018 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président assesseur,
M. Savouré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 mai 2018.
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N° 16LY02578