Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 mai 2020 et un mémoire enregistré le 22 octobre 2021, la société Axa France IARD, représentée par Me Vignancour-de Barruel, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800920 du 26 mars 2020 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) de condamner le département de la Haute-Loire à lui verser la somme de totale de 207 976 euros en réparation de son préjudice ;
3°) de mettre à la charge du département de la Haute-Loire la somme de 6 500 euros au titre des frais exposés en première instance et en appel, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité sans faute du département de la Haute-Loire est engagée du fait des agissements d'un mineur placé sous sa garde et à l'origine de l'incendie survenu le 26 septembre 2014 dont ont été victimes ses assurées, la société Solution Micro et la SCI SMCP ;
- la responsabilité du département n'est pas limitée à la part encourue individuellement par le mineur sous sa garde ;
- elle est subrogée, en application de l'article L. 121-12 du code des assurances, au titre de l'incendie survenu le 26 septembre 2014, à hauteur de 51 180 euros dans les droits de la société Solution Micro et à hauteur de 143 375 euros dans les droits de la SCI SMCP ; elle justifie de cette subrogation ;
- elle a droit à la somme de 13 421 euros au titre des frais de l'expertise qu'elle a diligentée et qui n'est pas intégrée dans les montants versés à ses assurées.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 septembre 2021 et le 19 octobre 2021, le département de la Haute-Loire, représenté par Me Saban, conclut au rejet de la requête ainsi que des conclusions présentées par la société Solution Micro et la SCI SMCP, et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Axa France IARD au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à titre principal, la société Solution Micro et la SCI SMCP n'ont pas présenté de demande d'indemnisation en première instance ni n'ont présenté de réclamation préalable de sorte que leurs conclusions indemnitaires sont irrecevables en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative ;
- les conclusions présentées par la société Solution Micro et la SCI SMCP sont tardives ;
- ces sociétés se sont désistées de leur demande indemnitaire de sorte qu'elles ne sont plus en droit de former une demande de somme d'argent sur le même fondement ;
- les créances présentées par la société Solution Micro et la SCI SMCP sont prescrites en application de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;
- en l'absence de prise en charge durable et globale par le département du mineur en cause, les titulaires de l'autorité parentale demeurent responsables des dommages causés aux tiers par ce mineur ; sa responsabilité ne saurait ainsi être recherchée ;
- la société Axa France IARD n'est pas fondée à demander au département des sommes que ses assurées devraient recevoir en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Riom du 8 novembre 2017 qui a condamné les coauteurs majeurs de l'incendie à indemniser le préjudice matériel de la société Solution Micro à hauteur de 87 873,57 euros et le préjudice de la SCI SMCP à hauteur de 165 422,16 euros ;
- la société Axa France IARD ne justifie pas que les deux majeurs, condamnés par la cour d'appel de Riom à indemniser le préjudice des victimes, n'auraient pas exécuté leur condamnation ;
- il peut se prévaloir de la faute du tiers ayant concouru à la réalisation du dommage ; en l'espèce, la part de responsabilité du mineur à sa charge, qui n'a ni préparé ni allumé l'incendie, ne saurait excéder 15 % des sommes réclamées ;
- la société Axa France IARD n'apporte pas la preuve du paiement à ses assurées des indemnités qu'elle réclame au titre de la subrogation légale ;
- la société Solution Micro et la SCI SMCP ne justifient pas de la réalité de leurs préjudices ;
- les montants figurant dans le rapport d'expertise ne sont pas étayés et ne sauraient servir à justifier les sommes demandées par la société Axa France IARD en remboursement des indemnités qu'elle dit avoir versées à la société Solution Micro ;
- la société Axa France IARD ne produit aucun document justificatif des sommes forfaitaires de l'indemnité principale qu'elle aurait versée à la SCI SMCP et ne justifie d'aucun règlement au titre d'une indemnité différée alléguée ;
- la société requérante, qui ne prouve pas avoir réglé les frais d'expertise, ne justifie pas non plus de leur utilité.
Par un mémoire enregistré le 5 octobre 2021, la société Solution Micro et la SCI SMCP, représentées par Me Mabrut, demandent à la cour de condamner le département de la Haute-Loire à verser à la société Solution Micro la somme de 36 693,57 euros et à la SCI SMCP la somme de 22 047,16 euros au titre des préjudices restés à leur charge.
Elles soutiennent que :
- la responsabilité sans faute du département de la Haute-Loire est engagée à raison des agissements du mineur qui lui était alors confié ;
- la SCI SMCP, propriétaire des locaux incendiés, a subi un préjudice au titre de la réparation et reconstruction du bien immobilier, de la maîtrise d'œuvre, de l'assistance à expertise d'assurance et de la perte de loyers, évalué à la somme de 165 422,16 euros ; compte tenu de la somme de 143 375 euros versée par son assureur, le préjudice resté à sa charge s'élève à la somme de 22 047,16 euros que le département devra être condamné à lui verser ;
- la société Solution Micro a subi un préjudice au titre de l'agencement des nouveaux locaux, de la marchandise détruite par l'incendie, du matériel volé ou détruit, du nettoyage et de la papèterie, de la reconstitution des archives, des pertes d'exploitation, des frais d'assistance à expertise et de la prime d'assurance pour le local provisoire, évalué à hauteur de la somme totale de 897 873,57 euros hors taxes ; compte tenu de la somme de 51 180 euros versée par son assureur, le préjudice resté à sa charge s'élève à la somme de 36 693,57 euros que le département devra être condamné à lui verser.
Un mémoire présenté par la société Axa France IARD a été enregistré le 9 novembre 2021 et n'a pas été communiqué en application du dernier alinéa de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des assurances ;
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pin, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Cohendy, représentant le département de la Haute-Loire.
Considérant ce qui suit :
1. Un mineur ayant fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert en application des articles 375 et suivants du code civil, a été confié, par une ordonnance du juge des enfants du tribunal de grande instance du B... du 24 septembre 2014, au service départemental de l'aide sociale à l'enfance de la Haute-Loire à compter de cette date et jusqu'au 30 septembre 2014. Par un jugement du tribunal pour enfants C... B... du 14 décembre 2016, devenu définitif, ce mineur a notamment été déclaré coupable de l'incendie qui s'est déclaré le 26 septembre 2014 et qui a conduit à la destruction des locaux situés à Brives-Charensac appartenant à la SCI SMCP et loués à la société Solution Micro et de vol de matériel informatique dans ces mêmes locaux, aggravé par trois circonstances. La société d'assurance Axa France IARD, en sa qualité d'assureur de la SCI SMCP et de la société Solution Micro, a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner le département de la Haute-Loire à hauteur de la somme totale de 207 976 euros, incluant les indemnités qu'elle indique avoir versées à ses assurées et les frais d'une expertise. La société Axa France IARD relève appel du jugement du 26 mars 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande indemnitaire. La SCI SMCP et la société Solution Micro demandent à la cour de condamner le département de la Haute-Loire à les indemniser des préjudices qu'elles ont subis et qui n'ont pas été réparés par l'indemnité versée par leur assureur.
Sur la recevabilité des conclusions présentées par la SCI SMCP et la société Solution Micro :
2. Il résulte de l'instruction que la SCI SMCP et la société Solution Micro, mises en cause en première instance, n'ont pas recherché devant le tribunal administratif la condamnation du département de la Haute-Loire à les indemniser des préjudices dont elles estiment qu'ils n'ont pas été réparés par les sommes versées par leur assureur et dont elles ont reconnu avoir reçu le versement respectivement les 9 décembre 2019 et 18 décembre 2019, ainsi qu'il résulte des quittances subrogatives versées au débat. Dès lors, comme le soutient le département, ces sociétés ne sont pas recevables à demander pour la première fois en appel à être indemnisées des sommes qu'elles réclament et qui ne concernent pas des préjudices apparus postérieurement au jugement du 26 mars 2020. Ces conclusions doivent, par suite, être rejetées.
Sur la subrogation :
3. Aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur (...) ". Il incombe à l'assureur qui entend bénéficier de la subrogation prévue par ces dispositions d'apporter, par tout moyen, la preuve du versement de l'indemnité d'assurance à son assuré. Le bénéfice de la subrogation légale n'est pas subordonné à la production de quittances subrogatives.
4. La société Axa France IARD a produit, en première instance, deux quittances subrogatives, datées des 9 décembre 2019 et 18 décembre 2019, attestant qu'elle a versé à la SCI SMCP et à la société Solution Micro des indemnités, d'un montant respectif de 143 375 euros et 51 180 euros, destinées à réparer divers éléments du préjudice subi lors de l'incendie du 26 septembre 2014. Contrairement à ce que soutient en défense le département de la Haute-Loire et alors même que ces quittances ont été émises postérieurement à l'introduction de la demande devant le tribunal administratif, la société Axa France IARD justifie, par la seule production de ces pièces, être subrogée dans les droits de ses assurées à hauteur de ces montants.
Sur la responsabilité sans faute du département de la Haute-Loire :
5. La décision par laquelle le juge des enfants confie la garde d'un mineur, dans le cadre d'une mesure d'assistance éducative prise en vertu des articles 375 et suivants du code civil, à l'une des personnes mentionnées à l'article 375-3 du même code, transfère à la personne qui en est chargée la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie du mineur. En raison des pouvoirs dont le département se trouve ainsi investi lorsque le mineur a été confié à un service qui relève de son autorité, sa responsabilité est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur. Cette responsabilité n'est susceptible d'être atténuée ou supprimée que dans le cas où le dommage est imputable à un cas de force majeure ou à une faute de la victime.
6. L'autorité de la chose jugée au pénal s'impose aux autorités et juridictions administratives en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions.
7. D'une part, le 26 septembre 2014, l'immeuble appartenant à la SCI SMCP, sis à Brives-Charensac, et loué à la société Solution Micro, exerçant une activité de création-vente de logiciels informatiques, négoce de matériel informatique, conseil, installation et maintenance informatique, a été gravement endommagé par un incendie. Par un jugement du 14 décembre 2016, devenu définitif, et dont les constatations de fait s'imposent au juge administratif, le tribunal pour enfants C... B... a déclaré un mineur coupable de la destruction de ce bien par un moyen dangereux. La garde de ce mineur, lequel avait fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert pour une durée d'un an par un jugement du tribunal pour enfants C... B... du 22 mai 2014, avait été confiée au département de la Haute-Loire en vertu d'une ordonnance du juge des enfants de ce tribunal du 24 septembre 2014, à compter de cette date jusqu'au 30 septembre suivant. Le département se trouvait ainsi investi, à l'époque des faits, de la responsabilité d'organiser, diriger et contrôler la vie de ce mineur. Dès lors que le placement de ce mineur résulte d'une décision du juge des enfants prise sur le fondement des articles 375 et suivants du code civil et non d'une mesure administrative édictée par le président du conseil général, devenu conseil départemental, avec le consentement des titulaires de l'autorité parentale, sur le fondement des dispositions de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles, le département de la Haute-Loire ne peut utilement soutenir que la prise en charge de ce mineur par les services du département n'aurait pas présenté un caractère durable et global. Par suite, la responsabilité du département de la Haute-Loire, qui n'invoque ni le cas de force majeure ni la faute de la victime, est engagée, même sans faute, pour les dommages causés aux tiers par ce mineur.
8. D'autre part, le département de la Haute-Loire fait valoir que sa responsabilité est partiellement dégagée dès lors que l'incendie à l'origine du présent litige a également été provoqué par deux autres personnes, lesquelles ont été condamnées pour ces faits par le juge pénal. Toutefois, si le dommage est également imputable, pour partie, au fait d'un tiers, cette circonstance n'est pas de nature à atténuer la responsabilité sans faute encourue par le département, qui peut seulement, s'il s'y croit fondé, exercer devant les juridictions compétentes tels recours que de droit contre les tiers responsables du fait qu'il invoque.
Sur les conclusions indemnitaires de la société Axa France IARD :
En ce qui concerne l'évaluation du préjudice subi par la SCI SMCP :
9. Il résulte de l'instruction que l'expert commis par la société Axa France IARD a évalué à 3 357 euros le coût des mesures conservatoires prises immédiatement après l'incendie pour sécuriser le bâtiment consistant en un bâchage et l'obturation des ouvertures latérales détériorées par le sinistre, à 95 498 euros le coût de reconstruction du bâtiment sinistré, après application d'un coefficient de vétusté d'environ 21 %, et consistant en un chaînage et un arasement des murs périphériques, une réfection d'une partie de la charpente, de la toiture, des cloisons et des faux-plafonds, le remplacement des menuiseries en aluminium, la réfection des installations électriques et de plomberie au premier étage ainsi que la reprise de la totalité des revêtements de sol et de l'embellissement des pièces de l'étage, à 11 463 euros les honoraires de maîtrise d'œuvre liés à la reconstruction de l'immeuble, à 7 094 euros le montant des frais de démolition et d'évaluation des déblais consécutifs au sinistre, à 11 640 euros la perte de loyers et à 9 410 euros les honoraires de l'expert de l'assurée.
10. Le département de la Haute-Loire, qui au demeurant était représenté aux trois réunions contradictoires de l'expertise et accompagné d'un expert mandaté par la SMACL, son assureur, n'apporte aucun élément de nature à démontrer que, compte tenu de la nature et de l'ampleur du sinistre, l'évaluation détaillée par l'expert commis par la société Axa France IARD des dommages subis par la SCI SMCP, serait erronée ou surévaluée, alors même que cet expert n'a pas annexé de devis à son rapport. L'estimation du préjudice à laquelle a procédé l'expert tient compte avec précision de la nature et de l'étendue des travaux nécessaires pour remédier aux désordres subis. Au demeurant, il résulte de l'instruction que l'expert de l'assureur du département a, à l'issue des opérations, indiqué être d'accord sur la description et l'évaluation des dommages tels qu'énoncés au point précédent. En outre, il résulte de l'instruction, notamment des conditions générales du contrat d'assurance souscrit par la SCI SMCP auprès de la société Axa France IARD et des indications fournies par le rapport d'expertise, qu'à l'occasion d'une expertise amiable, l'assuré a la possibilité de se faire assister par un expert de son choix, les frais d'honoraires de cet expert étant, au final, pris en charge par l'assureur, dans les limites fixées par un barème prévu au contrat. Il n'est pas contesté que les honoraires de M. A..., expert mandaté par la SCI SMCP, fixés à 9 410 euros, ont été intégralement remboursés à la SCI SMCP par la société Axa France IARD. Il suit de là que les préjudices matériels subis par la SCI SMCP, propriétaire des locaux incendiés, s'établissent à la somme de 138 462 euros, incluant les frais correspondant aux mesures conservatoires de l'immeuble sinistré, aux travaux de démolition, reconstruction et évacuation des déblais, aux honoraires de maîtrise d'œuvre, aux pertes de loyers et aux honoraires de l'expert de l'assuré. Il y a lieu, dès lors, de condamner le département de la Haute-Loire à verser à la société Axa France IARD une somme de 138 462 euros en tant que subrogée dans les droits de la SCI SMCP sur le fondement de l'article L. 121-12 du code des assurances.
En ce qui concerne l'évaluation du préjudice subi par la société Solution Micro :
11. L'expert missionné par la société Axa France IARD, après avoir relevé que la quasi-totalité du contenu des deux tiers de la partie ouest des locaux occupés par la société Solution Micro au premier étage de l'immeuble avait été détruit par les émissions de fumée et le déversement d'eau destiné à lutter contre l'incendie et que les biens contenus dans les autres pièces, endommagés par la fumée, pourront être récupérés après décontamination et nettoyage, a évalué les dommages subis par la société Solution Micro à raison de l'incendie, à 8 624 euros au titre du coût de l'agencement des locaux incendiés, après l'application d'un coefficient de vétusté de 20 %, à 34 183 euros au titre des marchandises stockées incendiées, à 7 707 euros la valeur vénale du matériel détruit par l'incendie, à 5 500 euros le coût des opérations de nettoyage et de papèterie, à 4 700 euros le coût de reconstitution des archives, à 2 858 euros le coût de la perte d'exploitation, consistant en des frais liés à l'aménagement dans de nouveaux locaux à la suite du sinistre, soit la somme totale de 63 572 euros hors taxes. Les dommages liés au vol de matériel informatique ont été évalués par l'expert à la somme de 1 653 euros. Alors même que l'expert n'a pas joint à son rapport de devis, il résulte de l'instruction, notamment du rapprochement entre le rapport d'expertise et le détail produit par la société Solution Micro des coûts qu'elle a dû supporter à la suite du vol et de l'incendie, que les estimations faites par l'expert, en ce qu'elles concernent le coût des agencements, la perte de stocks, le coût des marchandises volées et incendiées, la perte d'exploitation et le coût de reconstitution des archives, ne sont pas exagérées, contrairement à ce que soutient le département. En revanche, il résulte des indications fournies par la société Solution Micro que le coût des opérations de nettoyage et de papèterie, qui avaient été évaluées par l'expert à la somme de 5 500 euros, s'est élevé seulement à la somme de 800 euros, selon une facture du 30 décembre 2014. Par suite, ainsi que le fait valoir le département de la Haute-Loire, l'estimation faite par l'expert de ce chef de préjudice s'est révélée excessive. Il suit de là que le préjudice subi par la société Solution Micro à la suite du vol de matériel informatique suivi de l'incendie, doit être évalué à la somme totale de 60 525 euros. Par suite, la société Axa France IARD étant seulement subrogée dans les droits de la société Solution Micro à concurrence de l'indemnité de 51 180 euros qu'elle lui a versée, il y a lieu de condamner le département de la Haute-Loire à lui verser une somme de 51 180 euros.
En ce qui concerne l'évaluation du préjudice subi par la société Axa France IARD :
12. Les informations recueillies contradictoirement par l'expert commis par la société Axa France IARD ont été utiles à la solution du litige. Il résulte de l'instruction, notamment d'une note d'honoraires du 20 février 2015 et d'une facture du 12 mars 2015, que les frais des opérations des deux expertises procédant à l'estimation du préjudice de la SCI SMCP et de celui de la société Solution Micro se sont établis à la somme totale de 11 184 euros hors taxes et ont été mis à la charge de la société Axa France IARD. Contrairement à ce que soutient le département, il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante ne se serait pas acquittée de ces sommes auprès du cabinet d'expertise. Par suite, il y a lieu de condamner le département à verser à la société Axa France IARD une somme de 11 184 euros qu'elle réclame à ce titre.
13. Il y a lieu, au vu de ce qui précède, de condamner le département de la Haute-Loire à verser à la société Axa France IARD une somme totale de 200 826 euros.
14. Il appartient au juge administratif, lorsqu'il détermine le montant et la forme des indemnités allouées par lui, de prendre, au besoin d'office, les mesures nécessaires pour que sa décision n'ait pas pour effet de procurer à la victime d'un dommage, par les indemnités qu'elle a pu ou pourrait obtenir en raison des mêmes faits, une réparation supérieure au préjudice subi. Il résulte de l'instruction que, par un arrêt du 8 novembre 2017, devenu définitif, la cour d'appel de Riom a condamné solidairement deux autres personnes déclarées également coupables du sinistre, à payer à la SCI SMCP la somme de 165 422,16 euros et à la société Solution Micro la somme de 87 873,57 euros en réparation de leurs préjudices matériels et financiers causés par le vol de matériel informatique et l'incendie des locaux. Ainsi qu'il a été dit aux points 7 et 8, la société Axa France IARD, subrogée dans les droits de ses assurées, est fondée à demander au département de la Haute-Loire la réparation du préjudice résultant des agissements du mineur placé sous sa garde, et ce indépendamment des conditions de solvabilité des coauteurs du sinistre. En revanche, le paiement de l'indemnité allouée par la cour à la société Axa France IARD, en sa qualité de subrogée dans les droits de ses assurées, doit être subordonné à la subrogation du département de la Haute-Loire à la SCI SMCP, la société Solution Micro et la société Axa France IARD, jusqu'à concurrence des sommes respectives de 138 462 euros, de 51 180 euros et de 11 184 euros, dans les droits qui résultent pour ces sociétés des condamnations qui ont été définitivement prononcées à leur profit par l'autorité judiciaire contre les autres responsables du vol de matériel et de l'incendie survenu le 26 septembre 2014.
15. Il résulte de ce qui précède que la société Axa France IARD est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande et à demander la condamnation du département de la Haute-Loire à lui verser une somme de 200 826 euros.
Sur les frais liés au litige :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la société Axa France IARD, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par le département de la Haute-Loire au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de faire droit aux conclusions présentées au même titre par la société Axa France IARD et de mettre à la charge du département de la Haute-Loire le versement à celle-ci d'une somme de 1 500 euros.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1800920 du 26 mars 2020 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 2 : Le département de la Haute-Loire est condamné à verser à la société Axa France IARD une somme de 200 826 euros, sous réserve de la subrogation de celui-ci à la SCI SMCP, à la société Solution Micro, assurées de la société Axa France IARD, et à cette dernière, à concurrence respectivement des sommes de 138 462 euros, de 51 180 euros et de 11 184 euros, dans les droits résultant pour chacune de ces sociétés des condamnations définitivement prononcées à leur profit contre les coauteurs du sinistre par l'autorité judiciaire.
Article 3 : Le département de la Haute-Loire versera à la société Axa France IARD une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Axa France IARD, au département de la Haute-Loire, à la société Solution Micro et à la SCI SMCP.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
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N° 20LY01509