Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 mars 2021, Mme A..., représentée par Me Sabatier, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2003962 du 25 février 2021 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 25 mai 2021 du préfet du Rhône ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée de dix ans ou un certificat de résidence temporaire, ou, à tout le moins, de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée en fait comme en droit ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier et sérieux de sa demande ;
- elle est entachée d'une méconnaissance des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ;
- elle méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet s'est fondé à tort sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues.
La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Conesa-Terrade, première conseillère,
- et les observations de Me Guillaume, substituant Me Sabatier, représentant Mme B... A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., ressortissante algérienne née le 31 octobre 1969, est entrée en France le16 novembre 2014 pour y solliciter un certificat de résidence en qualité de conjoint de ressortissant français. Un certificat de résidence temporaire en cette qualité lui a été délivré le 11 septembre 2015. Lors du renouvellement de celui-ci, elle a sollicité et obtenu la délivrance d'un certificat de résidence valable jusqu'au 23 janvier 2018 en raison de son état de santé sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Divorcée depuis le 7 novembre 2017, elle a sollicité le 11 janvier 2018, le renouvellement de son certificat de résidence temporaire sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par la présente requête, Mme A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 25 mai 2020 par laquelle le préfet du Rhône a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour.
2. En premier lieu, la requérante soutient que c'est à tort que, pour écarter le moyen tiré du défaut d'examen particulier et sérieux de sa demande d'admission au séjour, les premiers juges ont, sur le fondement de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, jugé qu'en s'abstenant, lors de sa présentation au guichet de la préfecture le 3 novembre 2019, de confirmer son intention d'obtenir la délivrance du certificat de résidence valable dix ans prévu par les stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien, sollicité par courrier daté du 28 octobre 2019, elle devait être regardée comme ayant implicitement mais nécessairement renoncé à solliciter la délivrance d'un certificat de résidence sur ce fondement. La requérante fait valoir que sa demande adressée par courrier a été reçue le 21 novembre 2019, soit postérieurement à sa présentation au guichet. Toutefois, il ressort de la lecture de la décision attaquée que celle-ci a été prise en réponse à une demande présentée le 11 janvier 2018 tendant au renouvellement du certificat de résidence prévu par les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien au regard de l'état de santé de l'intéressée, et non en réponse à la demande d'admission au séjour sur un autre fondement de ce même accord, y compris sur une demande écrite présentée postérieurement. Dans ces conditions, les moyens, à nouveau soulevés en appel par la requérante, tirés de l'insuffisance de motivation en fait comme en droit de la décision attaquée, pour ce motif, ainsi que le moyen tiré du défaut d'examen particulier et sérieux de sa demande par le préfet du Rhône doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Les dispositions du présent article (...) fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 7) au ressortissant algérien résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de certificats de résidence formées par les ressortissants algériens en application de ces stipulations, le préfet délivre le titre de séjour " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Enfin, l'article 4 de l'arrêté du 5 janvier 2017 susvisé prévoit : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA, sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences./ Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. / Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine. ".
4. La partie qui justifie de l'avis d'un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié et effectivement accessible dans le pays de renvoi.
5. Il ressort des pièces du dossier qu'aux termes de l'avis du collège de médecins du service médical de l'OFII, régulièrement rendu le 3 décembre 2018, si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut de soins peut être de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel elle peut voyager sans risque. Le certificat médical en date du 24 juin 2020, produit par l'intéressée, concernant son état de santé, au demeurant postérieur à la décision attaquée, n'est pas de nature à établir qu'en se fondant sur l'avis du collège de médecins de l'OFII quant à l'accès effectif dans son pays d'origine à un traitement médical approprié à son état, le préfet du Rhône aurait entaché sa décision d'une méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par suite, le moyen doit être écarté.
6. En troisième lieu aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien susvisé : " Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. Le certificat de résidence valable dix ans, renouvelé automatiquement, confère à son titulaire le droit d'exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l'exercice des professions réglementées. (...) ".
7. Il résulte de ce qui a été dit au point 2 que la décision litigieuse n'a pas été prise en réponse à une demande adressée par courrier tendant à la délivrance d'un certificat de résidence valable 10 ans en application des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien, mais en réponse à une demande de renouvellement du certificat de résidence délivré sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par suite, le préfet ne s'étant pas prononcé au regard des stipulations du 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations par la décision en litige doit être écarté comme inopérant.
8. En sixième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
9. Après son entrée en France en novembre 2014 munie d'un visa de court séjour, Mme A..., célibataire et sans enfant, se prévaut d'un séjour régulier sur le territoire français à compter du 11 septembre 2015 jusqu'au 23 janvier 2018, soutient qu'elle occupe un emploi de salariée dans le secteur de la restauration, et qu'un de ses frères réside également sur le territoire français en situation régulière. Toutefois, ces circonstances ne sont pas de nature à établir qu'en refusant de lui accorder le renouvellement de son certificat de résidence en raison de son état de santé, le préfet du Rhône aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par la décision litigieuse des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 25 mai 2020 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
Mme Conesa-Terrade, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.
N° 21LY00925 2