Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 mars 2019, et un mémoire complémentaire, enregistré le 26 août 2019, la société Mathalex, représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 5 mars 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) de condamner Saint-Etienne Métropole, venant aux droits de la commune de Saint-Galmier, à lui verser la somme de 11 719,29 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux en dédommagement du préjudice subi et la somme de 5 000 euros pour le préjudice moral et financier pendant les trois années de négociation sans issue avec la commune de Saint-Galmier ;
3°) de mettre à la charge de Saint-Etienne Métropole la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- Saint-Etienne Métropole vient aux droits de la commune de Saint-Galmier compte tenu du transfert de la compétence " assainissement " à Saint-Etienne Métropole et depuis l'intégration de la commune prenant effet le 1er janvier 2017 ;
- les fins de non-recevoir opposées seront écartées ; Saint-Etienne Métropole ne peut lui opposer la forclusion, la commune de Saint-Galmier n'a pas pris de décision à la suite de sa réclamation ; il n'y a pas eu publication ou notification de la décision attaquée ; la requête devant le tribunal administratif était suffisamment motivée ; la requête d'appel contient une critique de la décision du tribunal administratif ;
- elle n'est pas de mauvaise foi car les travaux entrepris par la commune rendent les canalisations impropres à leur destination ; les travaux publics sont à l'origine de nuisances et engagent la responsabilité de la personne publique en charge de la compétence " assainissement " ; l'intervention de l'entreprise Lacassagne a été ordonnée par la commune de Saint-Galmier ; il n'était pas prévu que les travaux soient à sa charge ; la commune de Saint-Galmier et, par voie de conséquence, Saint-Etienne Métropole ont commis une faute en rendant impossible l'accès au raccordement au réseau public d'assainissement ; le fait que les travaux de raccordement à la parcelle privée soient à la charge du propriétaire ne peut avoir d'incidence sur le sort du litige, la commune ayant pris la décision d'effectuer ces travaux qui ne lui incombaient pas sans aucune intervention de sa part ;
- la commune ne peut demander le remboursement de travaux qui n'ont servi à rien.
Par un mémoire, enregistré le 5 août 2019, Saint-Etienne Métropole, représentée par la SELARL DMMJB Avocats, conclut au rejet de la requête et ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SCI Mathalex en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête présentée devant le tribunal administratif de Lyon était irrecevable ; la requête était mal dirigée dès lors qu'à la date de l'enregistrement de la requête, le transfert de la compétence " assainissement " avait été décidé par un arrêté préfectoral avec effet au 1er janvier 2017 ; il appartient à la société d'établir l'existence d'une décision émanant de la métropole de Saint-Etienne et ce alors que la décision de refus de prise en charge a été opposée par la commune de Saint-Galmier ; le fondement juridique de la demande n'était pas précisé ; la requête d'appel est la reproduction littérale des moyens développés devant les premiers juges ;
- le permis de construire délivré ne prévoyait pas la réalisation de travaux de raccordement au réseau public d'assainissement ; l'intervention de l'entreprise Lacassagne ne trouve donc aucun fondement et la circonstance que les travaux entrepris ne se soient pas avérés efficaces n'est pas susceptible d'ouvrir droit à une quelconque indemnisation ;
- en tout état de cause, les travaux réalisés ne constituent pas une extension du réseau public d'assainissement mais le raccordement de la propriété de la société à ce réseau par un branchement public situé sous la voie publique ; en application des dispositions de l'article L. 1331-2 du code de la santé publique, la commune peut se charger de l'exécution de la partie des branchements situés sous la voie publique pour les immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public et elle peut se faire rembourser par les propriétaires intéressés ; par suite, il n'appartenait pas à la commune de prendre en charge le coût des travaux litigieux ; la société ne saurait se prévaloir d'un préjudice résultant de l'impossibilité de se raccorder au réseau public d'assainissement, cette impossibilité n'étant pas établie ;
- la société estime que les travaux publics auraient dû s'adapter à la configuration de son projet ; la réalisation d'un branchement public consiste à emmener le réseau jusqu'à la limite de la propriété privée et non à procéder à son branchement privé ;
- les indemnités sollicitées ne sont justifiées ni dans leur principe ni dans leur montant.
Par un mémoire, enregistré le 27 septembre 2019, la commune de Saint-Galmier, représentée par Me C..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que le montant de l'indemnité sollicitée soit ramené à de plus justes proportions et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la SCI Mathalex en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle ne peut être condamnée dès lors que la métropole de Saint-Etienne exerce la compétence " assainissement et eau " et qu'elle a intégré la métropole le 1er janvier 2017 ; le litige est né postérieurement au transfert de cette compétence ;
- les dépenses de raccordement des constructions nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique présentent le caractère de travaux privés dont le coût est nécessairement à la charge du propriétaire ; les travaux réalisés avaient pour objet le raccordement des constructions de l'appelante, nécessaire pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement du boitier de raccordement au réseau situé sur l'assiette de ces constructions ;
- la société n'établit pas que les nuisances subies excèdent les troubles normaux résultant de l'ouvrage public ; elle peut exiger du bénéficiaire de l'autorisation d'urbanisme la réalisation et le financement des travaux de raccordement permettant de raccorder son habitation au réseau d'assainissement collectif tel que cela ressort des dispositions de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ; ce n'est qu'en raison de l'insistance de la société et du contexte particulier qu'elle a accepté de prendre à sa charge la réalisation du raccordement des eaux pluviales et d'assainissement de la seconde construction vers le réseau public ; ce raccordement était conditionné par l'adaptation par la société de la sortie des canalisations de sa maison vers la nouvelle canalisation mise en place, adaptation que la société n'a jamais réalisée ;
- la société n'établit pas que l'ouvrage serait impropre à sa destination ;
- les nuisances invoquées sont en réalité dues au refus de la société de procéder à l'adaptation du niveau de sortie des tuyauteries en place afin que l'écoulement gravitaire puisse se faire ;
- la société a commis des fautes en ne respectant pas les termes du permis de construire ; une servitude d'évacuation des eaux usées était constituée au profit du fonds dominant, à savoir les locaux situés 26 avenue Jean Monnet ;
- le préjudice allégué n'est pas établi et chiffré.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le décret n° 2017-1316 du 1er septembre 2017 portant création de la métropole dénommée " Saint-Etienne Métropole " ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique ;
- et les observations de Me D..., substituant Me C..., représentant la commune de Saint-Galmier, et celles de Me B... E..., représentant Saint-Etienne Métropole.
Considérant ce qui suit :
1. Le 28 décembre 2009, la société civile immobilière Mathalex a acquis la propriété d'une maison d'habitation avec un jardin attenant située 26 avenue Jean Monnet à Saint-Galmier (département de la Loire). Le 29 août 2011, la commune de Saint-Galmier a délivré un permis de construire en vue d'une extension de l'immeuble existant. Par un courrier du 13 mars 2014, le maire de la commune de Saint-Galmier a indiqué au gérant de la société, que la commune de Saint-Galmier prenait à sa charge la réalisation et le raccordement des eaux pluviales et d'assainissement de l'extension du bâtiment au réseau public. Les travaux ont été confiés à l'entreprise Lacassagne. Se plaignant de l'impossibilité effective de procéder au raccordement à la suite des travaux, la société civile immobilière Mathalex a demandé, le 19 avril et le 16 octobre 2017, à la commune de Saint-Galmier qu'elle réalise de nouveaux travaux permettant le raccordement au réseau public ou qu'elle l'indemnise du montant de ces travaux. Par courrier du 29 mai 2017, la commune de Saint-Galmier a rejeté cette demande. La société Mathalex relève appel du jugement du 5 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Saint-Etienne Métropole, venant aux droits de la commune de Saint-Galmier, à lui verser la somme de 11 719,29 euros toutes taxes comprises correspondant au coût des travaux nécessaires pour mettre fin à l'absence de raccordement et la somme de 5 000 euros pour le préjudice moral et financier subi pendant les trois années de négociation sans issue avec la commune de Saint-Galmier.
Sur la détermination de la personne publique responsable :
2. Il appartient au juge, saisi d'un litige relevant du plein contentieux indemnitaire, de se prononcer d'après l'ensemble des circonstances de droit et de fait applicables à la date de sa décision.
3. Il résulte de l'instruction que, par un arrêté préfectoral du 29 juillet 2016, le périmètre de la communauté urbaine de Saint-Etienne Métropole a été étendu à la commune de Saint-Galmier avec prise d'effet au 1er janvier 2017. Par le décret n° 2017-1316 du 1er septembre 2017 portant création de la métropole dénommée " Saint-Etienne Métropole ", qui est entré en vigueur le 1er janvier 2018, la communauté urbaine de Saint-Etienne Métropole a été transformée en métropole en application des dispositions des articles L. 5217-1 et suivants du code général des collectivités territoriales.
4. Aux termes de l'article 4 de ce décret, " La métropole " Saint-Etienne Métropole " exerce les compétences prévues à l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales ". Aux termes de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales, " I. - La métropole exerce de plein droit, en lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : 5° En matière de gestion des services d'intérêt collectif : a) Assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l'article L. 2224-8, gestion des eaux pluviales urbaines au sens de l'article L. 2226-1 et eau ". Aux termes de l'article L. 5217-5 du code précité, " La métropole est substituée de plein droit, pour l'exercice des compétences transférées, aux communes membres et à l'établissement public de coopération intercommunale transformé en application de l'article L. 5217-4, dans l'ensemble des droits et obligations attachés aux biens mis à disposition en application du premier alinéa du présent article et transférés à la métropole en application du présent article ainsi que, pour l'exercice de ces compétences sur le territoire métropolitain, dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes. "
5. Il résulte de ces dispositions que le transfert de compétences à une métropole implique le transfert des biens, équipements et services nécessaires à l'exercice de ces compétences, ainsi que les droits et obligations qui leur sont attachés y compris lorsque ces obligations trouvent leur origine dans un événement antérieur au transfert. En application du I de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales, " Saint-Etienne Métropole ", à laquelle la commune de Saint-Galmier adhère, exerce en lieu et place des communes la compétence " assainissement des eaux usées " et " gestion des eaux pluviales urbaines ". Il s'ensuit que, depuis le transfert de compétences et de biens, seule la responsabilité de " Saint-Etienne Métropole " est susceptible d'être engagée à raison des ouvrages publics dont elle a la garde, quelle que soit la date du fait générateur invoqué. En conséquence, la commune de Saint-Galmier doit être mise hors de cause.
Sur la responsabilité de Saint-Etienne Métropole :
6. Aux termes de l'article L. 1331-2 du code de la santé publique : " Lors de la construction d'un nouveau réseau public de collecte ou de l'incorporation d'un réseau public de collecte pluvial à un réseau disposé pour recevoir les eaux usées d'origine domestique, la commune peut exécuter d'office les parties des branchements situées sous la voie publique, jusque et y compris le regard le plus proche des limites du domaine public. Pour les immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte, la commune peut se charger, à la demande des propriétaires, de l'exécution de la partie des branchements mentionnés à l'alinéa précédent. Ces parties de branchements sont incorporées au réseau public, propriété de la commune qui en assure désormais l'entretien et en contrôle la conformité. La commune est autorisée à se faire rembourser par les propriétaires intéressés tout ou partie des dépenses entraînées par ces travaux, diminuées des subventions éventuellement obtenues et majorées de 10 % pour frais généraux, suivant des modalités à fixer par délibération du conseil municipal. (...) ". Aux termes de l'article L. 1331-4 du même code : " Les ouvrages nécessaires pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement sont à la charge exclusive des propriétaires et doivent être réalisés dans les conditions fixées à l'article L. 1331-1. Ils doivent être maintenus en bon état de fonctionnement par les propriétaires. La commune en contrôle la qualité d'exécution et peut également contrôler leur maintien en bon état de fonctionnement. ".
7. Même en l'absence de faute, le maître d'ouvrage ainsi que, le cas échéant, le maître d'ouvrage délégué, et les constructeurs chargés des travaux sont responsables solidairement à l'égard des tiers des dommages causés à ceux-ci par l'exécution d'un travail public. Ces personnes ne peuvent dégager leur responsabilité que si elles établissent que ces dommages sont imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime, sans que puisse être utilement invoqué le fait d'un tiers. Il appartient au tiers, victime d'un dommage de travaux publics, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre, d'une part, les travaux publics et, d'autre part, le préjudice dont il se plaint. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel.
8. Il résulte de l'instruction que, par un avis du 22 mars 2011, les services techniques de la commune de Saint-Galmier sollicités dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire présentée par la société Mathalex ont précisé que " le bâtiment à créer sera raccordé sur les évacuations du bâtiment existant " et qu'à la suite de la demande du gérant de la société, la commune a accepté de procéder aux travaux de raccordement au réseau public jusqu'en limite de l'extension de l'immeuble existant.
9. Il résulte de l'instruction et notamment d'un procès-verbal d'huissier de justice du 20 juin 2017 qu'au niveau du sous-sol de l'immeuble situé 26 avenue Jean Monnet, deux sorties de tuyaux en PVC de diamètre 125 mm situés côte à côte au-dessous de la dalle plafond ont été réalisées par la société Lacassagne sur instruction des services techniques de la commune de Saint-Galmier et que, sous ces deux sorties de tuyaux en PVC à une distance de 25 cm environ, deux autres tuyaux en PVC de diamètre 125 mm. ont été installés par la société Mathalex pour permettre l'évacuation des eaux pluviales et usées. Compte tenu de ce décalage de 25 cm entre les tuyaux d'évacuation et ceux de récupération des eaux, le raccordement gravitaire de l'extension n'a pas été possible. Par un courrier du 13 mars 2017, le maire de la commune de Saint-Galmier a proposé soit l'installation, aux frais de la société, d'une pompe de relevage, soit le branchement de l'extension sur la canalisation existante récupérant déjà les eaux usées des deux bureaux occupés avenue Jean Monnet, soit la création d'une canalisation indépendante raccordée au réseau public situé allée de la Charpinière.
10. Si la société constate l'impossibilité de procéder au raccordement gravitaire du fait du décalage de 25 cm entre les branchements privés réalisés par le gérant de la société et les branchements publics d'évacuation des eaux réalisés pour le compte de la commune, elle n'établit pas que le défaut de raccordement résulterait des travaux publics litigieux dès lors qu'il lui appartenait de procéder à ses frais à l'adaptation de ses branchements particuliers aux branchements publics réalisés par la commune à la demande de la société.
11. Pour les mêmes motifs que précédemment évoqués, la société n'établit pas l'existence d'un défaut de conception des branchements publics.
12. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par Saint--tienne Métropole, que la société civile immobilière Mathalex n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
13. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SCI Mathalex est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par Saint-Etienne Métropole et la commune de Saint-Galmier sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Mathalex, à Saint-Etienne Métropole et la commune de Saint-Galmier.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2021, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.
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N° 19LY01008