Par décision n°368520 du 6 mars 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a partiellement annulé cet arrêt en tant qu'il se prononce sur la responsabilité du centre hospitalier de Roanne au titre du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la cour, au greffe duquel elle a été enregistrée sous le n° 15LY00925 et a rejeté le pourvoi incident de MmeB....
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 31 mai 2012, présentée pour Mme C...B...néeA..., elle demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0907255 du 27 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Roanne à lui verser une indemnité de 100 000 euros en réparation du dommage qu'elle a subi à la suite de l'intervention dont elle a fait l'objet le 26 juin 2008 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Roanne à lui verser une somme totale de 27 000 euros en réparation des conséquences dommageables de cette intervention, avec les intérêts de droit et la capitalisation des intérêts et, subsidiairement, d'ordonner une expertise et lui allouer une provision de 10 000 euros ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Roanne le paiement à son conseil d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi que, pour ce qui la concerne, une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et les entiers dépens de l'instance ;
Elle soutient que :
- elle a subi une césarienne d'urgence au centre hospitalier de Roanne, qui a entraîné une hémorragie massive, favorisée par une adhérence totale du colon à la paroi abdominale, elle-même amincie par une éventration préexistante ;
- elle avait subi deux interventions médicales en 1987 et 2004 favorisant le risque qui s'est réalisé ;
- le chirurgien aurait dû être vigilant et ses antécédents médicaux auraient dû alerter l'équipe médicale ;
- son dossier médical signalait ces antécédents qui ne pouvaient être méconnus ;
- l'organe lésé n'était pas concerné par l'intervention ;
- la plaie du colon a été la cause principale de la péritonite pour laquelle elle a par la suite été opérée ;
- elle a subi une hospitalisation plus longue et des préjudices extra patrimoniaux dont, notamment, une incapacité permanente partielle de 3 %, un préjudice esthétique et des douleurs physiques ;
Par courriers en date du 11 décembre 2012 par lesquels, en application des articles R. 612-3 et R. 612-6 du code de justice administrative, la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire et le centre hospitalier de Roanne ont été mis en demeure de présenter leurs observations dans un délai d'un mois ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2013, présenté pour le centre hospitalier de Roanne, ce dernier a conclu au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- aucune faute ne peut être imputée au centre hospitalier de Roanne ;
- l'opération a été réalisée en urgence et il n'était pas possible de connaître le risque accru de plaie digestive qui s'est réalisé ;
- son incapacité permanente partielle de 3 % est limitée ;
- la responsabilité du centre hospitalier ne saurait être engagée ;
- les indemnités demandées sont injustifiées ou excessives ;
Par décision du 20 août 2012, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à MmeB... ;
Par un mémoire enregistré le 20 avril 2015 pour MmeB..., elle conclut à ce que le centre hospitalier de Roanne soit déclaré responsable du préjudice subi au titre d'une infection nosocomiale, à ce qu'avant dire droit soit ordonnée une expertise médicale avec pour mission de déterminer l'ensemble de son préjudice corporel et psychologique et à ce que le centre hospitalier de Roanne soit condamné à titre provisionnel à lui verser une indemnité de 10 000 euros à valoir sur la réparation de son dommage. Elle conclut à titre subsidiaire à la condamnation dudit centre hospitalier à lui verser une somme de 27 000 euros en réparation des préjudices subis, à ce que cette somme porte intérêt à compter de la date de saisine du tribunal administratif et à ce que soit réalisée la capitalisation des intérêts. Elle conclut également à la condamnation dudit centre hospitalier au paiement des dépens, au versement d'une somme de 3 000 euros à son conseil au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et au versement d'une somme de 1 000 euros à son profit au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la responsabilité du centre hospitalier de Roanne est engagée sur le fondement de l'article L. 1142-1 §II du code de la santé publique dès lors qu'elle a contractée une péritonite dans le cadre d'une infection nosocomiale liée à une plaie colique intervenue lors d'une laparotomie pratiquée lors d'une césarienne d'urgence ;
- le rapport d'expertise indique que la période d'hospitalisation liée à la survenue de la plaie colique s'étend du 26 juin 2008 au 24 juillet 2008 et du 19 novembre 2008 au 27 novembre 2008 et qu'en l'absence de plaie colique, son hospitalisation aurait été d'environ une semaine ;
- la laparotomie pour césarienne a conduit à inciser le colon, ce qui a entrainé une infection du péritoine par déversement de matière fécale ;
- ses souffrances physiques et morales sont liées à la colostomie nécessaire au traitement de la plaie du colon de 8 cm, elle s'est retrouvée stérile à 31 ans du fait de l'embolisation des artères utérines, elle n'a pas pu partager les premiers mois de la vie de ses enfants ;
- une nouvelle expertise médicale avant dire droit est nécessaire pour réévaluer ses préjudices psychiques ;
- si l'expertise médicale actuelle devait être considérée comme suffisante, ses préjudices doivent être évaluées de la manière suivante : incapacité temporaire totale du 2 juillet 2008 au 24 juillet 2008 et du 19 novembre 2008 au 27 novembre 2008, incapacité temporaire partielle de 50% du 25 juillet 2008 au 18 novembre 2008 et du 28 novembre 2008 au 15 décembre 2008 soit une somme de 4 000 euros ; incapacité permanente partielle de 3% : 3 000 euros ; souffrances endurées évaluées à 4/7 soit 8 000 euros ; préjudice esthétique évalué à 1,5/7 soit 2 000 euros ; préjudice moral : 10 000 euros ;
-- bien qu'elle ait un passé chirurgical laparotomique lourd et présentait des conditions de risques de grossesse gémellaire, les conséquences qu'elle a subies sont anormales ;
Par un mémoire enregistré le 21 mai 2015 pour la caisse primaire d'assurance maladie de le Loire, elle indique ne pas vouloir intervenir dans l'instance et signale que l'accident est " en dehors de la commission régionale de conciliation et d'indemnisation " et qu'elle a pris en charge Mme B...au titre du risque maladie ;
Par un mémoire enregistré le 22 mai 2015 pour le centre hospitalier de Roanne, il conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- sa demande d'une nouvelle expertise n'est pas justifiée, Mme B...n'apportant aucun élément tendant à établir que son préjudice s'est aggravé depuis le précédent arrêt de la Cour ;
- sa responsabilité ne saurait pas être engagée sur le fondement du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique car Mme B...n'a pas été victime d'une infection nosocomiale dès lors que la péritonite dont elle a souffert n'est pas liée à une perforation fautive, le rapport du Dr D...mentionne que la péritonite post-opératoire dont elle a souffert n'est pas une infection nosocomiale, cette péritonite étant secondaire à un accident thérapeutique, la plaie colique, car cette infection est de nature endogène et que plusieurs scientifiques estiment qu'il faut tenir compte du caractère évitable ou non de l'infection, car l'infection survenue qui relève d'un aléa thérapeutique ne peut pas être assimilée à une infection survenue au cours ou décours d'une prise en charge ;
- dans l'hypothèse où il y aurait reconnaissance d'une infection nosocomiale, la responsabilité de l'établissement hospitalier doit être écartée car cette infection résulte d'une cause étrangère ; la notion purement civiliste de cause étrangère qui retient les critères d'extériorité , d'imprévisibilité et d'irrésistibilité ne saurait trouver à s'appliquer cumulativement en matière d'infection nosocomiale et que quand une infection nosocomiale présente un caractère d'irrésistibilité, la cause étrangère doit être regardée comme rapportée ; qu'en l'espèce, aucune faute n'a été commise, l'équipe médicale ignorait l'existence d'adhérences intestinales, l'intervention s'est déroulée dans un contexte d'extrême urgence, la plaie colique a été à l'origine d'une dissémination de germes dans l'organisme ; cette dissémination était imprévisible et irrésistible et ne correspond pas à un manquement aux règles d'asepsie ;
- il faut qu'il y ait un lien de causalité direct et exclusive entre le dommage allégué et l'infection nosocomiale ; aucune pièce au dossier n'établit que les dommages allégués sont la conséquences d'une infection nosocomiale ; les experts n'ont pas mentionné un tel lien et n'ont pas indiqué de dommages spécifiques liés à cette infection ; les complications dont a souffert Mme B...sont en lien avec la plaie intestinale réalisée lors de la réalisation de la césarienne ; Mme B...a demandé seulement l'indemnisation des préjudices liés à cette plaie ;
Par ordonnance du 9 juillet 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 septembre 2015 ;
Par décision du 26 août 2015, Mme B...a été admise à l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 2016 :
- le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme C...B..., née en 1977, a fait l'objet en 1985, en Yougoslavie, d'une laparotomie médiane sus et sous ombilicale à raison d'une blessure par arme à feu ; qu'en 2001 elle a donné naissance à une fille, en Yougoslavie ; que dans le cadre d'une démarche de procréation médicalement assistée, Mme B...a débuté en France une grossesse, le 5 décembre 2007 ; que le 26 juin 2008, elle a été admise au centre hospitalier de Roanne en raison d'une hémorragie ; qu'une césarienne a été pratiquée en urgence le même jour et a permis la naissance de jumeaux ; qu'au cours de l'intervention, une plaie du colon transverse a été occasionnée par le geste du médecin accoucheur, et a été prise en charge immédiatement avec notamment la mise en place d'une colostomie ; qu'une reprise chirurgicale a été pratiquée le 3 juillet 2008, devant un tableau d'état septique faisant suspecter une péritonite, et que des germes divers ont alors été mis en évidence, nécessitant une antibiothérapie ; que Mme B...a formé un recours indemnitaire contre le centre hospitalier de Roanne, qui a été rejeté par un jugement du 27 mars 2012 du tribunal administratif de Lyon ; que, par un arrêt du 14 mars 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé l'appréciation du tribunal quant à une absence de faute des médecins hospitaliers, mais a estimé que le dommage était imputable à une infection nosocomiale engageant la responsabilité de l'hôpital ; que la cour a, en conséquence, annulé la décision des premiers juges et condamné l'établissement hospitalier à verser à Mme B...une indemnité de 6 500 euros ; qu'elle a en outre mis à la charge du centre hospitalier les frais de l'expertise ainsi qu'une somme de 1 000 euros à verser au conseil de Mme B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que le Conseil d'Etat, par décision du 6 mars 2015, a confirmé l'arrêt de la cour quant à l'absence de faute commise lors de la prise en charge de MmeB..., mais a partiellement annulé cet arrêt en tant qu'il se prononçait sur la responsabilité du centre hospitalier de Roanne au titre du second alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, a renvoyé dans cette mesure l'affaire à la cour et a rejeté le pourvoi incident de Mme B... ; que Mme B...après renvoi de l'affaire à la cour a indiqué demander à être indemnisée par le centre hospitalier de Roanne à raison d'une infection nosocomiale contractée à l'occasion de la césarienne pratiquée en urgence le 26 juin 2008 ;
Sur l'infection nosocomiale :
2. Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère " ; que si ces dispositions font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère ne soit rapportée, seule une infection survenant au cours ou au décours d'une prise en charge et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge peut être qualifiée de nosocomiale ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise établi par les Drs Rudigoz et Gouillat du 21 septembre 2010 et de l'avis spécialisé du Dr D...du 6 septembre 2013, que lors de la césarienne pratiquée en urgence le 26 juin 2008 une plaie du colon transverse a été occasionnée par le geste du médecin accoucheur ; que cette plaie colique a entrainé le déversement dans la région du péritoine de matières fécales contaminées par différents germes de type escherichia coli et bactéroides ; qu'il en est résulté une péritonite ; que si le centre hospitalier soutient que la perforation du colon n'était pas fautive et relève d'un aléa thérapeutique, cette circonstance n'est pas de nature à faire regarder l'infection comme ne présentant pas un caractère nosocomial dès lors qu'il ressort de l'instruction que c'est à l'occasion de l'intervention chirurgicale pratiquée, lors de l'incision non fautive du colon, que les germes présents dans l'intestin ont contaminé le péritoine ; que par suite une telle infection, qui est effectivement survenue au cours de cette opération, et qui n'était ni présente ni en incubation au début de la prise en charge, doit être qualifiée de nosocomiale ;
4. Considérant, que si l'infection en cause a pour origine la flore microbienne endogène contenue dans l'intestin de MmeB..., cette circonstance ne saurait constituer une cause d'imprévisibilité ou d'irrésistibilité ; que si le centre hospitalier soutient également qu'aucune faute n'a été commise, que l'équipe médicale ignorait l'existence d'adhérences intestinales qui ont conduit à léser le colon, que l'intervention s'est déroulée dans un contexte d'extrême urgence, que la plaie colique a été à l'origine d'une dissémination de germes imprévisible et irrésistible dans l'organisme et qu'aucun manquement aux règles d'asepsie n'a été relevé, il n'établit pas ainsi que l'infection dont s'agit relève d'une cause étrangère répondant simultanément aux trois critères d'extériorité, d'imprévisibilité et d'irrésistibilité ; que dès lors la responsabilité du centre hospitalier de Roanne se trouve engagée à l'égard de Mme B...à raison des préjudices résultant directement de l'infection nosocomiale dont elle a souffert ;
En ce qui concerne les conclusions à fins de nouvelle expertise :
5. Considérant que MmeB..., à l'appui d'une demande d'une nouvelle expertise sur ses préjudices psychologiques, se borne à indiquer qu'elle se trouve stérile à la suite des actes chirurgicaux réalisés lors de la césarienne en urgence du 26 juin 2008 et que les experts n'ont pas pu tenir compte en 2010 des conséquences psychiques à long terme d'un tel préjudice ; que toutefois, Mme B...produit un certificat médical daté du 24 avril 2015 mentionnant non pas qu'elle est stérile mais qu'une nouvelle grossesse l'exposerait à de hauts risques et qu'elle lui est fortement déconseillée ; qu'en outre, aucun lien direct ne peut être établi entre l'infection nosocomiale dont s'agit et une difficulté à enfanter ; que, dans ces conditions, la mesure demandée n'apparaît pas utile à la solution du litige ; que par suite les conclusions à fins de nouvelle expertise doivent être rejetées ;
Sur les préjudices :
6. Considérant que si les experts ont retenu d'une manière globale, à raison des conséquences de la plaie colique et notamment de la mise en place d'un anus artificiel provisoire, une période d'incapacité temporaire totale de travail s'étendant du 26 juin 2008 au 24 juillet 2008 et du 19 novembre 2008 au 27 novembre 2008 et qu'ils ont indiqué qu'en l'absence de plaie colique, l'hospitalisation aurait été d'environ une semaine, seuls les préjudices résultant directement de l'infection nosocomiale sont, parmi ceux subis par MmeB..., susceptibles d'être indemnisés ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme B...a été opérée en urgence le 26 juin 2008, que l'apparition d'un état septique n'a été suspecté qu'à compter du 28 juin 2008, que l'opération du 3 juillet 2008 a permis de constater l'existence d'une péritonite provoquée par des germes infectieux, que les experts mentionnent que Mme B...a été mise sous traitement médicamenteux pour cette infection et que le choc septique avait totalement régressé à l'issue de son séjour en réanimation le 10 juillet 2008 ; que par suite, l'infection nosocomiale doit être regardée comme n'ayant conduit directement à son hospitalisation que du 28 juin au 10 juillet 2008 ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice lié à cette incapacité temporaire totale de travail pendant 12 jours en l'évaluant à la somme de 200 euros ;
8. Considérant que si les experts ont retenu deux périodes d'incapacité temporaire partielle de travail à hauteur de 50% du 25 juillet 2008 au 18 novembre 2008 et du 28 novembre 2008 au 15 décembre 2008 à raison des complications liées à la plaie colique, dont la pose et le retrait d'un anus artificiel et la cicatrisation des plaies, il ne résulte pas de l'instruction qu'un lien direct puisse être établi entre ces deux périodes d'incapacité et l'infection nosocomiale dont Mme B... a souffert ; que ce chef de préjudice doit par suite être écarté ;
9. Considérant que si les experts ont évalué à 3% l'incapacité permanente de Mme B... après consolidation, du fait de l'aggravation de l'éventration dont elle était porteuse avant la césarienne pratiquée en urgence le 26 juin 2008, il ne résulte pas de l'instruction qu'un quelconque lien puisse être établi entre cette aggravation et l'infection nosocomiale ; que ce chef de préjudice doit par suite être écarté ;
10. Considérant que si les experts ont, le 2 juillet 2010, évalué à 1,5 sur 7 le préjudice esthétique de Mme B...à raison " de l'aggravation de l'aspect esthétique de la cicatrice ", il résulte de l'instruction que l'intéressée avait fait l'objet d'une laparotomie, antérieurement à cette césarienne pratiquée en urgence, et que les experts ont, lors de l'examen du 2 juillet 2010, constaté la présence de plusieurs cicatrices, dont une suite à laparotomie sus et sous-ombilicale, d'une longueur de 22 centimètres et d'aspect esthétique moyen, d'une cicatrice horizontale du flanc droit de 7 centimètres, esthétiquement médiocre, d'une cicatrice dans l'hypocondre gauche esthétiquement parfaite de 8 centimètres et d'une cicatrice de drainage de 2 centimètres dans la fosse iliaque gauche ; que si une reprise chirurgicale a été effectuée le 3 juillet 2008 dans le cadre du traitement de la péritonite et qu'un drainage a également été réalisé, il ne résulte pas de l'instruction que ce drainage en lien avec l'infection nosocomiale a entrainé une aggravation de l'aspect esthétique de la cicatrice de 22 centimètres, alors que, notamment, une autre intervention de reprise chirurgicale est intervenue le 20 novembre 2008 pour la fermeture de la colostomie et la réfection de la paroi abdominale ; que ce chef de préjudice doit par suite être écarté ;
11. Considérant que si les experts évaluent les souffrances endurées liées aux " complications " survenues par la césarienne à 4/7, il résulte de ce qui a été dit précédemment que seuls les préjudices qui résultent directement de l'infection nosocomiale peuvent être indemnisés ; qu'il résulte de l'instruction que les souffrances de Mme B...ont essentiellement pour origine l'hémorragie ayant imposé une césarienne une urgence, la nécessité de rouvrir l'utérus après l'extraction des enfants et de procéder à un capitonnage utérin, les actions liées à la pose puis à la suppression d'un anus artificiel provisoire en raison de la plaie colique et les cicatrisations afférentes à ces différents gestes chirurgicaux, et que de tels éléments n'ont pas de lien avec l'infection nosocomiale dont s'agit ; que, compte tenu de la prise en charge très rapide de la péritonite résultant de l'infection nosocomiale, il sera fait une juste appréciation des souffrances physiques en lien avec l'infection nosocomiale en les évaluant à la somme de 1 000 euros ;
12. Considérant que Mme B...se borne à indiquer qu'elle a subi un préjudice moral en ayant été privée de la présence de sa première fille et de ses deux jumeaux lors de son hospitalisation à compter de sa césarienne ; qu'il est constant que les deux jumeaux ont été placés en service de néonatologie après cette césarienne en urgence et n'auraient pas pu faire l'objet d'une prise en charge par leur mère ; que dans les circonstances de l'espèce, et compte tenu de son maintien en réanimation du 3 juillet au 10 juillet 2008, en lien avec cette infection nosocomiale, il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme B...en l'évaluant à 500 euros ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à son indemnisation à raison de l'infection nosocomiale contractée au centre hospitalier de Roanne ; qu'il y a lieu de condamner le centre hospitalier de Roanne à lui verser la somme de 1 700 euros ; que l'indemnité de 1 700 euros allouée à Mme B...portera intérêts à compter du 30 novembre 2009, date de sa demande au tribunal administratif de Lyon ; que les intérêts échus le 30 novembre 2010 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle ultérieure ;
14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Roanne les frais de l'expertise prescrite par le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, liquidés et taxés à la somme de 1 800 euros ;
15. Considérant que Mme B...ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve pour l'avocat de Mme B...de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge du centre hospitalier le versement à celui-ci d'une somme de 1 000 euros ; qu'en revanche Mme B...ne justifiant pas d'autres frais que ceux couverts par l'aide juridictionnelle dont elle a bénéficié, les conclusions qu'elle a également présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DECIDE :
Article 1 : Le centre hospitalier de Roanne est condamné à payer à Mme B... à raison de l'infection nosocomiale contractée la somme de 1 700 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2009. Les intérêts échus le 30 novembre 2010 ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Les frais et honoraires de l'expert, taxés et liquidés à la somme de 1 800 euros, sont mis à la charge du centre hospitalier de Roanne.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 mars 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le centre hospitalier de Roanne versera au conseil de Mme B..., sous réserve pour lui de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme B...est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...néeA..., au centre hospitalier de Roanne et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président,
M. Seillet, président-assesseur,
Mme Cottier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
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