Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 26 octobre 2020, la préfète de l'Ain, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a annulé l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'une année opposée à M. B... par arrêté du 16 octobre 2020 et a mis à la charge de l'État la somme de 700 euros au titre des frais liés au litige ;
2°) de rejeter la demande de M. B... devant le tribunal administratif.
Elle soutient que :
- le premier juge a méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- dès lors que le magistrat désigné avait confirmé la mesure d'éloignement qui constitue la mesure principale du litige, il ne pouvait légalement envisager la condamnation de l'État aux frais exposés.
La requête a été communiquée à M. B... qui n'a produit aucune observation.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Le rapport de Mme Burnichon, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 16 octobre 2020 le préfet de l'Ain a prononcé une obligation de quitter le territoire français sans délai, avec une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et fixé le pays de destination à l'encontre de M. B..., ressortissant de nationalité albanaise né le 25 septembre 1986, lequel a le même jour été placé en rétention administrative. Par jugement lu le 20 octobre 2020 le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du préfet de l'Ain du 16 octobre 2020 prononçant à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an (article 2) et a mis à la charge de l'État le versement à l'avocat de M. B... C... la somme de 700 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 (article 3). La préfète de l'Ain relève appel de ce jugement en ce qu'il a annulé l'interdiction de retour sur le territoire français précitée et a mis à la charge de l'État la somme de 700 euros au titre des frais liés au litige.
2. Aux termes des dispositions alors codifiées au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...)/ La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
3. M. B..., est entré irrégulièrement sur le territoire français deux jours seulement avant son interpellation, alors que l'ensemble de sa famille proche est resté dans son pays d'origine, sans avoir présenté de demande de titre de séjour. Il ne fait état d'aucune circonstance humanitaire s'opposant à ce que soit prononcée à son encontre une mesure d'interdiction de retour sur le territoire français et en fixer la durée à un an. En l'absence d'autres éléments, et compte tenu des dispositions précitées du III de l'article L. 511-1, le préfet de l'Ain pouvait, sans entacher son arrêté de disproportion, lui interdire le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an suite à l'exécution de la mesure d'éloignement qui lui a été opposée. Par ailleurs, si le préfet de l'Ain a évoqué au sein de l'arrêté en litige le motif tiré de ce que la présence de M. B... sur le territoire français constituerait une menace pour l'ordre public, un tel motif ne concerne que l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de l'intéressé et, à supposer même que ce motif fonde, de manière surabondante, l'interdiction de retour en litige, le préfet de l'Ain aurait pris la même décision s'il n'avait pas tenu compte de la menace à l'ordre public en fondant l'interdiction de retour uniquement sur l'absence de délai de départ volontaire opposée à l'intéressé. Dès lors, c'est à tort que, pour annuler cette décision, le premier juge s'est fondé sur le motif tiré de la disproportion dont serait entachée l'interdiction de retour.
4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B....
5. En premier lieu, l'interdiction de retour sur le territoire français opposée à M. B..., vise notamment le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise que M. B... ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français, de garanties de représentation suffisantes et indique l'absence d'atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'intéressé dans la mesure où son épouse et toute sa famille proche sont restées dans son pays d'origine. Compte tenu de ces éléments, l'interdiction de retour sur le territoire français comporte les motifs de droit et de fait qui la fondent.
6. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Ain se soit abstenu d'examiner la situation personnelle de M. B....
7. Il résulte de ce qui précède que la préfète de l'Ain est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 16 octobre 2020 en tant qu'il porte interdiction de retour sur le territoire français à M. B... pendant un an. Il suit de là que l'article 2 du jugement n° 2007368 lu le 20 octobre 2020 doit être annulé et la demande d'annulation dirigée contre cette décision doit être rejetée. Par voie de conséquence, l'État n'étant pas la partie perdante, la préfète de l'Ain est également fondée à demander l'annulation de l'article 3 du jugement lu le 20 octobre 2020 en ce qu'il met à la charge de l'État le versement d'une somme de 700 euros au titre des frais du litige.
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 2007368 lu le 20 octobre 2020 du magistrat désigné par la président du tribunal administratif de Lyon sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lyon sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 23 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Seillet, président ;
Mme Djebiri, première conseillère ;
Mme Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.
N° 20LY03101 3