Par une requête et un mémoire enregistrés le 9 novembre 2020 et le 22 mars 2021 (non communiqué) sous le n° 20LY03228, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et les arrêtés susmentionnés ;
2°) d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation après remise d'une autorisation provisoire de séjour et de travail, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de condamner l'État au versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- son comportement ne caractérise aucune menace pour l'ordre public, dès lors qu'il n'a pas été condamné, et que l'interpellation puis la mise en examen dont il a fait l'objet ont été seulement suivies d'un contrôle judiciaire, et non d'un placement en détention provisoire, cette mesure porte atteinte au principe de présomption d'innocence ; les dispositions de l'article L. 511-1-I 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;
- il entre dans la catégorie des ressortissants étrangers pouvant prétendre de plein droit à un titre de séjour en application de l'article L. 313-11 2°bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, étant arrivé en France avant l'âge de quinze ans et ayant été pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance, et le préfet ne pouvait prendre l'arrêté litigieux avant d'examiner sa situation ;
- il n'a pas été entendu préalablement à l'édiction de l'arrêté litigieux ;
- l'arrêté litigieux est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation, eu égard à son âge, à sa scolarisation et à sa prise en charge, désormais en qualité de jeune majeur ;
- le préfet ne pouvait pas l'éloigner avant l'expiration du délai de deux mois à compter de sa majorité.
Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 23 décembre 2020, confirmée par une ordonnance du président de la cour du 12 février 2021, l'aide juridictionnelle a été refusée à M. B....
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... ressortissant ivoirien né en 2002, relève appel du jugement qui a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 15 octobre 2020 par lesquels le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant un an, et l'a assigné à résidence.
2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, (...), lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants :1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) ". Et, selon les dispositions de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ". Or, l'obligation de quitter le territoire en litige repose sur l'entrée irrégulière de l'intéressé sur le territoire, motif pouvant valablement fonder une mesure d'éloignement en vertu du 1° du I de l'article L. 511-1 précité. Dès lors, la circonstance que M. B... ne représenterait pas une menace pour l'ordre public est sans incidence sur la légalité de ladite mesure.
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 2° bis A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire (...), qui a été confié, depuis qu'il a atteint au plus l'âge de seize ans, au service de l'aide sociale à l'enfance et sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ". Il ne ressort pas des pièces du dossier, que M. B... ait sollicité un titre de séjour sur ce fondement ni qu'il ait été empêché de déposer une telle demande. S'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance, il n'établit pas qu'il serait dépourvu de tout lien familial dans son pays d'origine, il est de plus constant qu'il ne possède pas d'attaches familiales en France et n'établit pas non plus y avoir tissé des liens. Par ailleurs, il ne justifie pas du caractère réel et sérieux de la formation suivie depuis son arrivée en France alors qu'il n'a débuté une formation en 1ère année de CAP production et service en restauration que le 7 octobre 2020. Par suite, M. B... n'établit pas être, à la date à laquelle la décision en litige a été prise, en situation de prétendre de plein droit, par application des dispositions précitées, à la délivrance d'une carte de séjour temporaire. Pour les mêmes motifs l'arrêté litigieux n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation, eu égard à son âge, à sa scolarisation et à sa prise en charge, désormais en qualité de jeune majeur.
4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des motifs de l'arrêté litigieux, que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. B....
5. Il était loisible à M. B... de faire valoir, au cours de son audition par les services de police, tous éléments pertinents tenant à sa situation personnelle susceptibles de faire obstacle à une mesure d'éloignement. Il suit de là que le moyen tiré de la violation du droit d'être entendu résultant du principe général du droit de l'Union européenne de bonne administration ne peut dès lors qu'être écarté.
6. Selon l'article L. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous réserve des engagements internationaux de la France, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire d'un document de séjour. Et aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : 1° L'étranger mineur de dix-huit ans (...) ". S'il résulte de la combinaison de ces dispositions avec celles des articles R. 311-1 et R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'un étranger résidant habituellement en France avant sa majorité doit, pour se conformer à l'obligation de possession d'un titre de séjour qui pèse sur lui à compter du jour où il devient majeur, solliciter un tel titre dans les deux mois qui suivent son dix-huitième anniversaire et qu'il ne peut, dès lors, faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 2° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que s'il s'est abstenu de solliciter un titre pendant cette période, ces dispositions ne font pas obstacle, en revanche, à ce qu'un étranger entré irrégulièrement sur le territoire français lorsqu'il était mineur et qui s'y trouve à la date de son dix-huitième anniversaire sans bénéficier de titre de séjour fasse l'objet, dès cette date, d'une telle obligation sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1.
7. Or, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de la lecture de la décision en litige, que l'obligation de quitter le territoire français repose sur l'entrée irrégulière de M. B... sur le territoire français et l'absence de détention de titre de séjour en cours de validité, cas envisagé. Il n'est pas fondé à se prévaloir du délai de deux mois à compter de sa majorité pour demander un titre de séjour en application des dispositions de l'article R. 311-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'est pas rentré régulièrement sur le territoire français.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation des décisions du 15 octobre 2020 prises à son encontre par le préfet de l'Isère. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles qu'il présente sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 25 mars 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2021.
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N° 20LY03228
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