Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 22 juillet 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et les décisions susmentionnées ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 800 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué méconnaît le 11°des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par mémoire enregistré le 15 janvier 2021, le préfet de la Haute-Savoie conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Djebiri, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant nigérian né en 1994, serait entré irrégulièrement en France en avril 2018. Le 24 janvier 2019, la France est devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile rejeté, en dernier lieu, le 14 février 2020 par la Cour nationale du droit d'asile. Le 24 juin 2019, il a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 28 février 2020, le préfet de la Haute-Savoie a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur la légalité de l'arrêté litigieux :
2. L'arrêté vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment le 11° de l'article L. 313-11 de ce code. Il précise que, consulté sur l'état de santé de M. B... à la suite de la demande d'admission au séjour présentée par ce dernier, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a émis un avis le 22 octobre 2019. Il indique enfin que M. B... ne remplit pas les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La seule circonstance que l'arrêté mentionne que M. B... ne pouvait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine est l'expression formelle d'un motif. Par suite, la décision attaquée, qui comporte l'énoncé des circonstances de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée.
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 22 octobre 2019, que le préfet s'est approprié, le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B..., qui souffre de troubles psychiatriques, nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il existait un traitement approprié au Nigéria et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers cette destination. En réponse au courrier de M. B... qui demandait les éléments ayant permis au collège de médecins de se prononcer sur l'offre de soins existante au Nigéria, l'OFII a, par un courrier du 15 juillet 2020, orienté le requérant vers son site internet sur lequel figure notamment la liste des ressources documentaires internationales publiques. M. B... soutient en se prévalant notamment de l'atlas de la santé mentale au Nigéria figurant dans un document de l'OMS, accessible sur le site de l'OFII, qu'il n'y a pas de prise en charge et de traitement de personnes souffrant de troubles mentaux majeurs inclus dans l'assurance maladie ou les régimes de remboursement au Nigéria. Toutefois, les dispositions précitées n'exigent pas que pour être effectivement accessible au pays d'origine, le traitement approprié soit gratuit ou quasi-gratuit. Il ne peut en aller autrement que si le reste à charge, évalué en fonction du coût de ce traitement au pays est hors de proportion avec les ressources de l'intéressé. M. B... ne précise pas ses ressources et le coût de son traitement. Par ailleurs, la seule référence à ce document de l'OMS ne permet pas d'établir que M. B... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement adapté à sa pathologie, alors au surplus que le préfet produit en défense des fiches élaborées par le Medical Country of Origin Information MedCOI (relative à l'offre de soins au Nigéria) dont il ressort qu'un suivi médical et des traitements médicamenteux correspondant à sa pathologie sont disponibles au Nigéria. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en lui refusant le séjour et en l'éloignant du territoire, le préfet de la Haute-Savoie aurait méconnu le 11° de l'article L. 313-11 et le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. M. B... n'apporte au soutien de ses allégations aucun élément tendant à établir qu'il serait personnellement exposé à des risques actuels de mauvais traitements en cas de retour au Nigeria. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 28 février 2020 pris à son encontre par le préfet de la Haute-Savoie. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'il présente sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de la Haute-Savoie.
Délibéré après l'audience du 8 avril 2021 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président de chambre ;
Mme Djebiri, premier conseiller ;
Mme Burnichon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 avril 2021.
N° 20LY01933 2
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