Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 31 mai 2021, M. A..., représenté par Me Traversini, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 11 mai 2021 ;
2°) d'annuler la décision implicite de refus de séjour du préfet des Alpes-Maritimes et son arrêté du 16 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour mention " salarié ", ou à titre subsidiaire, un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, au profit de son conseil qui renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- l'arrêté portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entaché d'un vice de procédure dès lors que le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas saisi préalablement la commission du titre de séjour ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers;
- il méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors qu'il porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses deux enfants ;
- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est elle-même illégale.
La demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée par une décision du 25 juin 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Chazan, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité philippine, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande dirigée contre la décision par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a implicitement rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour adressée par courrier du 20 août 2019, et contre l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 septembre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de sa destination.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la décision implicite de rejet :
2. Ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Nice, le préfet des Alpes-Maritimes ayant expressément rejeté sa demande de titre de séjour par sa décision du 16 septembre 2020 qui s'est substituée à la décision implicite opposée à la même demande, les moyens de la requête, en tant qu'ils sont dirigés contre la décision implicite opposée dans un premier temps à cette demande, sont inopérants.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre l'arrêté du 16 septembre 2020 :
3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".
4. M. A... fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans. Les pièces qu'il produit à l'appui de sa requête en particulier, les avis d'imposition, les factures d'électricité qui supportent également le nom d'un tiers, des factures émanant d'un opérateur téléphonique, les décisions de refus de séjour faisant rejetant de demandes formulées par des tiers par courrier et un certificat d'assurance automobile, n'établissent pas la présence personnelle de l'intéressé. Si les relevés bancaires produits font apparaître ponctuellement, hormis un grand nombre de mouvements automatiques, des versements d'espèces ou achats de la vie courante établissant la présence de l'intéressé en France ou à Monaco, ils sont peu nombreux sur une période couvrant plusieurs années. Dans ces circonstances, les attestations de tiers ou la naissance d'un enfant en France en France en 2013, ne suffisent pas à établir que M. A... résidait habituellement en France depuis dix ans à la date des décisions attaquées, en particulier au cours de la période 2011-2015. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les pièces produites étaient insuffisamment probantes et diversifiées pour établir la présence habituelle de l'intéressé en France sur l'ensemble de la période utile et ont ainsi écarté le moyen tiré d'un défaut de consultation de la commission du titre de séjour.
5. En deuxième lieu, ainsi qu'il a été dit, la durée de la résidence habituelle en France de M. A... est incertaine. Il fait valoir qu'il ne dispose plus d'attaches familiales dans son pays et se prévaut de la présence en France de sa mère, titulaire d'un titre de séjour et de son frère de nationalité française. Toutefois, il est constant que sa concubine, qui réside en France n'est pas en situation régulière. Par ailleurs, M. A... se prévaut d'une promesse d'embauche émanant de la Sarl La Cambuse en qualité de plongeur et du fait que sa concubine est titulaire d'une promesse d'embauche pour un poste d'employée de maison. Cependant, M. A... ne justifie d'aucune expérience ou qualification professionnelle particulière. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, en refusant son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à l'espèce et désormais repris à l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
6. En troisième lieu, il y a lieu d'écarter les moyens tirés, d'une part, de la violation de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lequel doit être regardé comme tiré de la violation du 7° de l'article L. 313-11 dans sa rédaction applicable à l'espèce, d'autre part de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, par adoption des motifs pertinents retenus par le tribunal administratif de Nice aux points 5 à 7 de son jugement qui n'appellent pas de précisions en appel. Les mêmes motifs justifient que soit écarté le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. En quatrième lieu, il y a également lieu d'écarter le moyen tiré de la violation du 1 de l'article 3 de la convention des droits de l'enfant par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Nice aux points 13 et 14 de son jugement. Il y a lieu d'observer qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le retour de M. A... et de sa compagne dans leur pays d'origine les priveraient de la possibilité de se procurer des ressources leur permettant de subvenir aux besoins de leurs enfants, ni que ceux-ci ne pourraient y être scolarisés, ou encore, que le fait de résider dans le pays dont eux-mêmes et leurs parents ont la nationalité est contraire à leur intérêt supérieur.
8. En cinquième et dernier lieu, la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision à l'appui des conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire ne peut qu'être écarté.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de M. A... à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie...perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens... ".
11. L'Etat n'étant pas partie perdante dans la présente instance, les conclusions de M. A... tendant à la condamnation de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Quenette, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2022.
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N° 21MA02068
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