Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 janvier 2019, la commune de Tavel, représentée par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 4 décembre 2018 ;
2°) de rejeter la requête présentée par Mme F... devant le tribunal administratif de Nîmes ;
3°) de mettre à la charge de Mme F... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le projet méconnait les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en raison du risque inondation ;
- le projet méconnait les dispositions des articles L. 111-11 et R. 111-13 du code de l'urbanisme en raison de l'extension nécessaire du réseau électrique ;
- le projet méconnait les dispositions des articles R. 111-5 et R. 111-6 du code de l'urbanisme car il porte atteinte à la sécurité des usagers de la voie publique.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2020, Mme F..., représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête, à l'annulation de la décision du 3 octobre 2017 par laquelle le maire de Tavel a procédé au retrait de la décision tacite de non opposition à déclaration préalable de division du 4 août 2017 et à ce que soit mise à la charge de la commune de Tavel la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme D..., rapporteure publique,
- et les observations de Me E... pour la commune de Tavel.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Tavel relève appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 3 octobre 2017 par laquelle le maire de Tavel a procédé au retrait de la décision tacite de non opposition à déclaration préalable du 4 août 2017 portant sur la division en quatre lots en vue de construire de la parcelle cadastrée E 26 située chemin des Comeyres, lieudit " Cabanette ".
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus d'autorisation sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, il appartient à l'autorité compétente en matière d'urbanisme, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.
3. Il ressort des pièces du dossier, notamment des cartes réalisées par Cereg Ingénierie intitulées " Zonage du risque inondation à l'échelle communale et intégration dans les documents d'urbanisme - Premier croisement aléa / enjeux " et " Zonage du risque inondation ", cette dernière étant annexée à l'avis de la direction départementale des territoires et de la mer (DDTM), que le terrain d'assiette du projet est situé, s'agissant de l'aléa inondation, en partie Ouest et Sud en aléas moyen et faible, sur une infirme partie Nord en aléa faible, et pour le reste, correspondant à la majeure partie des parcelles, en risque nul, et s'agissant de l'aléa ruissellement en aléa faible dénommé R-I-U. Le Service eau et inondation de la direction départementale des territoires et de la mer du Gard, saisi dans le cadre de l'instruction de la déclaration en litige, a rendu un avis favorable le 10 août 2017 en confirmant d'une part le niveau d'aléa ruissellement faible affectant le terrain et comportant, d'autre part, une prescription pour le risque inondation visant uniquement le lot A et préconisant de caler la surface de plancher de la future construction à 50 centimètres minimum au-dessus du terrain naturel. Dans ces conditions, en raison du niveau faible à moyen de ces aléas, de la configuration du terrain et de la prescription émise par la DDTM, le projet en litige n'est pas de nature à porter atteinte à la sécurité publique, et un tel motif de retrait était illégal.
4. En deuxième lieu et d'une part, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. / Lorsqu'un projet fait l'objet d'une déclaration préalable, l'autorité compétente doit s'opposer à sa réalisation lorsque les conditions mentionnées au premier alinéa ne sont pas réunies. (...) ". Ces dispositions poursuivent notamment le but d'intérêt général d'éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d'être contraints, par le seul effet d'une initiative privée, de réaliser des travaux d'extension ou de renforcement des réseaux publics, sans prise en compte des perspectives d'urbanisation et de développement de la collectivité, et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement. L'autorité compétente doit s'opposer à une déclaration préalable de division lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et que, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.
5. D'autre part, aux termes de son article R. 111-13, applicable sur le territoire de la commune non dotée d'un document d'urbanisme à la date de la décision en litige : " Le projet peut être refusé si, par sa situation ou son importance, il impose soit la réalisation par la commune d'équipements publics nouveaux hors de proportion avec ses ressources actuelles, soit un surcroît important des dépenses de fonctionnement des services publics. ".
6. Il ressort des pièces du dossier, notamment du plan joint à l'avis d'ERDF en date du 11 août 2017, qu'il existe un réseau public d'électricité à proximité immédiate du terrain. Il ressort de cet avis, malgré la mention d'un " réseau nouvellement créé ", que la desserte en électricité du projet de Mme F... ne requiert la création, sur le domaine public et en dehors du terrain d'assiette de l'opération, que d'un raccordement d'une longueur de 90 mètres, qui ne saurait être qualifié d'extension. Aussi, en l'absence de travaux d'extension ou de modification de la capacité du réseau public d'électricité, et, par conséquent, en l'absence de création d'équipement public nouveau au sens de l'article R. 111-13 précité, le projet ne méconnait pas les dispositions des articles L. 111-11 et R. 111-13 précités, et un tel motif de retrait était illégal.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme : " Le projet (...) peut également être refusé ou n'être accepté que sous réserve de prescriptions spéciales si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. " et aux termes du second alinéa de l'article R. 111-6 suivant : " Le nombre des accès sur les voies publiques peut être limité dans l'intérêt de la sécurité. (...) ".
8. Il ressort des pièces du dossier que le projet de Mme F... est desservi par le chemin des Comeyres et comporte quatre accès indépendants, un pour chaque lot, regroupés par deux. La commune de Tavel n'apporte aucun élément de nature à contredire les constatations de l'huissier réalisées le 6 septembre 2018, soit postérieurement à la décision en litige, mais se rapportant à des lieux dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils auraient été modifiés depuis, selon lesquelles d'une part le gymnase communal situé à proximité dispose, en plus d'un accès via le chemin des Comeyres, d'un accès supplémentaire par la rue puis le chemin des Lauzes, et d'autre part la fréquentation du chemin de Comeyres est faible à l'heure de sortie des classes. En outre il ressort des pièces du dossier que le chemin de Comeyres est rectiligne au droit du terrain et est situé en agglomération où la vitesse de circulation est limitée à 50 kilomètres par heure, et que des aires de dégagement de 5 mètres sur 5 sont prévues sur chacun des accès. Dans ces conditions, les accès au projet ne sont pas de nature à compromettre la sécurité des usagers du chemin des Comeyres, et un tel motif de retrait était illégal.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 3 octobre 2017 portant retrait de la décision tacite de non opposition à déclaration préalable de Mme F....
Sur les frais exposés dans l'instance :
10. Mme F... n'étant pas partie perdante à la présente instance, il y a lieu de rejeter la demande de la commune fondée sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Tavel la somme de 1 500 euros à verser à Mme F... sur le fondement des mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Tavel est rejetée.
Article 2 : La commune de Tavel versera la somme de 1 500 euros à Mme F... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tavel et à Mme C... F....
Délibéré après l'audience du 18 février 2021 où siégeaient :
-M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme B..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mars 2021.
4
N° 19MA00354
hw