Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 juin 2019, et des mémoires complémentaires enregistrés les 20 avril et 27 mai 2020, l'EURL SGI, représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 février 2016 du maire de la commune d'Hyères et la décision implicite par laquelle a été rejeté son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune d'Hyères de lui délivrer le permis de construire sollicité ;
4°) à titre subsidiaire d'enjoindre à la commune d'Hyères de procéder à une nouvelle instruction de sa demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de la commune d'Hyères une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif de Toulon a jugé à tort que le projet méconnaît l'article 4 B du règlement du lotissement Héliopolis. L'attestation du SPANC antérieure de quelques années à la date du dépôt de la demande est pertinente car les projets de 2013 et 2015 sont identiques. Les deux projets de construction de 2013 et de 2015 qui ont donné lieu à la production de l'attestation du SPANC en cause sont identiques. En produisant l'attestation du SPANC du 14 novembre 2013, elle justifie que son dispositif d'assainissement est conforme à la règlementation en vigueur.
- l'erreur matérielle du SPANC quant au nombre de logements objet des projets est sans incidence, car les SPANC apprécient le dimensionnement des dispositifs d'assainissement autonome non pas en fonction du nombre de logements mais du nombre de pièces principales en application de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation et de l'arrêté du 7 septembre 2009 modifié.
Par des mémoires enregistrés les 13 mars et 11 mai 2020, la commune d'Hyères, représentée par le cabinet d'avocats CGCB, demande à la Cour de rejeter la requête de l'EURL SGI et de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros en application l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la demande de première instance est irrecevable car dirigée contre une décision purement confirmative ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- en tout état de cause, le service instructeur n'a pas été en mesure de vérifier le respect de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme concernant la desserte par l'eau potable, les pièces du dossier ne permettant pas de déterminer si l'eau a été prélevée sur le terrain d'assiette ni son mode de prélèvement ;
- la commune demande en tout état de cause à la Cour de faire droit à sa demande de substitution de motifs fondée sur les dispositions de l'article L. 123-23 du code de l'urbanisme, anciennement L. 146-4-I du code de l'urbanisme ;
Un mémoire a été enregistré le 10 juin 2020, présenté pour la commune d'Hyères, et non communiqué en application des dispositions de l'article R. 6111 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- l'arrêté du 7 septembre 2009 fixant les prescriptions techniques applicables aux installations d'assainissement non collectif recevant une charge brute de pollution organique inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5 ;
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de Me C... représentant la requérante, et de Me A... du cabinet d'avocats CGCB, représentant la commune d'Hyères.
Une note en délibéré, présentée par l'EURL SGI, a été enregistrée le 3 septembre 2020.
Une note en délibéré, présentée par la commune d'Hyères, a été enregistrée le 7 septembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. L'EURL SGI a déposé le 8 décembre 2015 une demande de permis de construire pour la réalisation d'une construction comportant deux logements sur deux niveaux sur des parcelles cadastrées section J n° 447 et 448, situées corniche du Pignon, dans l'île du Levant, sur le territoire de la commune. Par un arrêté PC 83069 15 Y0195 du 2 février 2016, le maire de la commune d'Hyères a refusé le permis de construire. Par un jugement 1602128 du 9 avril 2019, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de l'EURL SGI tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 février 2016. L'EURL SGI relève appel de ce jugement.
2. En premier lieu, l'EURL SGI critique le motif de refus du permis de construire tiré de ce que l'attestation du service public de l'assainissement non collectif (SPANC) en date du 14 novembre 2013, qui indique que le dispositif qui équipe le terrain est conforme à la règlementation en vigueur, correspondrait à un projet différent de celui objet de la demande de permis de construire.
3. L'article 5 de l'arrêté du 7 septembre 2009 susvisé dispose : " le dimensionnement de l'installation exprimé en nombre d'équivalents-habitants est égal au nombre de pièces principales au sens de l'article R. 111-1-1 du code de la construction et de l'habitation ". Il ressort de ces dispositions que le dimensionnement d'une installation d'assainissement non collectif dépend non pas du nombre de logements à desservir, mais du nombre global de pièces principales de la construction desservie. La requérante soutient, en s'appuyant sur une documentation technique, et sans que ce soit utilement contesté par la commune d'Hyères, que la capacité de 5 m3 de la fosse septique qui équipe son terrain correspond à un maximum de sept pièces principales. Dès lors, la circonstance que l'attestation établie le 14 novembre 2013 par la collectivité gestionnaire du SPANC et jointe au dossier de demande de permis de construire déposé en 2015 porte sur un logement de trois pièces principales et non sur deux logements de deux pièces principales chacun ne permet pas de remettre en cause la pertinence de cette attestation. Le maire de la commune d'Hyères ne pouvait dès lors se fonder sur cette circonstance pour refuser le permis de construire.
4. En deuxième lieu, l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dispose : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Aux termes de l'article 4A) du règlement du lotissement Héliopolis : " en l'absence de réseau public de distribution d'eau potable, toutes constructions ou installations nouvelle devront être munies d'un équipement de distribution d'eau potable, par captage, forage, puits particulier, à condition que la potabilité de l'eau et sa protection contre tout risque de pollution soient assurées par appareillage agréé par le ministère de la santé en application de l'article R. 111-11 du code de l'urbanisme. Une analyse d'eau potable délivrée par un laboratoire agréé devra être jointe à toute demande d'occupation des sols. ".
5. L'exigence au dossier de demande de permis de construire d'un rapport d'analyse de l'eau établi par un laboratoire agréé n'est pas une règle de forme, qui ne pourrait figurer légalement dans une règlementation locale d'urbanisme, mais une règle de fond, qui permet au maire de vérifier que la qualité de l'eau qui doit alimenter la construction objet de la demande de permis de construire répond aux exigences de salubrité du règlement du lotissement et du code de l'urbanisme. Si l'EURL SGI justifie que le terrain d'assiette du projet est équipé d'un dispositif de potabilisation agréé, il lui appartenait lors du dépôt de la demande de permis de construire de justifier du bon fonctionnement de cette installation en produisant une rapport d'analyse attestant de la potabilisation de l'eau qui alimente la construction. Il ressort des pièces du dossier que l'EURL SGI a produit un tel rapport d'analyse de l'eau dans le dossier de demande de permis de construire. En se bornant à préciser que ce rapport ne précisait pas le lieu de prélèvement de l'eau ainsi analysée, la commune d'Hyères ne conteste pas utilement que ce rapport d'analyse mettait le service instructeur en mesure de vérifier que la qualité de l'eau répondait aux exigences, tant du code de l'urbanisme que du règlement du lotissement Héliopolis. Le maire de la commune d'Hyères ne pouvait donc pas refuser le permis de construire pour ce motif.
6. En revanche, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
7. L'article L. 1218 du code de l'urbanisme, anciennement L. 1464 I, dispose : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". Il résulte de ces dispositions que dans les communes littorales, dont fait partie la commune d'Hyères, les constructions peuvent être autorisées, en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'estàdire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.
8. Si les parcelles cadastrées section J0 n° 447 et 448 sont situées dans le lotissement Héliopolis, celui-ci n'est desservi ni par un réseau de distribution de l'eau potable ni par un réseau d'assainissement, et se trouve isolé au sein du secteur naturel de l'île du Levant. Il n'est pas situé en continuité avec les agglomérations et villages existants et ne constitue pas un hameau nouveau intégré à l'environnement. Il ne représente dès lors qu'une zone d'urbanisation diffuse. Il y a lieu dès lors pour la Cour de faire droit à la demande de substitution de motif de la commune d'Hyères et tirée de ce que le permis de construire pouvait être refusé en raison de la méconnaissance de l'article L. 121-8.
9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, que l'EURL SGI n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit à aucune des demandes des parties fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'EURL SGI est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune d'Hyères tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EURL SGI et à la commune d'Hyères.
Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. B..., président-assesseur,
- Mme Baizet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 septembre 2020.
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N° 19MA02636
hw