Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 novembre 2019 et le 31 août 2020, l'association " Centre équestre des Garrigues ", représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 septembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté précité ;
3°) d'enjoindre à la commune du Castellet de lui délivrer l'autorisation sollicitée et, à défaut de procéder à une nouvelle instruction de son dossier, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune du Castellet la somme de 3 000 euros, dans le dernier état de ses écritures, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'arrêté attaqué était suffisamment motivé au regard des articles R. 424-5 du code de l'urbanisme et L. 211-2 du code des relations entre l'administration et le public ;
- c'est également à tort que le tribunal a estimé que la construction n'était pas en lien avec une activité agricole, notamment au regard de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime ;
- le projet ne méconnait ni l'article 2.1.1 du règlement du plan de prévention des risques d'incendie et de feu de forêt, ni l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2020, la commune du Castellet, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'association requérante la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteur public,
- et les observations de Me C... substituant Me A..., représentant l'association " Centre équestre des Garrigues " et de Me D..., représentant la commune du Castellet.
Une note en délibéré présentée pour l'association " Centre équestre des Garrigues " a été enregistrée le 8 décembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de la commune du Castellet, par arrêté du 27 janvier 2017, s'est opposé à la déclaration préalable de travaux de l'association " Centre équestre des Garrigues ", aussi dénommée " Poney club des Garrigues " visant à installer cinq chalets en bois sur une parcelle cadastrée section B n° 2484. Celle-ci relève appel du jugement n° 1700963 du 20 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué doit être écarté, par adoption des motifs du premier juge aux points 5 et 6 du jugement qui n'appellent pas de précision en appel.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article N1 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) : " Sont interdites les occupations et utilisations du sol suivantes : - Les nouvelles constructions destinées à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à la fonction d'entrepôt, à l'exploitation agricole [...] - Les aires de jeux et de sport ouvertes au public, sauf dans les secteurs Nl, Nlr et Npr,(...) ". Et l'article N2 du même règlement précise qu' : " Est autorisé ce qui n'est pas interdit à l'article N 1 précédent, notamment : - Les travaux confortatifs, transformations ou agrandissement des constructions existantes à la date d'approbation du présent PLU, à condition que (...) La construction soit située en dehors des zones définies en risque fort d'incendie- Pour les exploitations agricoles existantes à la date d'approbation du PLU, les travaux, serres et autres, les installations nécessaires à leur conservation, à leur modernisation ou à leur transformation sont autorisées sans qu'ils aient pour effet une extension de la surface du terrain qu'elles occupent. ". La réalité de l'exploitation agricole se caractérise par l'exercice effectif d'une activité agricole d'une consistance suffisante.
4. En l'espèce, la décision attaquée se fonde tout d'abord sur le fait que le projet d'installation de cinq chalets en bois correspond à une activité en lien avec une activité sportive et de ce fait, méconnait l'article N1 précité du règlement du PLU. Si l'association requérante soutient qu'elle exercerait une activité agricole, et qu'elle pouvait ainsi bénéficier de la dérogation de l'article N2 qui autorise pour les exploitations agricoles existantes à la date d'approbation du PLU, les travaux, serres et autres et les installations nécessaires à leur conservation, à leur modernisation ou à leur transformation, les mentions de la notice descriptive de la demande d'autorisation selon lesquelles l'association aurait une activité de ferme pédagogique ne sont toutefois pas corroborées par les autres pièces du dossier, alors notamment que les photographies dont se prévaut la requérante ne sont pas datées. Dans ces conditions, l'association requérante n'établit pas l'existence de cette activité de ferme pédagogique à la date d'approbation du plan local d'urbanisme (PLU), le 2 juin 2009. Il ressort certes de la même notice descriptive que l'association " Centre équestre des Garrigues " possède quarante-neuf équidés et que tous les ans naissent des poneys. En outre le relevé de la mutualité sociale agricole établi le 29 avril 2015 mentionne que l'association " Centre équestre des Garrigues " est enregistrée depuis le 1er novembre 1993 pour une activité d'élevage, dressage et entrainement des chevaux. Et l'association se prévaut d'une attestation de son vétérinaire du 14 novembre 2016 selon laquelle il a assisté depuis 2006 à la mise à bas de treize poulains. Ce faisant l'association " Poney club des Garrigues " pourrait être regardée comme exerçant une activité agricole d'élevage. Toutefois les statuts de l'association ne mentionnent pas l'élevage comme objet social. Et la demande d'autorisation ne fait pas non plus état d'une telle activité préexistante, à la date d'approbation du PLU. Enfin, l'avis de situation au répertoire SIREN du 8 février 2011 fait état au titre de l'activité principale exercée par le " Centre équestre des Garrigues " d'" autres activités récréatives et de loisirs ". Au surplus deux des employés ont des diplômes en lien avec des activités sportives, une animatrice étant dotée d'une carte professionnelle éducative sportive délivrée par la fédération française d'équitation et un autre agent, affecté à la conduite de séance et cycle d'enseignement jusqu'au premier niveau de compétition, étant titulaire d'un brevet professionnel concernant l'activité équestre. Et l'association requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait déjà les éléments en sa possession établissant l'existence de son activité agricole compte tenu des contentieux précédents initiés en 2018, alors qu'elle supporte la charge de la preuve. Enfin, elle ne peut utilement se prévaloir du fait qu'il est indispensable pour la poursuite de son activité que son matériel soit mis à l'abri des intempéries et du vol, une telle circonstance demeurant sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Dans ces conditions, l'association requérante, qui supporte la charge d'établir qu'elle remplit les conditions de l'article N2 pour pouvoir construire, ne démontre pas, et il ne ressort pas des pièces du dossier, que cette activité d'élevage était d'une consistance suffisante, à la date d'approbation du PLU, le 2 juin 2009.
5. En troisième lieu, l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Et aux termes de l'article 2.1.1 " constructions nouvelles " en zone rouge du règlement du plan de prévention des risques d'incendie et feu de forêt (PPRIF), dont l'application anticipée a été décidée : " Les constructions suivantes sont admises (sous réserve qu'elles soient également admises par les règlements d'urbanisme en vigueur) : / les bâtiments à usage agricole ou destinés à l'élevage d'ovins et caprins... ". Et selon l'article 2.1.3 du règlement du PPRIF concernant les travaux installations et aménagements autres que ceux exécutés sur des constructions existantes en zone rouge : " Les travaux et aménagements suivants sont admis : / [...] Les aménagements, travaux et ouvrages destinés aux activités agricoles et forestières... ", l'article 2. 2 de ce règlement relatif aux utilisations et occupations du sol interdites précisant que " Toutes les utilisations ou occupations du sol non visées à l'article 2.1 sont interdites ". Les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN) prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés aux risques en cause et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux autorisations de construire, sans que l'autorité administrative soit tenue de reprendre ces prescriptions dans le cadre de la délivrance du permis de construire. Il incombe à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme de vérifier que le projet respecte les prescriptions édictées par le plan de prévention et, le cas échéant, de préciser dans l'autorisation les conditions de leur application. Si les particularités de la situation l'exigent et sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, il peut subordonner la délivrance de l'autorisation sollicitée à des prescriptions spéciales, s'ajoutant aux prescriptions édictées par le plan de prévention dans cette zone, si elles lui apparaissent nécessaires pour assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Ce n'est que dans le cas où l'autorité compétente estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet pour lequel l'autorisation de construire est sollicitée, y compris d'éléments déjà connus lors de l'élaboration du plan de prévention des risques naturels, qu'il n'est pas légalement possible d'accorder l'autorisation en l'assortissant de prescriptions permettant d'assurer la conformité de la construction aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, qu'elle peut refuser, pour ce motif, de délivrer l'autorisation.
6. En l'espèce, la décision attaquée se fonde ensuite sur le fait qu'au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le projet est susceptible d'aggraver le risque de feu de forêt, alors que le terrain d'assiette est situé en zone rouge du PPRIF approuvé par arrêté préfectoral du 19 décembre 2011 correspondant à une forte exposition au risque et sur l'article 2.2 du PPRIF qui interdit les centres équestres. Il n'est pas contesté que le terrain d'assiette du projet se situe en zone rouge du PPRIF dont l'application anticipée a été décidée. Et ainsi qu'il a été dit au point 4, les éléments dont se prévaut l'association requérante ne sont pas suffisants pour caractériser l'exercice d'une activité agricole suffisamment consistante. Elle n'est par suite pas fondée à soutenir qu'elle pouvait bénéficier d'une autorisation sur le fondement de l'article 2.1.1 et 2.1.3 du règlement du PPRIF. Et compte tenu de l'interdiction énoncée au point 2.2 du PPRIF précité, l'association requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le maire aurait pu lui accorder un permis assorti de prescriptions, en se prévalant de la défendabilité de son terrain.
7. Il résulte de tout ce qui précède que l'association " Poney club des Garrigues " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions en injonction :
8. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation de l'association requérante. Ses conclusions en injonction ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de l'association " Poney-Club des Garrigues " dirigées contre la commune du Castellet qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association " Poney Club des Garrigues" la somme de 1 500 euros, à verser à la commune du Castellet en application de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'association " Poney club des Garrigues " est rejetée.
Article 2 : L'association " Poney Club des Garrigues " versera à la commune du Castellet une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Poney club des Garrigues " et à la commune du Castellet.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2020.
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N° 19MA05030
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