Par un jugement n° 1902024-1902025 du 13 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2019, M. C..., représenté par Me Bazin, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 juin 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à Me Bazin, en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en fait et en droit car elle ne mentionne pas les liens amicaux et l'engagement bénévole du requérant et de son épouse, et elle ne prend pas en compte les problèmes médicaux de son épouse ;
- il appartenait au préfet d'informer le requérant qu'il était nécessaire de porter à sa connaissance les éléments relatifs à sa santé avant la fin de l'examen de sa demande d'asile ;
- la décision portant interdiction de retour est entachée d'erreur de droit car ce n'est pas la notification de la décision de la CNDA qui rend le séjour du requérant irrégulier ; il était en possession d'une attestation de demandeur d'asile valable jusqu'à ce que la décision préfectorale qui abroge cette attestation, lui soit notifiée.
Par un mémoire enregistré le 6 mai 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Portail a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 27 mars 2019, le préfet de l'Hérault a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à M. C..., ressortissant albanais, et a pris à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de quatre mois. M. C... relève appel du jugement du 13 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " ...La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée... ".
3. L'arrêté en litige mentionne les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont le préfet de l'Hérault a entendu faire application. Il précise que la conjointe de M. C... a également été déboutée du droit d'asile, que le couple n'a pas d'enfant, et que les conséquences d'une obligation de quitter le territoire français n'apparaissent pas dès lors disproportionnées par rapport au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Il comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit donc être écarté.
4. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce qu'il appartenait au préfet d'informer le requérant qu'il était nécessaire de porter à sa connaissance les éléments relatifs à sa santé avant la fin de l'examen de sa demande d'asile doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour :
5. En premier lieu, aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur version en vigueur à la date de la décision litigieuse : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. Sauf s'il n'a pas satisfait à une précédente obligation de quitter le territoire français ou si son comportement constitue une menace pour l'ordre public, le présent III n'est pas applicable à l'étranger obligé de quitter le territoire français au motif que le titre de séjour qui lui avait été délivré en application de l'article L. 316-1 n'a pas été renouvelé ou a été retiré ou que, titulaire d'un titre de séjour délivré sur le même fondement dans un autre Etat membre de l'Union européenne, il n'a pas rejoint le territoire de cet Etat à l'expiration de son droit de circulation sur le territoire français dans le délai qui lui a, le cas échéant, été imparti pour le faire. Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. L'étranger à l'encontre duquel a été prise une interdiction de retour est informé qu'il fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, conformément à l'article 24 du règlement (CE) n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen de deuxième génération (SIS II). Les modalités de suppression du signalement de l'étranger en cas d'annulation ou d'abrogation de l'interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative prononce une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans. La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. "
6. Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.
7. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
8. L'arrêté, après avoir relevé que M. C... se maintient irrégulièrement sur le territoire français, mentionne la date d'entrée en France déclarée par M. C..., que l'épouse du requérant est également en situation irrégulière et que le couple n'a pas d'enfant. Il se réfère ainsi à la durée de sa présence sur le territoire français et à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France. Il précise que l'intéressé ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il cite par ailleurs l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet n'était pas tenu de préciser expressément que M. C... n'avait pas fait l'objet précédemment de mesures d'éloignement. La décision d'interdiction de retour comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire peut à sa seule lecture en connaître les motifs. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant interdiction de retour doit donc être écarté.
9. En deuxième lieu, l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ".
10. Alors même que M. C... était encore en possession d'une attestation de demandeur d'asile, il résulte des dispositions précitées qu'il a perdu le droit de se maintenir sur le territoire français à compter de la date de lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) qui a rejeté son recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) refusant de lui reconnaître la qualité de réfugié. Le préfet de l'Hérault n'a donc pas commis d'erreur de droit en précisant dans l'arrêté attaqué que l'intéressé se maintient irrégulièrement sur le territoire français depuis la date de lecture de la décision définitive de la CNDA.
11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par suite ses conclusions accessoires fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre de l'intérieur et à Me Bazin.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2020, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme Gougot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2020.
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N° 19MA05685
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