2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Hérault du 6 décembre 2018 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 1 500 euros à verser à Me C....
Elle soutient que :
- le premier juge a entaché d'erreur de droit sa décision en estimant que le préfet de l'Hérault pouvait légalement motiver la mesure d'éloignement qui la visait par référence à la mesure d'éloignement prise à l'encontre de son époux, laquelle avait été annulée ;
- le premier juge a entaché d'erreur de droit sa décision en estimant que si le réexamen de la situation de son époux ordonné par la cour administrative d'appel de Marseille est de nature à faire obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement, cette circonstance n'affecte pas la légalité de cette décision ;
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée au regard du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français se fonde sur des faits matériellement inexacts ;
- l'obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée méconnaît les dispositions de l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires, enregistrés les 25 juillet et 2 septembre 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... D..., ressortissante géorgienne née le 9 avril 1986, relève appel du jugement du 6 février 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 6 décembre 2018 lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant l'Etat à destination duquel elle peut être éloignée.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel, non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis, mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, Mme D... ne peut utilement se prévaloir des erreurs de droit que les premiers juges auraient commises sur sa situation.
3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 alors applicable : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) ".
4. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 6 décembre 2018 que celui-ci comporte l'indication des textes dont il a été fait application, et notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les articles du livre VII du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs à l'examen des demandes d'asile, le 8° de l'article L. 314-11 et le 6° de l'article L. 511-1 de ce code. Il fait également état de la procédure d'examen de la demande d'asile de l'intéressée et de son rejet le 23 février 2018 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et le 30 octobre 2018 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), de sa situation familiale et du rejet de la demande d'asile formée par son époux M. F... E.... Il procède, enfin, à une appréciation des risques éventuellement encourus par la requérante dans l'hypothèse d'un retour dans son Etat d'origine. Par suite, la décision attaquée du 6 décembre 2018 portant obligation de quitter le territoire français comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent et doit être regardée comme suffisamment motivée. La circonstance que la cour administrative d'appel de Marseille a, postérieurement à l'édiction de la mesure en litige, annulé la mesure d'éloignement visant M. E... à laquelle fait référence cette décision est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation de celle-ci. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit dès lors, être écarté comme manquant en fait.
5. En deuxième lieu, Mme D... fait valoir que la décision en litige se fonde sur des faits matériellement inexacts dès lors que la décision faisant obligation à M. E... de quitter le territoire a été annulée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 20 décembre 2018. La légalité d'une mesure d'éloignement visant un ressortissant étranger s'appréciant à la date à laquelle celle-ci est prise, la circonstance que l'un des éléments retenus par le préfet de l'Hérault au soutien de sa décision du 6 décembre 2018 a été remis en cause ultérieurement est toutefois sans incidence sur la légalité de cette dernière. Le moyen doit, par suite, être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. Il ressort des pièces du dossier et des déclarations de Mme D... que celle-ci n'a rejoint, avec ses enfants, son époux sur le territoire français qu'en septembre 2017, date à laquelle la demande d'asile formée par M. E... ayant été définitivement rejetée, une décision portant obligation de quitter le territoire français avait été prise à son endroit depuis le 20 juillet 2017. Au regard de la relativement faible durée de réunion de la cellule familiale sur le territoire français, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Hérault a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui faisant obligation de quitter le territoire français eu égard à l'objet et aux effets de cette mesure. Elle n'est, dès lors, pas fondée à se plaindre de ce que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a estimé que l'arrêt de la cour du 20 décembre 2018 n'affectait pas la légalité de l'arrêté litigieux en ce qui concerne son droit au respect de sa vie privée et familiale.
8. En quatrième lieu, si Mme D... fait valoir le réexamen en cours de la situation de son époux par l'autorité administrative, il ne ressort pas des pièces, au regard de ce qui précède, en l'absence d'un droit au séjour reconnu à celui-ci au terme du réexamen de sa situation en l'état du dossier, que le préfet de l'Hérault aurait entaché d'erreur manifeste d'appréciation sa décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
9. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Et aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants ".
10. Ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un État pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que celui-ci s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne soit du fait des autorités de cet État, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'État de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.
11. Il ressort des pièces du dossier de première instance et d'appel que Mme D... ne produit aucun élément de nature à étayer les craintes qu'elle allègue dans l'hypothèse où elle serait éloignée à destination de la Géorgie. Il ne ressort pas davantage des termes de l'arrêté en litige que le préfet de l'Hérault se serait cru lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA. Les moyens dirigés contre la décision fixant le pays à destination duquel la mesure d'éloignement en litige peut faire l'objet d'une exécution doivent, par suite, être écartés.
12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. L'ensemble de ses conclusions, en ce y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, doit, par suite, être rejeté.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 12 septembre 2019, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- M. Portail, président assesseur,
- M. B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 septembre 2019.
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N° 19MA02415
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