Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 23 novembre 2018, M. K... F..., M. O... M..., Mlle H... M..., M. C... M..., M. N... L..., M. D... L..., M. J... P..., M. G... P... et Mme I... P..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1706481 du tribunal administratif de Marseille du 25 octobre 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération n° 07-2017 du 23 mars 2017 par laquelle le conseil municipal de Saint-Léger-les-Mélèzes a approuvé le plan local d'urbanisme en tant que celle-ci classe les parcelles cadastrées ZA 223, 224, 225 et 227 en zone agricole ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Léger-les-Mélèzes la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier faute de lecture en audience publique et, par ailleurs, de convocations régulières à l'audience de lecture en méconnaissance des articles L. 10 et R. 741-1 du code de justice administrative et de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- en s'estimant lié par des avis extérieurs et par l'avis du commissaire enquêteur, le conseil municipal a méconnu l'étendue de sa propre compétence ;
- la commune a commis une erreur de droit ;
- la délibération attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît le principe de sécurité juridique.
La requête a été communiquée à la commune de Saint-Léger-les-Mélèzes qui n'a pas produit d'observations en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'urbanisme ;
le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
le rapport de M. E...,
les conclusions de Mme Gougot, rapporteur public,
et les observations de Me A..., représentant M. F... et les autres requérants.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 20 juin 2012, le conseil municipal de Saint-Léger-les-Mélèzes a décidé de réviser le plan d'occupation des sols de la commune. Par délibération du 15 octobre 2016, celle-ci a arrêté un projet de plan local d'urbanisme prévoyant le classement en zone AU des parcelles ZA 223, 224, 225 et 227 situées au lieudit les Grands-Prés sur le territoire de la commune de Saint Léger-les-Mélèzes. Par délibération du 23 mars 2017, le conseil municipal a approuvé le plan local d'urbanisme en classant ces parcelles en zone agricole. M. F..., MM. et B... M..., MM. L... et MM. et B... P..., propriétaires en propre ou en indivision, ont demandé l'annulation de cette délibération en tant qu'elle procède à un tel classement. Par la présente requête, ils font appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes en annulation.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En l'espèce, il ressort du dossier que le jugement attaqué fait mention de sa date de lecture en audience publique le 25 octobre 2018, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire. Cette preuve n'est en l'occurrence pas rapportée par les appelants. Le moyen ne peut qu'être écarté.
3. Par ailleurs, en l'absence de disposition législative ou réglementaire en ce sens, le moyen tiré de l'absence de convocation régulière des parties à l'audience de lecture ne saurait être accueilli. Les appelants ne sont donc pas fondés à soutenir que le jugement est irrégulier.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Il résulte des dispositions de l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme que le projet de plan local d'urbanisme peut être modifié à l'issue de l'enquête publique afin de tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d'enquête, sous réserve que cette modification en procède et que ne soit pas remise en cause l'économie générale du projet.
5. En l'espèce, à la suite des observations en réponse de la commune de Saint-Léger-les-Mélèzes au procès-verbal de synthèse du commissaire-enquêteur, la délibération en litige précise, après le rappel des avis des principales autorités publiques et des conclusions, réserves et recommandations du commissaire-enquêteur, qu'" il ressort de l'ensemble, analysé avec REPLIQUE Etudes et Conseil, le bureau en charge des études, que le projet de PLU soumis à l'enquête peut être utilement ajusté sur les points... suivants:/ ... 11. Substitution d'un zonage A au zonage AU strict porté au projet mis à l'enquête. ". Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne ressort pas des pièces du dossier à la suite d'un tel arbitrage qu'en procédant à la modification du projet de plan local d'urbanisme dans les conditions décrites à l'article L. 153-21 du code de l'urbanisme, la commune se serait cru liée notamment par les avis recueillis lors de la phase d'enquête publique, et se serait dès lors méprise sur l'étendue de sa propre compétence. Le moyen tiré du vice d'incompétence négative et de l'erreur de droit qu'aurait commise la commune à ce titre doit être écarté.
6. A supposer que le moyen tiré de l'erreur de droit soit décliné de la sorte, il ne ressort en tout état de cause pas du dossier que l'évolution du plan local d'urbanisme ne procèderait pas de l'enquête, conformément à ce qui vient d'être dit, ni que celle-ci remettrait en cause l'économie générale du projet en dépit de la modification du classement des quelques parcelles en litige.
7. Aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme applicable : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Aux termes de l'article R. 151-23 du même code : " Peuvent être autorisées, en zone A : / 1° Les constructions et installations nécessaires à l'exploitation agricole ou au stockage et à l'entretien de matériel agricole par les coopératives d'utilisation de matériel agricole agréées au titre de l'article L. 525-1 du code rural et de la pêche maritime ; / 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d'habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci. ".
8. Aux termes du règlement du plan local d'urbanisme approuvé par la délibération du 23 mars 2017 : " 3.2. (...) Les zones naturelles sont de trois types : AU, A et N./ 3.2.1. / Les zones à urbaniser (...) AU circonscrivent " les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation ". (article R 123-6 C. Urb.). / Elles peuvent être de 2 types selon que l'ouverture à l'urbanisation doit intervenir : / 1. soit à court ou moyen terme sur la durée de vie du PLU./ Il s'agit dans ce cas de zones, dites AU indicé, d'urbanisation d'ensemble, à aménager dans le respect de leur règlement de zone et dans les organisation, prescriptions et échéancier de leurs orientations d'aménagement et de programmation (OAP) ; / 2. soit à plus long terme à l'occasion d'une modification ou d'une révision ultérieure du PLU. / Il s'agit là de zones, dites AU strict, qui, sans modification du PLU, ne sont ni aménageables ni constructibles sur sa durée de vie. / Le règlement du PLU de Saint-Léger-les-Mélèzes ne comprend aucune zone AU strict. / Il comporte une zone AUb-b sur 2 sites aux Combes, à même vocation principale que la sous-zone Ub-b./ 3.2.2. Les zones agricoles (A) (...) sont " les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles " (article R 123-7 C. Urb.) / La zone A comprend les 5 sous-zones suivantes : / Sous-zone A Territoires agricoles simples. (...) "
9. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. S'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif dans le cas où elle serait entachée d'une erreur de droit, d'une erreur manifeste, de détournement de pouvoir ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
10. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées ZA 223, 224, 225 et 227 dont les requérants contestent le classement en zone A sont incluses dans un vaste espace à vocation agricole, compris entre la route départementale 944 et le Drac, constitué d'une large bande de terrain plat où seule la parcelle ZA 227 supporte une construction. Le tout est entouré de zones naturelles. À supposer que l'habitation située de l'autre côté de la route ainsi que l'ancienne piscine olympique à l'abandon puissent être considérées comme dans le périmètre d'un hameau comprenant d'autres habitations et des commerces, l'éloignement de celui-ci du centre de l'agglomération et l'éparpillement de ces éléments n'est pas de nature à en remettre en cause la vocation agricole. La circonstance que celle-ci ne répondrait à aucun besoin n'est pas démontrée alors que le projet de plan insiste sur la nécessité de préserver les espaces agricoles. Si, au terme du précédent projet et du document d'urbanisme en vigueur, les terrains en litige avaient été classés en zone d'urbanisation future et fait l'objet d'un projet de lotissement, le conseil municipal pouvait, eu égard à la situation existante marquée notamment par l'implantation d'un complexe sportif significatif, mais uniquement de l'autre côté de la route et éloigné tant du centre de la commune que du coeur de la station, ainsi qu'aux perspectives d'avenir telles qu'il les a appréciées, les classer en zone agricole, en dépit de leur viabilisation déjà existante et pour l'un d'entre eux d'une construction isolée. Par suite, en approuvant le classement de ces parcelles en zone agricole, le conseil municipal de Saint-Léger-les-Mélèzes n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
11. Dans la mesure où il résulte des termes mêmes des dispositions des articles R. 151-22 et 23 du code de l'urbanisme que la circonstance que des terrains sont desservis par les réseaux publics ou même construits ne fait pas obstacle à leur classement en zone agricole, le moyen tiré d'une erreur de droit à cet égard ne peut qu'être écarté.
12. Si M. F... et les autres appelants soutiennent aussi que la commune a méconnu le principe de sécurité juridique en raison d'un projet de lotissement en cours à un stade avancé, il ressort du dossier que le moyen manque en fait.
13. Il résulte de ce qui précède que M. F... Q... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leurs demandes en annulation.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Léger-les-Mélèzes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les appelants au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. F..., MM. et B... M..., MM. L... et MM. et B... P... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. K... F..., M. O... M..., Mme H... M..., M. C... M..., M. N... L..., M. D... L..., M. J... P..., M. G... P... et Mme I... P... ainsi qu'à la commune de Saint-Léger-les-Mélèzes.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Poujade, président,
- M. Portail, président assesseur,
- M. E..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.
N° 18MA04955
nb