Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 25 juillet 2016, le 21 septembre 2017 et le 4 décembre 2017 et un mémoire récapitulatif, enregistré le 8 février 2018, M. I... et M. B... H..., représentés par Me C..., demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1508460 de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 21 juin 2016 ;
2°) de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Marseille pour qu'il soit statué au fond sur leur requête ;
3°) de condamner solidairement la commune de Meyreuil et la SARL Rochefontaine à leur verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) à titre subsidiaire, dans l'exercice de son pouvoir d'évocation, d'annuler le permis de construire délivré le 29 avril 2015 à la SARL Rochefontaine et la décision du maire de la commune de Meyreuil du 24 août 2015 rejetant le recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté ;
5°) à titre subsidiaire, de condamner la commune de Meyreuil à leur verser une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur demande n'était pas manifestement irrecevable dès lors que le four à bois projeté n'est pas dissociable du projet de construction et que le risque majeur d'incendie qui résulte de cet équipement est de nature à porter atteinte aux conditions d'occupation de leurs propriétés ;
- le projet en litige présentait une menace pour la sécurité publique et méconnaissait, par suite, les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- les accès prévus au projet sont manifestement insuffisants au regard des caractéristiques du site en méconnaissance de l'article A 3-2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Meyreuil ;
- les dispositions de l'article A 4-1 du règlement du plan local d'urbanisme et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme sont méconnues en l'absence de raccordement à un réseau public d'eau potable ;
- les dispositions de l'article A 10-1 c) du règlement du plan local d'urbanisme sont méconnues en l'absence de production au dossier de demande de permis de construire d'un plan altimétrique ;
- les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme sont méconnues.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 24 mars 2017, le 30 octobre 2017 et le 12 décembre 2017 et un mémoire récapitulatif, enregistré le 15 février 2018, la commune de Meyreuil, représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) de confirmer l'ordonnance de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 21 juin 2016 ;
2°) à titre subsidiaire, de renvoyer l'affaire au tribunal administratif de Marseille ;
3°) à titre très subsidiaire, de rejeter la requête d'appel de MM. H... dans l'exercice de son pouvoir d'évocation ;
4°) de condamner MM. H... à lui verser chacun la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que MM. H... ne justifient pas d'un intérêt pour agir contre cette autorisation d'urbanisme au regard des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme ;
- le moyen tiré de ce que la construction projetée présente un risque d'incendie est inopérant ;
- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;
- le projet ne méconnaît pas les dispositions du 1) de l'article UA4 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Meyreuil s'agissant du raccordement au réseau public d'eau potable ;
- le projet ne méconnaît pas les dispositions du 2 de l'article UA3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Meyreuil s'agissant des accès prévus ;
- le dossier de permis de construire permet de déterminer de manière suffisamment précise la hauteur des bâtiments projetés pour permettre à l'administration de s'assurer du respect des dispositions de l'article UA10 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune relative à la hauteur maximale des constructions ;
- le dossier de permis de construire ne méconnaît pas les prescriptions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme et permet notamment d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 octobre 2017 et le 8 décembre 2017 et un mémoire récapitulatif, enregistré le 13 février 2018, la SARL Rochefontaine, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête d'appel comme irrecevable ;
2°) à titre subsidiaire, de confirmer l'ordonnance attaquée ;
3°) de condamner MM. B... et I...à lui verser, chacun, la somme de 2 500 euros.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est manifestement irrecevable et peut être rejetée par une ordonnance prise en application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;
- les requérants n'établissent pas leur intérêt pour agir ;
- la juridiction pourrait faire droit, le cas échéant, à une demande d'évocation dans un souci de bonne administration de la justice ;
- les risques sécuritaires allégués ne sont pas avérés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Silvy, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Giocanti, rapporteure publique,
- et les observations de Me C..., représentant MM. H..., G...représentant la commune de Meyreuil, et de Me E... substituant MeD..., représentant la SARL Rochefontaine.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de la commune de Meyreuil a délivré le 29 avril 2015 un permis de construire assorti de prescriptions à la société à responsabilité limitée (SARL) Rochefontaine pour la réalisation d'un atelier de fabrication de pain, d'une cave viticole et d'une habitation destinée au logement de l'exploitant pour une surface de plancher totale de 245,4 m² sur une parcelle cadastrée section AL n° 182, située 1985 route de Martina sur le territoire communal. MM. F... et B...H...relèvent appel de l'ordonnance du 21 juin 2016 par laquelle la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de la commune de Meyreuil du 29 avril 2015 portant permis de construire et de la décision du 24 août 2015 par laquelle le maire de Meyreuil a rejeté leur recours gracieux dirigé contre ce permis de construire.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme, applicable à la demande de première instance introduite le 23 octobre 2015 : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ". Et aux termes de l'article L. 600-1-3 de ce code : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire (...) s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du propriétaire. ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
4. MM. H... font valoir qu'ils sont propriétaires de biens immobiliers et titulaires, à la date d'introduction de la requête de première instance, de droits indivis sur des terrains situés à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, auquel il sera accédé par la même voie que celle menant à leurs propriétés. Il ressort des pièces du dossier que seule l'une des parcelles appartenant aux requérants est située à proximité du terrain d'assiette du projet de la SARL Rochefontaine et que ceux-ci ne peuvent, compte tenu de la configuration des lieux, se prévaloir de la qualité de voisins immédiats de ce terrain. Il ressort également des écritures des requérants que ceux-ci entendent établir leur intérêt pour agir par la circonstance qu'ils subiront nécessairement les conséquences de ce projet, et particulièrement le risque aggravé de feux de forêts qui résultera de l'installation, dans la construction projetée, d'une exploitation artisanale de fabrication de pain et d'un four à bois. Il ressort toutefois des productions de la commune et de la société pétitionnaire que le risque d'incendie résultant de l'implantation de ces activités artisanales a été pris en compte lors de l'instruction de la demande de permis de construire, qu'il a justifié des prescriptions assortissant cette autorisation d'urbanisme, notamment en terme de défrichement et que l'exploitation future du four à bois se fera dans les conditions de sécurité requises par la règlementation et les normes en vigueur. L'atteinte alléguée par les consorts H... pour justifier de leur intérêt pour agir à l'encontre de ce permis de construire n'est, par suite, pas suffisamment étayée.
5. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté leur requête comme irrecevable.
Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
7. En vertu de ces dispositions, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par MM. H... doivent, dès lors, être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. H... le versement d'une somme de 1 000 euros à la commune de Meyreuil et d'une somme de 1 000 euros à la SARL Rochefontaine sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... H...et de M. I... est rejetée.
Article 2 : MM. H... verseront à la commune de Meyreuil la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : MM. H... verseront à la SARL Rochefontaine la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. I..., à M. B... H..., à la commune de Meyreuil et à la SARL Rochefontaine.
Délibéré après l'audience du 27 septembre 2018, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- M. Portail, président assesseur,
- M Silvy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 octobre 2018.
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N° 16MA02973