Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 novembre 2014, M.A..., représenté par Me G..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 11 septembre 2014 ;
2°) d'annuler cette décision implicite de rejet ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune d'Eygalières de retirer le permis de construire obtenu le 18 décembre 2007 par M. B..., dans un délai de quinze jours, à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner la commune d'Eygalières à lui verser une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a intérêt à agir dès lors qu'il est locataire de l'immeuble mitoyen de la construction édifiée par M. B... et qu'il subit des troubles de voisinage ;
- le permis de construire du 18 décembre 2007 est tout aussi illégal que celui obtenu le 12 juin 2003 qui a fait l'objet d'une annulation contentieuse ;
- ce permis obtenu en 2007 a été accordé à la suite de manoeuvres frauduleuses.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 décembre 2014, complété le 17 août 2015, la commune d'Eygalières conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A... à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- M. A... n'a pas intérêt à agir contre la décision de refus contestée au regard des dispositions des articles L. 600-1-2 et L. 600-1-3 du code de l'urbanisme ;
- les travaux sont achevés depuis plus d'un an et l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme fait obstacle à la recevabilité du recours de M. A... ;
- le permis de construire délivré 2007 n'a pas été obtenu par fraude.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2015, M. B... conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. A... à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- M. A... n'a pas intérêt à agir contre la décision de refus contestée au regard des dispositions des articles L. 600-1-2 et L. 600-1-3 du code de l'urbanisme ;
- la demande de M. A... est tardive en application des dispositions de l'article R. 600-3 et R. 600-2 du code de l'urbanisme ;
- les travaux sont achevés depuis plus d'un an et l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme fait obstacle à la recevabilité du recours de M. A... ;
- le permis de construire en litige, obtenu sans user de manoeuvres frauduleuses, n'est pas entaché d'illégalité.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Josset, présidente assesseure,
- les conclusions de M. Salvage , rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant la commune d'Eygalières.
1. Considérant que, par courrier du 13 août 2013, M. A... a demandé au maire de la commune d'Eygalières de retirer l'arrêté du 18 décembre 2007 par lequel il avait délivré un permis de construire à M. B... ; qu'une décision implicite de rejet est intervenue en l'absence de réponse à ce courrier ; que le recours contentieux de M. A... dirigé contre cette décision implicite a été rejeté par ordonnance du 11 septembre 2004, prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, de la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille, au motif que la demande de M. A..., qui n'avait pas justifié de sa qualité à agir, était entachée d'une irrecevabilité manifeste ; que M. A... interjette appel de cette ordonnance ;
2. Considérant que la reconnaissance d'un intérêt donnant qualité pour exercer un recours pour excès de pouvoir contre une décision refusant de retirer une autorisation individuelle de construire est subordonnée à l'existence d'un intérêt à contester cette autorisation d'urbanisme ;
3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme issu de l'ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. " ; que l'article L. 600-1-3 du même code, issu de la même ordonnance précise : " Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. " ;
4. Considérant d'une part, que ces dispositions sont applicables à toutes les décisions, notamment celles refusant de retirer un permis de construire, intervenues après leur entrée en vigueur quelles que soient les dates de délivrance d'un permis de construire ou de son affichage ;
5. Considérant, d'autre part, que les dispositions précitées de l'article L. 600-1-3 du code de l'urbanisme ont pour objet principal de garantir la sécurité juridique des titulaires d'autorisations de construire en ne permettant pas à des tiers, dépourvus d'intérêt à agir à une date contemporaine de la demande du permis, de contester la légalité de cette autorisation une fois cet intérêt constitué ;
6. Considérant, dans ces conditions, que l'intérêt à agir de M. A... à l'encontre du refus de retrait du permis de construire délivré M. B... le 18 décembre 2007 doit être apprécié au regard de son intérêt à contester le cas échéant ce permis de construire ; que la décision de refus de retrait en litige étant intervenue postérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions précitées des articles L. 600-1 et L. 600-3 du code de l'urbanisme, l'intérêt à agir de M. A... doit s'apprécier à la date d'affichage en mairie de la demande du permis dont le retrait est demandé et selon les conditions prévues par ces dispositions ; que la circonstance que le permis de construire attaqué aurait été délivré, selon M. A..., à la suite de manoeuvres frauduleuses ne constitue pas en tout état de cause une circonstance particulière au sens de l'article L. 600-3 précité, susceptible de modifier la date à laquelle doit légalement s'apprécier son intérêt à agir ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du certificat d'affichage du 8 avril 2014 et produit par la commune, établi par M. Wibaux, conseiller municipal et adjoint à l'urbanisme à l'époque des faits, que l'avis de dépôt de la demande de permis de construire a été affiché en mairie dès sa réception le 10 septembre 2007 et que le permis de construire a été ensuite affiché en mairie pendant une durée de deux mois à compter du 19 décembre 2007 ; que si M. A... soutient que le permis de construire délivré le 18 décembre 2007 à M. B... n'aurait pas été affiché en mairie, il n'apporte, en tout état de cause, aucun élément au soutien de cette allégation pour contredire le certificat précité ; qu'ainsi en l'absence au dossier d'élément contraire, l'attestation de M. Wibaux permet de tenir pour établie la réalité de l'affichage en mairie de la demande de permis de construire en litige à la date ainsi certifiée ;
8. Considérant, en second lieu, que M. A..., qui produit des documents et une attestation de nature à établir qu'il est voisin, depuis l'année 2013, de la construction, objet du permis de construire délivré le 18 décembre 2007, n'établit ni même n'allègue que tel aurait été le cas à la date d'affichage en mairie de la demande de ce permis de construire ;
9. Considérant que dans ces conditions, la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille a pu opposer à M. A... son absence d'intérêt à agir contre l'arrêté contesté et rejeter en conséquence, sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, son recours comme manifestement irrecevable ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'ordonnance du 11 septembre 2004 par laquelle la présidente de la 2ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande contre la décision implicite par laquelle le maire de la commune d'Eygalières a refusé de retirer l'arrêté du 18 décembre 2007 accordant un permis de construire à M. B... ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fins d'injonction présentées par M. A... doivent être également rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune d'Eygalières qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse quelque somme que ce soit à M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 000 euros à verser à la commune d'Eygalières et la même somme à verser à M. B... au titre des dispositions précitées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... versera à la commune d'Eygalières une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : M. A... versera à M. B... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à la commune d'Eygalieres et à M. F... B....
Délibéré après l'audience du 30 juin2016, où siégeaient :
- M. d'Hervé, président de chambre,
- Mme Josset, présidente assesseure,
- Mme D..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.
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N° 14MA04410