Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 août 2017, Mme B..., épouseA..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 juillet 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de la Côte-d'Ivoire ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
4°) d'enjoindre, à défaut, au préfet de l'Hérault de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'État, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 2 000 euros à verser à Me C..., qui s'engage à renoncer à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- les décisions lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;
- l'autorité administrative n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation personnelle ;
- la décision de refus de titre de séjour et la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ont méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les décisions en litige sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- les décisions en litige portent atteinte à l'intérêt supérieur de ses nièces mineures et méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés et renvoie à ses écritures de première instance.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations du public avec l'administration ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Silvy, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme D...B..., épouseA..., ressortissante ivoirienne née le 7 août 1982, relève appel du jugement du 20 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 juillet 2016 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français, en fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. " ;
3. Considérant que les premiers juges n'avaient pas à répondre à la totalité des arguments avancés par Mme A... à l'appui de son moyen tiré du défaut d'examen particulier de sa situation par le préfet de l'Hérault et notamment aux arguments tirés de la situation médicale de sa soeur et du caractère nécessaire de sa présence auprès de sa soeur et de la famille de celle-ci ; qu'en écartant ce moyen, au point 3 de leur décision, au motif que l'absence d'examen particulier allégué ne ressortait pas des pièces du dossier, ils ont suffisamment motivé leur décision ; que le moyen tiré de son irrégularité sur ce point doit, dès lors, être écarté ;
Sur la légalité de l'arrêté :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...). " ; et qu'aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; et qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III.. (...) " ;
5. Considérant que les décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français attaquées comportent l'indication des textes dont il a été fait application et notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la motivation de la décision de refus de titre de séjour fait également état des conditions d'entrée de Mme A... sur le territoire français, de la présence de sa soeur sur le territoire français et de sa situation familiale ; que, par suite, la décision du préfet de l'Hérault portant refus de titre de séjour comporte également l'énoncé des considérations de fait qui la fondent, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que cette autorité ne s'est pas prononcée expressément sur la nécessité de la présence de Mme A... auprès de sa soeur ; que la motivation en fait de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit, par suite et en application des dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, être regardée comme suffisante ; que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de ces décisions doivent dès lors, être écartés comme manquant en fait ;
6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de l'arrêté litigieux, que le préfet de l'Hérault a estimé que la prise en compte de la situation de la soeur de Mme A... ne pouvait justifier la délivrance à celle-ci d'un titre de séjour au regard de la situation familiale propre de la requérante ; que Mme A...n'est pas fondée à soutenir, par suite, que les décisions en litige n'auraient pas été précédées d'un examen réel et complet de sa situation personnelle ;
7. Considérant, en troisième lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; et qu'aux termes de l'article R. 313-21 dudit code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ;
8. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
9. Considérant que Mme A... fait valoir la durée de son séjour en France, le caractère nécessaire de sa présence auprès de sa soeur et de ses nièces et la scolarisation de son fils dans une école française ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A...serait entrée en France au plus tôt en novembre 2015, date à laquelle elle était âgée de trente-trois ans, et ne justifie que d'une durée de résidence habituelle en France limitée à neuf mois à la date de la décision attaquée ; que Mme A... est mariée avec un compatriote qui résiderait toujours en Côte-d'Ivoire ; que, s'il ressort des pièces du dossier et notamment des bulletins de situation relatifs aux hospitalisations de sa soeur que cette dernière a fait l'objet de trois hospitalisations en établissement psychiatrique pour des troubles de l'humeur et une dépendance à l'alcool, la dernière hospitalisation date du mois de mars 2016 et s'est limitée à quatre journées ; que le caractère nécessaire de la présence de Mme A... aux côtés de sa soeur et de la famille de celle-ci n'était, dès lors, pas avéré à la date de l'arrêté attaqué ; que les seuls certificats médicaux produits par la requérante ne sont pas de nature à établir qu'elle serait la seule à pouvoir apporter un soutien ou une aide à la famille de sa soeur et à celle-ci ; que Mme A... n'est pas fondée, par suite, à soutenir que le préfet de l'Hérault aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en lui refusant l'admission au séjour et en l'obligeant à quitter le territoire eu égard aux buts poursuivis et aux effets de ces mesures ;
10. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte également de ce qui précède que Mme A... n'est pas plus fondée à soutenir que le préfet de l'Hérault aurait entaché ses décisions d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation sur la question du caractère indispensable de sa présence auprès de sa soeur ;
11. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
12. Considérant que Mme A... fait valoir que sa présence est indispensable pour prendre en charge ses deux nièces, âgées de sept et dix ans, au cours des périodes d'hospitalisation de sa soeur ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier et de ce qui a été dit au point 9 que le caractère nécessaire de sa présence auprès de ses nièces n'est pas établi à la date de la décision attaquée ; que le moyen tenant à la méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant doit, dès lors, être écarté ;
13. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que l'ensemble de ses conclusions, en ce y compris ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, doit, par suite, être rejeté.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B...épouseA..., à Me F... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 4 avril 2018, où siégeaient :
- M. Poujade, président de chambre,
- Mme E..., première conseillère,
- M. Silvy, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 avril 2018.
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N° 17MA03683