Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2021, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 15 septembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 20 juillet 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le premier juge a insuffisamment motivé son jugement s'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire et interdiction de retour ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut d'examen réel et complet ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale ;
- elle est entachée d'une erreur de droit ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et complet de sa situation ;
- la décision portant interdiction de retour est dépourvue de base légale ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'une erreur de droit ;
- elle est entachée d'un défaut de motivation ;
M. B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 décembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité géorgienne, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Hérault du 20 juillet 2020 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de sa destination et lui interdisant de retourner sur le territoire pendant une durée de quatre mois, en reprenant, pour l'essentiel, les moyens invoqués devant le premier juge.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents (...) des formations de jugement des cours (...) peuvent, en outre, par ordonnance, rejeter (...), après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire les requêtes d'appel manifestement dépourvues de fondement. (...) ".
Sur la régularité du jugement :
3. Le magistrat désigné a répondu, par une motivation suffisante, aux moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de ce qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'un défaut d'examen sérieux de la situation de M. B..., aux points 3 et 4 du jugement de première instance. De même, il a répondu par une motivation suffisante aux moyens tirés de ce que la décision portant interdiction de retour serait entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au point 4 du jugement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait entaché d'irrégularité doit donc être écarté.
Sur les conclusions relatives à l'obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. / (...) ".
5. Il résulte de ces dispositions que le préfet, s'il a la faculté d'examiner, le cas échéant d'office, le droit d'un étranger demandeur d'asile auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé de demeurer sur le territoire français à un autre titre que l'asile, ne peut le faire qu'avec les éléments sur la situation de l'intéressé dont il dispose. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que M. B... a fait l'objet d'une décision de rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides le 28 février 2020 et qu'il s'est déclaré célibataire et sans charge de famille en France, pays dans lequel il a indiqué être entré le 11 novembre 2019. En outre, il ressort de ces mêmes termes que le préfet a relevé que l'intéressé " ne justifie pas de circonstances humanitaires " qui nécessiteraient la délivrance d'un titre de séjour. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de la situation de M. B... et de ce que la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France le 11 novembre 2019, en compagnie de son père. Ainsi, à la date de la décision contestée, l'intéressé bénéficie d'une durée de séjour très brève de sept mois. Il est célibataire et sans charge de famille et ne justifie d'aucune insertion professionnelle particulière. Par ailleurs, s'il fait valoir que l'état de santé de son père, malade et titulaire d'une autorisation provisoire de séjour, âgé de 58 ans et souffrant d'une affection longue durée, nécessite sa présence à ses côtés, les nouvelles pièces produites en appel, constituées de trois lettres de médecins des 20 novembre, 4 et 18 décembre 2020, d'un document relatif à une opération programmée le 2 février 2021, de la notification de décisions de la maison des personnes handicapées (MDPH) de l'Hérault des 22 et 29 décembre 2020 octroyant une carte mobilité inclusion invalidité et attribuant l'allocation aux adultes handicapés, toutes postérieures à l'arrêté attaqué, ne sauraient suffire à démontrer qu'il est le seul à pouvoir lui apporter une assistance quotidienne. Dans ces conditions, en faisant au requérant obligation de quitter le territoire français, le préfet de l'Hérault n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur les conclusions relatives à la décision fixant le pays de destination :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa demande d'annulation de la décision fixant le pays de destination.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " et aux termes de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
10. Il ressort des pièces du dossier que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté la demande d'asile de M. B... par une décision du 28 février 2020, faute pour ce dernier d'avoir établi être menacé de subir des traitements inhumains et dégradants dans son pays d'origine. Cette décision a été confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 17 juillet 2020, aux motifs que l'intéressé réitère les mêmes éléments que ceux exposés devant l'Office, à savoir la nécessité pour son père d'accéder à des soins médicaux, qu'il n'invoque aucun motif relevant d'atteintes graves ou de persécutions au sens des dispositions afférentes au bénéfice d'une protection internationale et qu'il ne présente aucun élément sérieux susceptible de remettre en cause la décision du directeur général de l'OFPRA et ne peut, par suite, prétendre ni au bénéfice de l'article 1er , A, 2 de la convention de Genève ni à celui de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le requérant n'apporte pas plus en appel que devant le premier juge d'éléments susceptibles d'établir que sa vie serait menacée en cas de retour en Géorgie. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement doit être écarté.
11. Enfin, il ressort des termes même de l'arrêté attaqué que le préfet a bien mentionné que l'intéressé n'apporte aucun élément nouveau de nature à établir " la réalité des risques personnels " qu'il encourrait " en cas de retour dans son pays d'origine, au regard de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ". Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet ne se serait pas livré à un examen réel et sérieux de sa situation n'est pas fondé et doit être écarté.
Sur les conclusions relatives à l'interdiction de retour :
12. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale. Par suite, M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de sa demande d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois.
13. En deuxième lieu, il ressort des termes même de l'arrêté litigieux que le préfet a suffisamment motivé sa décision portant interdiction de retour, en considérant que sa récente présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public, qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine et qu'il n'a pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement. Le moyen tiré de ce que la décision serait entachée d'un défaut de motivation doit donc être écarté.
14. En troisième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu aux premier, sixième et septième alinéas du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
15. D'une part, si la décision contestée indique que M. B... se maintenait de manière irrégulière en France depuis le 13 mars 2020, date du rejet de sa demande d'asile, cette mention, alors que le prononcé d'une interdiction de retour ne constitue pas une sanction et qu'elle a vocation à être abrogée si l'intéressé respecte le délai de départ volontaire qui lui a été assigné, présente un caractère superfétatoire. Il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que le préfet se réfère aux autres critères du III de l'article L. 511-1, que cette mention superfétatoire ait exercé une influence sur le sens de la décision qu'il a ainsi prise. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'il aurait commise doit être écarté.
16. D'autre part, la double circonstance que M. B... n'avait jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement et que sa présence ne constituait pas une menace pour l'ordre public ne faisait pas obstacle à ce que le préfet prenne une interdiction de retour de quatre mois dès lors que les dispositions citées au point 14 ne font pas elles-mêmes obstacle à ce qu'une telle mesure soit décidée, quand bien même une partie de ces critères, qui ne sont pas cumulatifs, ne serait pas remplie. Par suite, le moyen tiré de la violation du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la décision n'est pas plus entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
17. Il résulte de ce qui précède que la requête d'appel de M. B..., qui est manifestement dépourvue de fondement, au sens des dispositions du dernier alinéa de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, doit être rejetée, en application de ces dispositions, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C... B....
Fait à Marseille, le 25 mars 2021.
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N° 21MA00366