Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 juillet 2019, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 9 mai 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire d'Alès du 3 juillet 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Alès la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté méconnait l'article 4 du décret n° 89-677 du 18 septembre 1989, dès lors qu'elle n'a pas eu connaissance du rapport disciplinaire établi le 27 janvier 2017 ;
- elle n'a pas davantage eu connaissance de l'une des pièces mentionnées dans le rapport disciplinaire du 6 janvier 2017 ;
- cet arrêté, qui se borne à reprendre les intitulés des différentes rubriques du rapport disciplinaire, est insuffisamment motivé ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'autorité territoriale ne fait état que de reproches vagues et imprécis sans démontrer la matérialité des faits de rectification d'actes de décès relevés à son encontre ;
- le comportement inadapté qu'elle aurait eu à l'égard de certains collègues n'est pas davantage établi par les seules attestations versées au dossier, alors au demeurant qu'elle produit des attestations faisant état de ses qualités humaines et professionnelles et qu'elle établit être victime de harcèlement moral ;
- en l'absence de règles clairement définies en matière de rectification d'actes d'état civil avant la note de service du 30 novembre 2015, les agissements qui lui sont reprochés ne revêtent aucun caractère fautif ;
- compte-tenu de ses états de service, de l'absence d'atteinte à la réputation du service et du risque de récidive nul, la sanction litigieuse est disproportionnée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2020, la commune d'Alès, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme D... d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Mme B... D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 6 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n°89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., adjoint administratif de 2ème classe, exerçant les fonctions d'officier d'état-civil au sein de la commune d'Alès, relève appel du jugement du 9 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 juillet 2017 du maire d'Alès lui infligeant la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions d'une durée de deux ans, dont un an avec sursis.
2. En premier lieu, c'est à bon droit que le tribunal a, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, écarté le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté.
3. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article 4 du décret susvisé du 18 septembre 1989 que : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. / L'intéressé doit disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce dossier et organiser sa défense. (...) " Aux termes du 5 de ce même décret : " Lorsqu'il y a lieu de saisir le conseil de discipline, le fonctionnaire poursuivi est invité à prendre connaissance, dans les mêmes conditions, du rapport mentionné au septième alinéa de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 précitée et des pièces annexées à ce rapport. "
4. Il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté que l'autorité territoriale se serait fondée sur la pièce, mentionnée sur le bordereau de documents annexés au rapport du disciplinaire du 6 janvier 2017, dont Mme D... allègue n'avoir pu prendre connaissance. En outre, il ressort des mentions portées sur l'avis du conseil de discipline du 6 mars 2017 que Mme D... a pu prendre connaissance du rapport disciplinaire du 27 janvier 2017. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 4 du décret du 18 décembre 1989 doivent être écartés.
5. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des échanges de courriels avec le greffe du tribunal de grande instance d'Alès et des extraits d'actes d'état civil produits par la commune, qu'à plusieurs reprises au cours de l'année 2015, pour corriger des erreurs qu'elle avait commises en établissant des actes de décès, Mme D... a pris l'initiative d'établir une seconde fois ces actes, sans en informer le procureur de la république ou sa hiérarchie, méconnaissant ainsi les règles, fixées par les articles 99 et suivants du code civil organisant la procédure de rectification des actes d'état-civil. En outre, la commune établit, par des témoignages nombreux, précis et concordants, que Mme D... perturbe le bon fonctionnement du service par les relations dégradées qu'elle entretient avec les autres agents du service à cause, notamment, de ses emportements fréquents. Pour contester ces agissements, Mme D... se borne à opposer des témoignages de personnes extérieures au service et à invoquer des faits de harcèlement moral à son encontre, au demeurant sans étayer ses allégations par le moindre commencement de preuve. Dès lors, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, la matérialité de ces agissements est suffisamment établie.
6. En dernier lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
7. En l'espèce, Mme D... ne saurait se prévaloir de ce que les règles relatives à la procédure de rectification d'actes d'état civil n'ont été diffusées pour la première fois au sein du service que par une note du 30 novembre 2015, dès lors qu'elle n'ignorait pas que toute rectification doit être autorisée par le procureur de la république et ne peut se faire qu'au moyen d'une mention expresse en marge de l'acte. Tant les erreurs commises par Mme D... que les initiatives qu'elle a prises pour les rectifier ont gravement perturbé le service et porté atteinte à son image. De même, l'ambiance délétère résultant de son comportement a porté atteinte au bon fonctionnement du service. L'ensemble de ces agissements sont, quels que soient ses états de service et son ancienneté au sein des effectifs de la commune, de nature à justifier une sanction disciplinaire. Eu égard à leur nature et à leur caractère persistant, la sanction d'exclusion temporaire des fonctions de deux ans, dont un an avec sursis, qui lui a été infligée à raison de ces faits n'est pas, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, entachée d'erreur d'appréciation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 juillet 2017 du maire d'Alès. Dès lors, doivent également être rejetées ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... une somme de 500 euros à verser à la commune d'Alès au titre de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Mme D... versera à la commune d'Alès une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et à la commune d'Alès.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président,
- Mme E..., présidente-assesseure,
- M. C..., conseiller.
Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.
2
N° 19MA03011