Par une décision n° 422754 du 12 février 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a rejeté le pourvoi de l'ONIAM, annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en tant qu'il a statué sur l'indemnisation de l'assistance par une tierce personne d'une part pour la période antérieure à la consolidation de l'état de santé de Mme C..., fixée au 4 décembre 2008, et d'autre part pour la période postérieure à la consolidation jusqu'à la lecture de cet arrêt et a renvoyé devant la cour administrative d'appel de Marseille dans cette mesure l'affaire où elle a été de nouveau enregistrée sous le numéro 20MA00608.
Procédure devant la cour :
Par des mémoires enregistrés le 18 avril et le 23 septembre 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de mettre à la charge de l'ONIAM au titre de l'assistance par une tierce personne une somme totale de 111 878,09 euros, majorée des intérêts de droit à compter du 29 mai 2013, date de réception de la première demande d'indemnisation, et de la capitalisation de ces intérêts, ainsi que, sous déduction des sommes perçues au titre de la prestation de compensation du handicap dont elle justifiera chaque trimestre, une rente trimestrielle d'un montant journalier de 27 euros à titre viager revalorisée par la suite en application des coefficients prévus par l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ;
2°) de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le besoin d'une aide non spécialisée a été évalué, avant la consolidation de son état de santé fixée au 4 décembre 2008, à 2 heures par jour du 10 au 26 août 2007, du 24 au 25 novembre 2007, du 28 au 29 juin 2008 et du 1er septembre au 4 décembre 2008 et à 4 heures par jour du 18 février au 27 juin 2008 et, après consolidation et de manière permanente, à 6 heures par jour ;
- le taux horaire s'élève pour l'aide temporaire à 16 euros et pour l'aide permanente à 18 euros ;
- la rente trimestrielle doit être calculée sur la base d'une somme de 27 euros journalier, au titre de son assistance par tierce personne permanente à titre viager ;
- la demande de l'ONIAM tendant à l'organisation d'une nouvelle expertise n'est pas fondée.
Par un mémoire enregistré le 27 août 2020, l'ONIAM, représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) de rejeter les prétentions indemnitaires de Mme C... au titre de l'assistance par une tierce personne temporaire ;
2°) de réserver la liquidation du poste d'assistance par une tierce personne permanente dans l'attente de l'organisation d'une nouvelle mesure d'expertise aux fins de déterminer le besoin actuel en tierce personne de Mme C... ;
3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnisation sollicitée par Mme C... pour la période allant du 5 décembre 2008 au 30 avril 2020, à la somme de 17 365 euros et de confirmer l'allocation prononcée par le tribunal administratif de Marseille d'une rente journalière d'un montant de 19,50 euros versée de manière trimestrielle, en dehors des périodes d'hospitalisation et sous déduction de la prestation de compensation du handicap perçue, sur justificatifs communiqués chaque trimestre.
Il soutient que :
- la prestation de compensation du handicap doit être déduite ;
- avant la date de consolidation, les montants perçus par Mme C... à ce titre couvre l'intégralité de ses besoins en assistance par une tierce personne ;
- une nouvelle mesure d'expertise est nécessaire pour déterminer le besoin actuel en assistance par une tierce personne.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Par sa décision n° 422754 du 12 février 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 16MA03550 du 31 mai 2018 en tant seulement qu'il avait statué sur l'indemnisation de l'assistance par une tierce personne, d'une part pour la période antérieure à la consolidation de l'état de santé de Mme C..., fixée au 4 décembre 2008, et d'autre part pour la période postérieure à la consolidation jusqu'à la lecture de son arrêt, pour un montant total de 53 267,50 euros. Dès lors, il y a eu de considérer qu'a d'ores et déjà été mise à la charge de l'ONIAM, hors assistance par une tierce personne, la somme de 148 370,50 euros.
Sur l'assistance par une tierce personne :
2. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire permettant, dans les circonstances de l'espèce, le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat, sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime.
3. Afin de tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 31331 du code du travail, il y a lieu de retenir pour l'indemnisation la base d'une année de 412 jours et un taux horaire de 13 euros jusqu'au 31 décembre 2017 puis de 14 euros à compter du 1er janvier 2018, calculé en fonction du taux horaire moyen du salaire minimum interprofessionnel de croissance, augmenté des charges sociales.
4. Il résulte par ailleurs de l'instruction, notamment des différents documents établis par le département des Alpes-Maritimes produits par Mme C..., que celle-ci est bénéficiaire depuis le 1er juillet 2007 de la prestation de compensation du handicap et a perçu au titre des prestations humaines une somme totale de 79 439,66 euros du 1er juillet 2007 au 30 avril 2020 et depuis lors 22,69 euros par jour en moyenne, soit 4 424,55 euros du 1er mai 2020 au 12 novembre 2020, date de lecture du présent arrêt, soit un montant total de 83 864,21 euros.
5. Enfin, il ne résulte pas de l'instruction que l'état de santé de Mme C... depuis l'expertise diligentée par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation Languedoc-Roussillon le 4 novembre 2011 a connu une évolution rendant nécessaire la réalisation d'une nouvelle expertise concernant les besoins en assistance par une tierce personne.
En ce qui concerne la période antérieure à la consolidation de l'état de santé de Mme C... puis celle allant de la date de consolidation à la date de lecture du présent arrêt, le 12 novembre 2020 :
6. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'expertise diligentée par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation Languedoc-Roussillon le 4 novembre 2011, que le besoin d'une aide non spécialisée a été de 2 heures par jour du 10 au 26 août 2007, du 24 au 25 novembre 2007, du 28 au 29 juin 2008 et du 1er septembre au 4 décembre 2008, soit pendant 112 jours, et de 4 heures par jour du 18 février au 27 juin 2008, soit pendant 129 jours. Le montant total correspondant à ces besoins antérieurs à la date de consolidation, calculé en application des principes et taux énoncés au point 2, s'élève à 10 858,72 euros.
7. Il résulte encore de l'instruction que Mme C... a besoin d'une aide non médicalisée de six heures par jour, sauf pendant les périodes d'hospitalisation. Ainsi, en enlevant la durée de 72 jours courant du 21 juin au 31 août 2010 correspondant à l'admission dans un établissement de soins, une telle assistance a été nécessaire pendant une durée de 3242 jours jusqu'au 31 décembre 2017 puis de 1046 jours du 1er janvier 2018 au 12 novembre 2020. Le montant total correspondant aux besoins en assistance par une tierce personne de Mme C... au titre de la période allant du 4 décembre 2008 au 12 novembre 2020, calculé en application des principes et taux énoncés au point 2, s'élève à 384 616,10 euros.
8. Il résulte de ce qui précède que le montant total correspondant aux besoins en assistance par une tierce personne de Mme C... jusqu'au 12 novembre 2020 s'élève à 395 474,82 euros. Eu égard au montant total perçu au titre des prestations humaines dans le cadre de la prestation de compensation du handicap indiqué au point 4, ce montant doit être ramené à 311 610,61 euros. Compte tenu du taux de perte de chance de 25 %, le préjudice subi par Mme C... au titre de l'assistance par une tierce personne pour ces périodes s'élève à la somme de 77 902,65 euros, qui doit donc être mise à la charge de l'ONIAM.
En ce qui concerne les frais d'assistance par une tierce personne postérieurs au 12 novembre 2020 :
9. Il apparaît que le versement d'une rente trimestrielle constitue, dans les circonstances de l'espèce, la modalité de réparation la plus équitable. L'indemnité sera égale à la somme représentative de la prise en charge déterminée sur la base d'un montant quotidien qu'il y a lieu de fixer, compte tenu du taux horaire de 14 euros sur 412 jours, à 94,81 euros. Elle doit être versée pour les nuits que Mme C... aura passées au domicile familial ou personnel durant chaque trimestre écoulé. Eu égard au taux de perte de chance, il convient donc de retenir une rente d'un montant de 23,70 euros par jour qui sera revalorisé par la suite en application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. La rente sera versée à chaque trimestre échu, sous déduction de la prestation de compensation du handicap perçue dont il sera justifié chaque trimestre par Mme C....
10. Il résulte de tout ce qui précède qu'outre la somme de 148 370,50 euros hors assistance par une tierce personne fixée par l'arrêt de la Cour n° 16MA03550 du 31 mai 2018, il doit être mis à la charge de l'ONIAM, au titre de l'assistance par une tierce personne, d'une part, jusqu'au 12 novembre 2020, après déduction du montant total des sommes versées à Mme C... pour l'aide humaine au titre de la prestation de compensation du handicap depuis le 1er juillet 2007, la somme de 77 902,65 euros, et, d'autre part, à compter du 13 novembre 2020, une rente d'un montant journalier de 23,70 euros, versée trimestriellement, pour les nuits que Mme C... aura passées au domicile familial ou personnel durant chaque trimestre écoulé, sous déduction, le cas échéant, de la somme que Mme C... percevra au titre de la prestation de compensation du handicap ou de toute autre allocation ayant le même objet et dont elle devra justifier chaque trimestre auprès de l'ONIAM, et qui sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale. En outre, en application de ce qui a été jugé par la cour dans son arrêt n° 16MA03550 du 31 mai 2018, non censuré sur ce point, Mme C... a droit, sur cette somme de 77 902,65 euros également, aux intérêts au taux légal à compter du 29 mai 2013 et à leur capitalisation à compter du 29 mai 2014 et à chaque échéance annuelle ultérieure.
Sur les frais liés au litige :
11. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 2 000 euros à verser à Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Outre la somme de 148 370,50 euros hors assistance par une tierce personne fixée par l'arrêt de la Cour n° 16MA03550 du 31 mai 2018, il est mis à la charge de l'ONIAM, au titre de l'assistance par une tierce personne, une somme de 77 902,65 euros jusqu'au 12 novembre 2020. La somme de 189 660,85 euros que l'ONIAM a été condamné à verser à Mme C... par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 juillet 2016 est ainsi portée à 226 273,15 euros.
Article 2 : Une rente trimestrielle au titre de l'assistance par une tierce personne est mise à la charge de l'ONIAM à compter du 13 novembre 2020, sur la base d'un montant journalier de de 23,70 euros. Cette rente sera versée pour les nuits que Mme C... aura passées au domicile familial ou personnel durant chaque trimestre écoulé, sous déduction, le cas échéant, de la somme que Mme C... percevra au titre de la prestation de compensation du handicap ou de toute autre allocation ayant le même objet et dont elle devra justifier chaque trimestre auprès de l'ONIAM, et sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
Article 3 : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Marseille du 4 juillet 2016 sont réformés en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : L'ONIAM versera une somme de 2 000 euros à Mme C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à Mme A... C..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes et à la Mutuelle des étudiants (LMDE).
Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme F..., présidente assesseure,
- M. Sanson, conseiller.
Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.
La rapporteure,
signé
K. F...Le président,
signé
J.-F. ALFONSI
La greffière,
signé
M. E...
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
7
N° 20MA00608
kp