Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 février 2019, le CCAS de Montpellier, représenté par Me Constans, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de rejeter la demande de M. A... ;
3°) de mettre à la charge M. A... le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal a, à tort, estimé que les premiers arrêts de travail étant liés à un accident de service survenu le 19 mai 2015, M. A... aurait dû continuer à percevoir un plein traitement sur la période du 1er juillet 2015 au 31 décembre 2016 son état de santé étant consolidé depuis le 30 juin 2015 ;
- il n'a disposé d'aucun élément permettant de relier les arrêts de travail postérieurs à la date de la consolidation de l'état de santé de M. A... à l'accident de service survenu le 19 mai 2015 ou à une origine professionnelle ;
- en plaçant M. A... à plein traitement pendant la première année de son congé longue maladie puis à demi-traitement, les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ont été respectées ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, M. A... ne se trouvait pas en 2016 dans l'incapacité permanente de reprendre ses fonctions, ni de bénéficier de l'adaptation de son poste, ni d'être reclassé ;
- en tout état de cause, la décision du 3 novembre 2016 ayant été rapportée par la décision du 16 février 2018, devenue définitive, la Cour doit constater le non-lieu à statuer sur la demande de M. A....
Par un mémoire en défense enregistré le 10 avril 2019, M. A..., représenté par Me Betrom, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelant la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par le CCAS de Montpellier ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 7 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité du jugement en ce que le tribunal administratif de Montpellier a omis de prononcer un non-lieu sur les conclusions de la requête de M. A... dirigées contre la décision du 3 novembre 2016 dès lors que cette décision a été implicitement mais nécessairement retirée par la décision du 16 février 2018 devenue définitive, faute d'avoir été contestée.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Lalubie substituant le cabinet Vinsonneau, représentant le CCAS de Montpellier.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., auxiliaire de soins au CCAS de Montpellier, a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2016 du président du CCAS de Montpellier le plaçant en congé de longue maladie du 1er juillet 2015 au 31 décembre 2016 en tant qu'il lui octroie un demi-traitement pour la période du 30 juin au 31 décembre 2016 et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au CCAS de Montpellier de le rétablir dans ses droits à plein traitement pour cette même période. Le CCAS de Montpellier relève appel du jugement du 21 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à l'ensemble de la demande de M. A....
Sur la régularité du jugement :
2. Lorsqu'une décision administrative faisant l'objet d'un recours contentieux est retirée en cours d'instance pour être remplacée par une décision ayant la même portée, le recours doit être regardé comme tendant également à l'annulation de la nouvelle décision. Lorsque le retrait a acquis un caractère définitif, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions dirigées contre la décision initiale, qui ont perdu leur objet. Le juge doit, en revanche, statuer sur les conclusions dirigées contre la nouvelle décision.
3. Il ressort des pièces du dossier que la décision n° 16/1765 du 23 novembre 2016 a été retirée par la décision n° 18/0283 du 16 février 2018 aux termes de laquelle M. A..., placé en congé de longue maladie du 1er juillet 2015 au 30 juin 2018, s'est vu octroyer un demi-traitement pour la période du 1er juillet 2016 au 30 juin 2018. Cette dernière décision, qui a été notifiée à M. A... le 12 mars 2018 suivant, faute d'avoir été déférée au tribunal administratif dans le délai de recours contentieux, a acquis un caractère définitif. Dans ces conditions, et alors même que le tribunal administratif de Montpellier n'a pas eu connaissance de la décision du 16 février 2018, les conclusions à fin d'annulation de la décision du 23 novembre 2016 présentée par M. A... devant ce tribunal étaient devenues sans objet. Le jugement du tribunal administratif en date du 21 décembre 2018, qui a statué sur cette demande, doit, dès lors, être annulé. Il y a lieu d'évoquer les conclusions de la demande ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer.
4. Il résulte toutefois de ce qui a été dit au point 2 que le recours de M. A... doit être regardé comme tendant également à l'annulation de la décision du 16 février 2018, en tant que par celle-ci, le président du CCAS de Montpellier l'a placé à demi-traitement pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016. Ce recours conserve, dans cette seule mesure, un objet et doit être examiné par la Cour.
Sur la légalité de la décision du 16 février 2018 en tant qu'elle place M. A... à demi-traitement pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016 :
5. Les droits des agents publics en matière d'accident de service ou de maladie professionnelle sont réputés constitués à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie diagnostiquée. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été victime le 19 mai 2015 d'un accident reconnu imputable au service par un arrêté du président du CCAS de Montpellier en date du 23 juillet 2015. Dans ces conditions, la situation de M. A... doit être regardée comme entièrement régie par les dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 applicables à cette date.
6. D'une part, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dans sa version en vigueur du 25 avril 2014 au 22 avril 2016 : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; (...). / Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. / (...). / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. (...) / (...) / Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas du 2° du présent article sont applicables aux congés de longue maladie. (...) ".
7. D'autre part, aux termes de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions : " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale (...), après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984. ".
8. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que doivent être pris en charge au titre de l'accident de service les arrêts de travail et les frais médicaux présentant un lien direct et certain avec l'accident initial y compris, le cas échéant, s'ils sont exposés postérieurement à la date de consolidation constatée par l'autorité compétente et, d'autre part, qu'un agent de la fonction publique territoriale qui n'est plus apte à reprendre son service à la suite d'un accident de service et auquel aucune offre de poste adapté ou de reclassement n'a été faite a le droit d'être maintenu en congé de maladie avec le bénéfice de son plein traitement sans autre limitation que celles tenant à sa mise à la retraite ou au rétablissement de son aptitude au service.
9. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'accident du 19 mai 2015, reconnu imputable au service, M. A..., qui n'a jamais repris depuis cette date son poste de travail malgré la consolidation de son état de santé fixée au 30 juin 2015 avec une IPP de 3%, qui s'ajoute au taux de 5% qu'il présentait avant la survenue de son accident de service mais qui ne faisait pas obstacle à l'exercice de ses fonctions d'aide-soignant, a été déclaré inapte à reprendre ses fonctions d'aide-soignant le 24 mars 2016 par la commission de réforme qui a proposé, outre la prise en charge médicale des séances de rééducation jusqu'au 16 juillet 2015 en soins post-consolidation, le reclassement de cet agent. Il ressort également des pièces du dossier que le 21 avril 2016, le médecin de la médecine préventive, saisi par l'administration, a estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait un suivi médical renforcé et ne lui permettait pas de reprendre son poste d'aide-soignant, même aménagé, et que dans ces conditions, la demande de reclassement était justifiée. Alors que le 27 avril 2017, la commission de réforme a émis un avis défavorable à la mise à la retraite de M. A... pour invalidité et en dépit d'un avis favorable au congé de longue maladie du 1er juillet 2015 au 30 juin 2018 du comité médical, par un avis rendu le 10 mai suivant, le comité médical supérieur, opposé à l'octroi d'un congé de longue maladie pour la période du 1er juillet 2015 au 31 décembre 2016, s'est prononcé favorablement à un reclassement professionnel de M. A... en le déclarant " non inapte à toutes fonctions ".
10. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier, et en tout cas pas du courrier daté du 18 août 2016 adressé au conseil de M. A..., que ce dernier aurait bénéficié d'un reclassement, ni même qu'il aurait refusé des propositions de reclassement de son employeur alors que le reclassement professionnel a été envisagé dès le 24 mars 2016 par la commission de réforme, puis le 21 avril 2016 par la médecine préventive et le 10 mai 2017 par le comité médical supérieur et qu'il a lui-même sollicité le bénéfice de cette procédure ainsi qu'en atteste le courrier du 13 décembre 2016 que son conseil a adressé au CCAS de Montpellier le 16 décembre suivant. Par ailleurs, il ressort des éléments médicaux versés au dossier, notamment du rapport d'expertise médicale du 10 septembre 2018, en faveur d'une non résorption entière des séquelles de l'accident de service à la date du 30 juin 2015, que les arrêts de travail successifs et ininterrompus dont a bénéficié M. A..., postérieurement au 30 juin 2015 présentent un lien direct avec l'accident de service survenu le 19 mai précédent à l'origine d'une réactivation inflammatoire d'une arthropathie acromio-claviculaire de l'épaule gauche chez un gaucher. Par suite, M. A... est fondé à soutenir que le CCAS de Montpellier a fait une inexacte application des dispositions de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et à demander l'annulation de la décision du président du CCAS du 16 février 2018 en tant qu'elle le prive de son plein-traitement pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt qui annule la décision du 16 février 2018 en tant qu'elle prive M. A... de son plein-traitement pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016 implique nécessairement que le CCAS de Montpellier rétablisse le plein traitement de l'intéressé pour la période considérée et lui verse les rappels de traitement correspondants. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au CCAS de Montpellier de rétablir le plein traitement de M. A... pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016 inclus dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
12. Les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le CCAS de Montpellier, partie perdante, doivent être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cet établissement la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 décembre 2018 est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. A... dirigées contre la décision du 23 novembre 2016.
Article 3 : La décision du 16 février 2018 en tant qu'elle prive M. A... de son plein-traitement pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016 est annulée.
Article 4 : Il est enjoint au CCAS de Montpellier, dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt, de rétablir le plein traitement de M. A... pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2016 inclus et de lui verser la somme correspondante.
Article 5 : Le CCAS de Montpellier versera la somme de 2 000 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au Centre Communal d'Action Sociale (CCAS) de Montpellier.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure,
- M. Mahmouti, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 octobre 2021.
6
N° 19MA00830
nl