Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2019, Mme D..., représentée la SELAFA Avocajuris Darnoux, Barthomeuf, Poizat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 13 juin 2019 ;
2°) de condamner le centre hospitalier d'Ajaccio à lui verser en son nom propre et en sa qualité d'ayant droit de Mme A... D... la somme de 25 000 euros à titre indemnitaire ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Ajaccio la somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé sur l'atteinte à la dignité de la patiente ;
- elle n'a pas été informée de l'état de santé de sa mère ;
- la responsabilité de l'hôpital est engagée pour défaut dans l'organisation du service en raison de l'existence de négligences lors de la prise en charge de la patiente et dans la tenue du dossier médical ;
- l'établissement de soins a porté atteinte à la dignité de la patiente.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2020, le centre hospitalier d'Ajaccio, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la prise en charge a été conforme aux règles de l'art et n'est pas attentatoire à la dignité de la patiente ;
- il n'y a pas eu de manquements au devoir d'information ;
- le dossier médical a été correctement tenu.
Le mémoire présenté par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse le 18 novembre 2020, après clôture de l'instruction intervenue le 17 septembre 2020, n'a pas été communiqué.
La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corse-du-Sud qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a désigné Mme E..., présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F...,
- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... relève appel du jugement du 13 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier d'Ajaccio à lui verser en son nom propre et en sa qualité d'ayant droit de sa mère, Mme A... D..., la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices imputés à la prise en charge de celle-ci par cet établissement de soins.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Contrairement à ce qui est soutenu par Mme D..., le tribunal administratif a suffisamment répondu dans le point 2 du jugement au moyen tiré du manquement au respect de la dignité de la patiente. Par suite, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. D'une part, il ne résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise diligentée par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux de la Corse, ni que la mère de la requérante aurait été hospitalisée pendant deux jours dans un lit dont la barrière était cassée, ni qu'une erreur de transmission des consignes sur l'heure de l'injection d'insuline aurait été commise ni même qu'une patiente handicapée aurait pénétré à plusieurs reprises sans autorisation dans sa chambre notamment au moment des soins. Par ailleurs, à supposer même que la jambe droite de Mme A... D... ait été examinée avec un jour de retard, il résulte de l'instruction que ce délai de prise en charge est sans lien avec l'évolution de l'état de santé vers une amputation et le décès de la patiente et ce, alors que la requérante ne produit aucun document médical de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert sur ces points. En outre, si aucun examen médical n'est retracé dans le dossier médical de Mme A... D... pour la journée du 18 mai 2015, il n'existe toutefois aucun lien de causalité entre la tenue de ce dossier et le préjudice moral dont il est demandé réparation. Il suit de là que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le décès de Mme A... D... n'était pas imputable à une faute dans l'organisation du service et que la prise en charge de la patiente par le centre hospitalier d'Ajaccio n'avait pas porté atteinte à sa dignité.
4. D'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que la fracture ilio-pubienne découverte au cinquième jour d'hospitalisation était imputable à une chute qui aurait été cachée à la fille de la patiente, alors que l'expert précise que la prise en charge de Mme A... D..., âgée de quatre-vingt-quatre ans, qui souffrait d'une insuffisance cardiaque grave, d'une pathologie poly-vasculaire, de diabète et de démence sénile et qui est décédée de l'évolution naturelle de ces pathologies, a été conforme aux bonnes pratiques médicales. La responsabilité de l'établissement de soins n'est pas davantage susceptible d'être engagée à ce titre.
5. Il résulte enfin de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que la requérante a été informée de la gravité des multiples pathologies dont était atteinte sa mère et a consenti à l'amputation de la jambe droite puis à son admission dans le service des soins palliatifs. Elle a par ailleurs été associée par l'équipe médicale aux choix thérapeutiques. En outre, le centre hospitalier d'Ajaccio n'a pas méconnu son obligation d'informer Mme D... du pronostic fatal dès lors qu'il ne résulte pas de l'expertise qu'un tel pronostic avait été posé. En l'absence de tout élément de nature médicale susceptible de remettre en cause les conclusions de l'expert sur ce point, c'est donc à juste titre que le tribunal a considéré que la responsabilité du centre hospitalier d'Ajaccio n'était pas engagée du fait d'un manquement à son obligation d'information.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., au centre hospitalier d'Ajaccio, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Corse-du-Sud et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Corse.
Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020 où siégeaient :
- Mme E..., présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme F..., première conseillère,
- M. Sanson, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 31 décembre 2020.
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N° 19MA03617
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