Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2019, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance de la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille du 29 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 4 juillet 2018 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à Me B...au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'ordonnance est insuffisamment motivée ;
- la décision de refus de titre de séjour a été prise par une autorité incompétente ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision d'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 mars 2019, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour M. A...a été enregistré le 9 avril 2019, postérieurement à la clôture de l'instruction, en tant qu'il ne se borne pas à présenter des observations en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant turc, relève appel de l'ordonnance du 29 octobre 2018 par laquelle la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juillet 2018 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".
3. Il ressort de l'examen de l'ordonnance attaquée que la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif a répondu, par une motivation suffisante, qui n'est pas stéréotypée, au moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'ordonnance attaquée doit être écarté.
Sur le bien fondé de l'ordonnance attaquée :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de séjour :
4. En premier lieu, M.C..., signataire de l'arrêté attaqué, bénéficiait, en sa qualité d'adjoint au chef du bureau de l'éloignement, du contentieux et de l'asile à la préfecture des Bouches-du-Rhône, par un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 26 février 2018, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture n° 13-2018-051, d'une délégation de signature à l'effet de signer, notamment, les décisions portant refus d'admission au séjour.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
6. Par les quelques pièces produites avant la clôture de l'instruction, constituées de la copie de l'extrait de naissance de sa fille à Marseille le 6 décembre 2017, de l'avis d'imposition 2018 sur les revenus 2016 et d'une facture d'électricité du mois de mars 2018, M. A... ne justifie ni la durée de son séjour sur le territoire national, ni la réalité des liens personnels et familiaux qu'il y aurait noués dès lors, en particulier, qu'il n'établit, ni même n'allègue que son épouse s'y trouverait en situation régulière. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en rejetant sa demande de titre de séjour porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent, par suite, être écartés. Le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle du requérant doit être écarté pour les mêmes motifs.
7. Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. La circonstance que deux enfants de M. A...soient scolarisés et que sa dernière fille soit née en France ne fait pas obstacle, compte tenu en particulier de leur âge, à ce que leur père soit éloigné et qu'ils s'établissent dans le pays d'origine de leurs parents où la vie familiale peut se reconstituer. Ainsi, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet des Bouches-du-Rhône aurait méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
9. Il résulte de ce qui a été dit précédemment concernant la décision portant refus de séjour que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté. Il doit en être de même des moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6.
10. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente de la 3ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées par voie de conséquence.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A..., à Me B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 11 avril 2019 où siégeaient :
- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,
- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.
Lu en audience publique, le 2 mai 2019.
5
N° 19MA00370