Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2017, Mme C...veuveB..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 16 juin 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Vaucluse du 2 mars 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer un titre de séjour portant droit au travail, ou, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, son conseil renonçant en ce cas à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- le refus de séjour est entaché d'une erreur de droit quant au fondement de la demande, qui n'est pas relatif aux dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais à sa vie privée et familiale, en qualité d'épouse d'un compatriote titulaire d'un titre de séjour ;
- il contrevient à l'esprit des articles L. 431-2 et L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle, dès lors qu'il est uniquement motivé par le décès de son mari ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2017, le préfet de Vaucluse conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante d'une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme C...veuve B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 septembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 22 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Jorda-Lecroq a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...veuveB..., de nationalité marocaine, née le 31 décembre 1964, a épousé le 20 décembre 2006 un compatriote titulaire d'un titre de séjour. La demande de regroupement familial effectuée en sa faveur par M. B...en 2010 a été rejetée la même année. Mme C...veuve B...est entrée en France au mois de juillet 2012 sous couvert d'un visa touristique, et a formé une demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. Elle a bénéficié, eu égard aux problèmes de santé de son conjoint, d'une autorisation provisoire de séjour valable six mois qui a été renouvelée une fois, puis de trois cartes de séjour temporaires délivrées pour le même motif. Elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour le 7 octobre 2016. M. B...est décédé le 21 octobre 2016. Mme C...veuve B...relève appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes en date du 16 juin 2017 ayant rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de Vaucluse en date du 2 mars 2017 portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet de Vaucluse s'est prononcé sur le renouvellement de l'admission exceptionnelle au séjour de Mme C... veuve B...au titre de la vie privée et familiale. La prise en compte, dans cette décision, du décès de M. B...n'est de nature à établir la commission ni d'une erreur sur la nature de la demande de la requérante, ni d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de la requérante. Les moyens tirés de l'existence de telles erreurs doivent donc être écartés.
3. En deuxième lieu, la situation de Mme C...veuveB..., qui n'a été admise au séjour ni au titre du regroupement familial, ni en qualité de conjoint de français, n'entre pas dans le champ d'application des articles L. 431-2 et L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l' étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme C...veuve B...ne justifie pas, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, avoir développé une vie privée et familiale ni une vie sociale ou professionnelle en France au-delà de ses relations avec son époux, décédé le 7 octobre 2016. Elle ne soutient ni même n'allègue être isolée au Maroc, où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-sept ans, où elle se rend fréquemment et où elle a passé cinq mois en 2015 et cinq mois en 2016. Dans ces conditions, le préfet n'a pas, en rejetant sa demande de titre de séjour alors même qu'elle aurait travaillé ponctuellement en France, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent, par suite, être écartés.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
6. Il résulte de ce qui a été dit précédemment concernant la décision portant refus de séjour que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté. Il doit en être de même des moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 2 et 5.
7. Il résulte de tout de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nîmes en date du 16 juin 2017 et de l'arrêté du préfet de Vaucluse du 2 mars 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Par ailleurs, les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le préfet de Vaucluse, qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat et ne fait pas état de frais spécifiques exposés par lui à l'occasion de l'instance, doivent aussi être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...veuve B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le préfet de Vaucluse sont rejetées.
Article 3: Le présent arrêt sera notifié à Mme C...veuveB..., à Me D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2018, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- Mme Jorda-Lecroq, présidente assesseure,
- MmeE..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2018.
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N° 17MA03076