2°) de prononcer la décharge ou la réduction de l'imposition en litige et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- l'administration a méconnu l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dès lors que la proposition de rectification ne fait pas état d'une circonstance mentionnée par l'administration dans ses écritures devant le tribunal, à savoir que les acquéreurs des lots ont fait l'objet de rehaussements en matière de droit de mutation, qu'aucun d'entre eux n'a contesté ;
- l'avis de mise en recouvrement est signé par un agent dont il n'est pas justifié qu'il était titulaire d'un arrêté de délégation de signature du comptable sous l'autorité duquel il est placé ; l'administration doit, en outre, rapporter la preuve de la publication par voie d'affichage de cet arrêté et de ce que sa date de publication est antérieure à la date à laquelle l'avis de mise en recouvrement est devenu exécutoire ;
- son gérant a toujours nié avoir bénéficié de versements en espèces pour la vente des parcelles de terrain à bâtir ;
- à supposer que les auditions des acquéreurs puissent justifier le versement d'une somme en espèces pour les lots vendus, ces versements sont confirmés pour seulement vingt-trois parcelles de terrain sur les trente-huit mises en vente ;
- les pénalités pour manoeuvres frauduleuses ne sont pas fondées.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 14 janvier 2020 et le 10 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la SCI Toes Investissements ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné, par décision du 19 mars 2021, Mme Mylène Bernabeu, présidente, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre à compter du 20 mars 2021, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les conclusions de Mme Courbon, rapporteure publique.
Une note en délibéré présentée pour la SCI Toes Investissements a été enregistrée le 25 mai 2021.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Toes Investissements, qui a pour activité principale la réalisation de programmes immobiliers, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel, l'administration lui a notifié, par une proposition de rectification du 17 mai 2010, suivant la procédure de rectification contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2005. La SCI Toes Investissements relève appel du jugement du 10 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a ainsi été assujettie et des pénalités correspondantes.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, la SCI Toes Investissements reprend le moyen soulevé en première instance tiré de l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification en méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, sans pour autant apporter des éléments nouveaux au soutien de ce moyen, qu'il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 4 du jugement contesté.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. / (...) L'avis de mise en recouvrement (...) est signé et rendu exécutoire par l'autorité administrative désignée par décret. Les pouvoirs de l'autorité administrative susmentionnée sont également exercés par le comptable public compétent (...) ". Aux termes de l'article L. 257 A du même livre, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les avis de mises en recouvrement peuvent être signés et rendus exécutoires (...) sous l'autorité et la responsabilité du comptable public compétent, par les agents du service ayant reçu délégation ".
4. Il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement daté du 10 janvier 2011 a été signé pour le comptable public, par M. C... A..., contrôleur principal des impôts, qui avait reçu une délégation en ce sens par un arrêté du comptable du service des impôts des entreprises de Marignane du 3 janvier 2011. L'administration soutient que cet arrêté a été affiché dans les locaux du service des impôts des entreprises, ainsi que le mentionne l'article 2 dudit arrêté. La société requérante ne conteste pas sérieusement la mention de cet arrêté. Elle ne fait état d'aucune circonstance précise pouvant laisser douter de la réalité de l'affichage dans ces conditions ni de nature à établir que le lieu d'affichage n'était pas aisément accessible au public et que l'affichage de l'arrêté a été postérieur à la date à laquelle l'avis de mise en recouvrement est devenu exécutoire. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que la publicité d'une délégation de signature consentie par un comptable public en application des dispositions précitées de l'article L. 257 A du livre des procédures fiscales soit effectuée par voie de publication. Ainsi, cet affichage a constitué, compte tenu de la nature et de l'objet de la décision en cause, une mesure de publicité suffisante. Dans ces conditions, l'agent ayant signé l'avis de mise en recouvrement doit être regardé comme ayant bénéficié d'une délégation de signature régulière ayant fait l'objet d'une publicité suffisante. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'avis de mise en recouvrement doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
5. L'administration a estimé que la SCI Toes Investissements avait minoré ses recettes au titre de l'année 2005 résultant de la vente de trente-huit parcelles de terrain à hauteur de 308 000 euros correspondant au versement par chaque acquéreur de ces parcelles, en complément du prix notarié de 113 000 euros, de la somme de 8 000 euros en espèces. L'administration a donc réintégré dans le chiffre d'affaires de la société la somme de 308 000 euros au titre de l'exercice clos en 2005.
6. Les constatations de fait qui sont le support nécessaire d'un jugement définitif du juge pénal s'imposent au juge de l'impôt. Par un arrêt du 25 février 2015, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par M. B..., gérant de la SCI Toes Investissements, à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 3 décembre 2013, confirmant les motifs du jugement du 12 septembre 2012 du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence statuant en matière correctionnelle, le condamnant à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d'amende, pour complicité de corruption passive. La Cour de cassation a relevé qu'il résultait de l'arrêt de la cour d'appel que les membres de la société Construction Services, chargée de commercialiser des lots de terrains et de réaliser le gros oeuvre des constructions à édifier, ont sollicité et obtenu de chaque acquéreur de parcelles le règlement en espèces d'une somme de 8 000 euros, conditionnant la conclusion de la vente, et ont été définitivement déclarés coupables de corruption passive. Elle a également retenu que M. B... a participé à la corruption mise en oeuvre en décidant que des pots-de-vin seraient perçus lors de la vente de chacun des lots et en subordonnant l'attribution à la société Constructions Services de la commercialisation des parcelles à la condition que les membres de cette société acceptent de collecter les sommes fixées. Le juge pénal a ainsi constaté que chaque acquéreur des parcelles avait versé en espèces une somme de 8 000 euros. La société requérante n'est, ainsi, pas fondée à soutenir qu'il n'est pas démontré que chaque lot vendu aurait fait l'objet du versement en espèces d'une somme de 8 000 euros, au motif que seule une partie des acquéreurs aurait été auditionnée dans le cadre de la procédure judiciaire et aurait déclaré avoir versé ces compléments de prix en espèces. Par suite, et alors même que le gérant de la société requérante a toujours nié avoir participé à ces agissements, c'est à bon droit que l'administration a réintégré ces dissimulations de recettes résultant de la vente de trente-huit parcelles de terrain, à hauteur de 308 000 euros, dans le résultat imposable à l'impôt sur les sociétés de la SCI Toes Investissements au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2005.
Sur l'application de la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses :
7. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / (...) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) ". Les pénalités pour manoeuvres frauduleuses ont pour objet de sanctionner des agissements destinés à égarer ou à restreindre le pouvoir de contrôle de l'administration.
8. En relevant que la SARL Toes Investissement a minoré intentionnellement ses recettes en ne déclarant pas les versements en espèce à hauteur de 8 000 euros pour chaque lot de terrain vendu et en mettant en place un mécanisme destiné à masquer ses agissements répréhensibles, l'administration établit l'existence d'agissements destinés à égarer ou restreindre l'exercice de son pouvoir de contrôle. L'administration était, dès lors, en droit d'assortir les droits litigieux de la majoration de 80 % prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvres frauduleuses.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI Toes Investissements n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles relatives aux entiers dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SCI Toes Investissements est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Toes Investissements et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2021, où siégeaient :
- Mme Bernabeu, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme D... et Mme E..., premières conseillères.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 juin 2021.
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N° 19MA04388
mtr