Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 20 janvier 2014 et deux mémoires complémentaires enregistrés le 11 septembre 2014 et le 31 mars 2015, M. et Mme C..., représentés par le cabinet Belnet, agissant par MeD..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 26 novembre 2013 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les premiers juges ont commis une erreur d'appréciation des faits et entaché leur jugement d'une contradiction de motifs ;
- leurs difficultés financières étaient réelles et il leur était impossible de se libérer dans les délais prévus au contrat de leur dette de loyer ; afin de permettre le maintien dans les lieux de son locataire, la SCI Parmis leur a consenti ce que le tribunal a justement qualifié de différé de paiement sans tirer toutefois les conséquences de cette qualification ;
- l'annulation d'une dette est incompatible avec un différé de son règlement ; la SCI Parmis ne peut être regardée comme ayant abandonné les loyers en cause dès lors que sa créance se retrouve au bilan ; ils établissent l'absence d'une prétendue libéralité.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 juin 2014 et le 4 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'absence d'encaissement des loyers à leur date d'échéance par le bailleur procède d'un acte de disposition constitutif d'une libéralité au bénéfice du preneur sauf pour le bailleur à justifier qu'il était conforme à son propre intérêt de consentir des facilités au preneur ;
- les requérants n'établissent pas les difficultés de trésorerie qui justifieraient l'absence d'encaissement des loyers ;
- l'absence d'encaissement des loyers par le bailleur procède, dès lors, d'un acte de disposition constitutif d'une libéralité consentie au locataire.
Un mémoire du ministre des finances et des comptes publics a été enregistré le 14 octobre 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Markarian,
- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,
- et les observations de Me B... de la société d'avocats Fidal, pour M. et Mme C....
1. Considérant que M. C... exerce la profession d'avocat dans des locaux qu'il prend en location à la SCI Parmis, qui est détenue à hauteur de 95 % des parts par la SCI Espace dont M. C... détenait 95 % des parts en 2007 et la totalité en 2008 et 2009, et à hauteur des 5 % restants par M. C... ; qu'à la suite d'un contrôle sur pièces des déclarations de la SCI Parmis et de M. et Mme C... portant sur les années 2007 à 2009, l'administration fiscale a procédé, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, à la réintégration aux résultats fonciers des années 2007 et 2009 des loyers non réglés dans les recettes déclarées par la SCI Parmis et, conformément aux dispositions de l'article 8 du code général des impôts, a procédé également à des rehaussements des cotisations primitives d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux de M. et Mme C..., qui les ont contestés à l'appui de leurs observations adressées en réponse à la proposition de rectification qui leur a été notifiée le 9 décembre 2010 ; que les impositions supplémentaires en litige, assorties de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts concernant l'impôt sur le revenu des années 2007 et 2009, ont été maintenues à l'encontre de M. et Mme C... et mises en recouvrement ; que M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 26 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 28 du code général des impôts : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété " et qu'aux termes de l'article 29 du même code : " (...) le revenu brut des immeubles ou parties d'immeubles donnés en location, est constitué par le montant des recettes brutes perçues par le propriétaire, augmenté du montant des dépenses incombant normalement à ce dernier et mises par les conventions à la charge des locataires. Les subventions et indemnités destinées à financer des charges déductibles sont comprises dans le revenu brut. Il n'est pas tenu compte des sommes versées par les locataires au titre des charges leur incombant. (...) " ;
3. Considérant que, s'agissant de revenus fonciers procédant de loyers dont le paiement n'a pas été effectué au bailleur, il appartient à l'administration fiscale lorsque, comme en l'espèce, le contribuable a refusé les rectifications, d'établir que l'absence d'encaissement des loyers procède d'un acte de disposition constitutif d'une libéralité au bénéfice du preneur ;
4. Considérant qu'il est constant que le montant des loyers encaissés par la SCI Parmis de la part de M. C... s'est élevé à 6 000 euros en 2007 et à 15 000 euros en 2009 alors que le bail conclu le 2 janvier 2006 entre les deux parties a fixé le loyer annuel à 30 000 euros, auquel devaient s'ajouter les charges et impôts fonciers ; que la SCI Parmis n'a engagé aucune démarche envers M. C... en vue de recouvrer les loyers impayés, le bailleur et le preneur étant en l'espèce la même personne, et doit être regardée comme ayant consenti, durant les années 2007 et 2009, à la renonciation d'une partie des loyers dus, soit 24 000 euros en 2007 et 15 000 euros en 2009 ; que cette renonciation ne nécessite ni action explicite ni réalisation d'un acte juridique particulier contrairement à ce que soutiennent les requérants ;
5. Considérant que si les requérants soutiennent que cette renonciation à percevoir une fraction des loyers prévus au contrat de bail était justifiée par les difficultés de trésorerie de M. C..., son entreprise était bénéficiaire au titre des années 2007 et 2009 ainsi que le relève l'administration fiscale, qui a pu, à bon droit, estimer que l'intéressé avait privilégié le remboursement de crédits souscrits pour la prise à bail de véhicules de marque Porsche et Lexus de manière prioritaire au règlement des loyers, que l'entreprise de M. C... était à même de régler ; qu'à cet égard, si les requérants soutiennent que les revenus du foyer ne permettaient pas de faire face aux dépenses et notamment au paiement de son impôt sur le revenu, les extraits du compte bancaire professionnel de M. C... produits à l'instance, qui reprennent au demeurant des crédits supérieurs aux débits, comme la circonstance que M. C... aurait contracté des prêts personnels durant les années 2007 et 2009 ne permettent pas pour autant d'établir la situation financière globale du foyer fiscal des requérants et d'apprécier les difficultés réelles de trésorerie ;
6. Considérant qu'alors même que M. C... aurait procédé à des règlements différés des loyers non réglés, il ne résulte pas de l'instruction que les dettes de loyers dus au titre des années 2007 et 2009, aient pour autant été totalement apurées, l'administration soutenant d'ailleurs sans être contredite que le cumul des loyers non réglés, résultant de cette pratique du différé de paiement, s'élevait en 2010, pour les années 2006 à 2009, à 51 096 euros ; que M. C..., qui ne justifie pas de la date et du montant des règlements effectués de manière différée, ne peut soutenir que son épouse et lui-même feraient l'objet d'une double imposition dès lors qu'en tout état de cause, comme le souligne le ministre, un remboursement serait imputé sur les créances antérieures à celles en litige conformément aux dispositions, dont les requérants estiment à tort pouvoir se prévaloir, de l'article 1256 du code civil ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que l'abandon de loyer consenti à M. C... par la SCI Parmis constitue une libéralité dont l'intéressé a bénéficié ; que c'est par suite à bon droit que le service a réintégré le montant des loyers non perçus pour la détermination du revenu brut foncier de M. et Mme C... au titre des années 2007 et 2009 à hauteur de la quote-part des droits de M. C... dans la SCI Parmis et la SCI Espace ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées par voie de conséquence leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... C...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré à l'issue de l'audience du 21 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bédier, président de chambre,
- Mme Paix, président assesseur,
- Mme Markarian, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 février 2016.
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N° 14MA00429 3