Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juillet 2016 et le 10 février 2017, la SAS Espuna, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 12 mai 2016 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;
- la valeur locative de ses immeubles ne peut pas être déterminée selon la méthode prévue pour des immobilisations industrielles.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SAS Espuna ne sont pas fondés.
Par une ordonnance n° 16MA02777 du 2 mars 2017, le président de la cour administrative de Marseille a renvoyé au Conseil d'Etat les conclusions de la requête de la SAS Espuna en tant qu'elles concernent sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe foncière sur les propriétés bâties à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Ouillon,
- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., substituant Me B..., représentant la SAS Espuna.
Une note en délibéré présentée par la SAS Espuna a été enregistrée le 31 mars 2017.
1. Considérant que la SAS Espuna, qui exerce une activité de fabrication et de vente d'équipements de protection individuelle, relève appel du jugement du 12 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle et de cotisation foncière des entreprises auxquelles elle a été assujettie respectivement au titre de l'année 2009 et des années 2010 à 2012 dans les rôles de la commune de Lézignan-Corbières dans le département de l'Aude ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la cotisation foncière des entreprises de l'année 2010 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales : " La procédure de rectification contradictoire n'est pas applicable : 1° En matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales ou d'organismes divers, à l'exclusion de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 57 du même livre : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) " et que le deuxième alinéa du I de l'article 1640 B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 2 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, dispose que : " Les impositions à la cotisation foncière des entreprises établies au titre de l'année 2010 sont perçues au profit du budget général de l'Etat " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que la procédure de redressement contradictoire est applicable aux rectifications apportées en matière de cotisation foncière des entreprises établie au titre de l'année 2010, qui n'est pas perçue au profit des collectivités locales ;
3. Considérant que, s'agissant des rectifications relatives à la cotisation foncière des entreprises établie au titre de l'année 2010, la proposition de rectification du 4 décembre 2012 adressée à la société requérante mentionne l'impôt concerné, l'année d'imposition, le montant des rectifications opérées et leur fondement juridique ; qu'elle énonce également les motifs pour lesquels le service a calculé la valeur locative de ses immeubles sur le fondement des dispositions de l'article 1499 du code général des impôts ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification ne peut qu'être écarté ;
En ce qui concerne la taxe professionnelle de l'année 2009 et les cotisations foncières des entreprises des années 2011 et 2012 :
4. Considérant que, lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle ou la cotisation foncière des entreprises, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations ; que les dispositions de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles la procédure de redressement contradictoire prévue par les articles L. 55 à L. 61 de ce livre n'est pas applicable en matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales, ont pour seul effet d'écarter cette procédure de redressement contradictoire mais ne dispensent pas du respect, en ce qui concerne la taxe professionnelle et la cotisation foncière des entreprises, des obligations qui découlent du principe général des droits de la défense ;
5. Considérant que l'administration a informé la société requérante qu'elle envisageait de rehausser les bases d'imposition à la taxe professionnelle de l'année 2009 et à la cotisation foncière des entreprises des années 2011 et 2012 par la proposition de rectification du 4 décembre 2012, mentionnée au point 3, qui précisait la nature et les motifs des rectifications ainsi que le montant des bases rectifiées et invitait la société à présenter ses observations dans un délai de trente jours ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des obligations découlant du principe général des droits de la défense doit être écarté ;
Sur le bien-fondé des impositions :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 1499 du code général des impôts : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) " ; que revêtent un caractère industriel, au sens de ces articles, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ;
7. Considérant que la SAS Espuna exerce dans ses locaux situés sur la commune de Lézignan-Corbières une activité de fabrication de gants et de vêtements de protection ainsi qu'une activité de négoce de produits de même nature ; que, pour l'exercice de son activité de fabrication, elle dispose au sein de cet établissement d'ateliers ainsi que d'un espace de stockage notamment pour les matières premières et met en oeuvre des appareils de découpe des peaux, une machine de pesage et de nombreuses machines à coudre pour l'assemblage des peaux dont la valeur brute totale s'élève à 281 648 euros ; qu'ainsi, et sans qu'il y ait lieu de rapporter la valeur de ces matériels et outillages à la valeur totale des immobilisations de l'établissement, les installations de fabrication nécessitent la mise en oeuvre d'importants moyens techniques jouant un rôle prépondérant dans l'activité exercée par la SAS Espuna au sein de l'immeuble à évaluer et quelle que soit l'importance du chiffre d'affaires réalisé au titre de cette activité de fabrication par rapport au chiffre d'affaires global de la société ; que, de ce fait, l'établissement en cause présente un caractère industriel au sens des dispositions de l'article 1499 du code général des impôts ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a déterminé la valeur locative des locaux appartenant à la société requérante selon la méthode d'évaluation définie à cet article ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Espuna n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS Espuna est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Espuna et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2017, où siégeaient :
- M. Bédier, président,
- Mme Paix, président assesseur,
- M. Ouillon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 avril 2017.
N° 16MA02777 5