Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2019, Mme D..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice du 19 août 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de réexaminer sa situation au regard du droit au séjour dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté est entaché d'un défaut d'examen de la demande de séjour qu'elle a adressée au préfet des Alpes-Maritimes sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, après le rejet de sa demande par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ;
- il est insuffisamment motivé, en l'absence notamment de motivation relative à cette demande complémentaire ;
- le préfet ne pouvait prendre une mesure d'éloignement sans examiner la demande de titre dont il était saisi sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les observations de Me B..., représentant Mme D....
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante albanaise née le 21 mars 1992, a présenté une demande de réexamen dans le cadre de l'asile qui a fait l'objet d'une décision de rejet prise par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 20 novembre 2018 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 27 mars 2019. Elle fait appel du jugement du 19 août 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2019 du préfet des Alpes-Maritimes qui, à la suite de cette décision de la CNDA, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel cette obligation pourra être exécutée d'office.
2. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la décision de la CNDA, Mme D... a demandé au préfet des Alpes-Maritimes, par un courrier du 24 mai 2019 reçu le 29 mai 2019, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale, notamment du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à son état de santé. Le préfet des Alpes-Maritimes n'établit pas ni même n'allègue que cette demande, faite par courrier et pour laquelle ne s'appliquaient pas les dispositions de l'article L. 311-6 du même code dans leur rédaction issue de la loi du 10 septembre 2018 précédemment visée, n'aurait pas été présentée conformément aux dispositions de l'article R. 311-1 qui autorisent le préfet à prescrire " que les demandes de titre de séjour appartenant aux catégories qu'il détermine soient adressées par voie postale ". Il ressort des pièces du dossier, notamment de la motivation de l'arrêté du 20 juin 2019, que le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas examiné cette demande dont il était régulièrement saisi depuis le 29 mai 2019. Par suite, il ne pouvait prononcer à l'encontre de Mme D... une obligation de quitter le territoire français, en se bornant, sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à tirer les conséquences du rejet de sa demande d'asile.
3. Il résulte de ce qui précède que Mme D... est fondée soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
4. Aucun des autres moyens invoqués par la requérante qui aurait été de nature à justifier qu'il soit enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " n'étant fondé, il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de n'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes que de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation sur le fondement de la demande dont il est saisi, dans le délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 1 000 euros à verser à Mme D... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 août 2019 et l'arrêté du 20 juin 2019 du préfet des Alpes-Maritimes sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme D... et, dans le délai de trois mois suivant la notification du présent arrêt, de réexaminer sa situation au regard du droit au séjour.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2020, où siégeaient :
- Mme C..., présidente de la Cour,
- M. A..., président assesseur,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.
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N° 19MA04381
nc