Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 décembre 2019 et le 11 juin 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 novembre 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 juillet 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à titre subsidiaire, de procéder, dans le délai d'un mois, au réexamen de sa demande et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Il soutient que :
- le préfet a commis une erreur de droit en lui opposant l'absence de visa de long séjour pour rejeter sa demande de titre de séjour ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation ;
- l'arrêté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire, enregistré le 25 septembre 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Le préfet s'en remet à ses écritures produites en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant pakistanais né le 1er décembre 1994, est selon ses déclarations entré en France le 30 octobre 2015. Il s'est marié le 29 décembre 2018 avec une ressortissante de nationalité française et a demandé, le 2 avril 2019, son admission au séjour en qualité de conjoint de français. Par un arrêté du 20 juillet 2019, le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. M. B... relève appel du jugement du 13 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. (...) ". L'article L. 313-2 du même code dispose que : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. (...) ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 de ce code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ".
3. Si ces dispositions subordonnent la délivrance de la carte de séjour " vie privée et familiale " au conjoint d'un ressortissant français à la condition d'être en possession d'un visa de long séjour, elles n'impliquent pas que celui-ci fasse l'objet d'une demande expresse distincte de la demande du titre de séjour sollicitée auprès de l'autorité préfectorale, compétente pour procéder à cette double instruction. La délivrance d'un visa de long séjour demeure toutefois subordonnée au respect des conditions auxquelles cette délivrance est soumise, parmi lesquelles figure l'entrée régulière sur le territoire français.
4. M. B... ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français. Dans ces conditions, le préfet pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées, lui refuser, pour ce motif, la délivrance sur place d'un visa de long séjour et, par conséquent, lui opposer l'absence de visa de long séjour pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français, qui est subordonnée à la présentation d'un tel visa. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet n'aurait pas procédé, au vu des éléments en sa possession, à un examen complet de sa situation.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui serait selon ses déclarations arrivé en France en 2015, a épousé, le 29 décembre 2018, Mme A..., ressortissante française. Toutefois, cette union est très récente à la date de l'arrêté contesté et il n'est pas justifié d'une communauté de vie antérieurement au mariage. En outre, M. B..., qui n'a pas exécuté une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 7 août 2017, n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. Si le couple a eu un enfant, le 16 mai 2020, cette naissance est postérieure à la date de l'arrêté contesté. Eu égard au caractère récent du mariage et de la paternité du requérant, à la durée et aux conditions de son séjour en France, l'arrêté en litige ne saurait être regardé comme portant au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, l'arrêté contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....
7. En troisième lieu, ni la durée du séjour de M. B... en France ni les éléments caractérisant sa situation personnelle et familiale, exposés au point précédent, ne sont de nature à démontrer l'erreur manifeste d'appréciation qui aurait été commise par le préfet de l'Hérault dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de régularisation.
8. Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées, de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
9. M. B... ne peut utilement se prévaloir de ces stipulations à l'encontre de l'arrêté contesté, dès lors qu'il n'avait pas d'enfant à la date où il a été pris, sa fille étant née le 16 mai 2020.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'allocation de frais liés à l'instance doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2020, où siégeaient :
- Mme F..., présidente de la Cour,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme E..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 octobre 2020.
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N° 19MA05389
nc