Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 juillet 2018 et le 23 septembre 2019, la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 mai 2018 ;
2°) de prononcer la réduction des impositions en litige ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la surface pondérée totale de 4 254 m² retenue par l'administration, déterminée par application des coefficients du local-type, est erronée alors que la déclaration " CBD " souscrite le 24 novembre 2015 fait état d'une superficie de 1 070 m² pour l'hôtel " Ibis " et de 2 342 m² pour l'hôtel " Novotel " ;
- les superficies consacrées aux activités accessoires doivent être affectées de coefficients de 0,5 et 0,1 ;
- elle est fondée à se prévaloir des énonciations de la doctrine référencée BOI-IF-TFB-20-10-30-30 n° 300.
- un abattement de 30 % sur le tarif unitaire doit être appliqué aux locaux exploités sous l'enseigne " Ibis " en application de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes, qui exploite à Rivesaltes deux établissements hôteliers sous l'enseigne " Novotel " et " Ibis ", relève appel du jugement du 28 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe spéciale d'équipement et de la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2016 dans les rôles de la commune de Rivesaltes.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Il résulte des dispositions des articles 1467, 1607 bis et 1600 du code général des impôts que les cotisations à la taxe spéciale d'équipement, à la cotisation foncière des entreprises, et à la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises qui constitue l'une des deux composantes de la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie, sont calculées sur la base de la valeur locative des biens calculée dans les conditions prévues par les articles 1494 et suivants du code général des impôts. Aux termes de l'article 1498 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / (...) 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel (...) ". Le I de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts alors en vigueur dispose que : " L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. (...) ". Enfin, l'article 324 AA de l'annexe III au même code alors en vigueur dispose que : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ". Lorsque, pour arrêter la valeur locative de l'immeuble à évaluer, l'administration, faisant application de la méthode par comparaison, retient valablement un local-type inscrit au procès-verbal des opérations de révision foncière d'une commune, il lui appartient, par application du coefficient prévu à l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, d'ajuster la valeur locative afin de tenir compte des différences entre le terme de comparaison et l'immeuble à évaluer.
3. En premier lieu, l'administration a calculé les cotisations litigieuses après avoir pris en compte les surfaces des locaux résultant des déclarations successivement souscrites par le propriétaire en 1977, en 2005 et en 2009. Pour contester les surfaces retenues par l'administration, la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes se prévaut de sa nouvelle déclaration de locaux commerciaux et biens divers (CBD) déposée le 24 novembre 2015. Toutefois, cette déclaration, imparfaitement renseignée, porte la seule indication des surfaces pondérées de 1 070 et 2 342 m2 revendiquées dans la présente instance. La SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes, qui ne justifie pas de l'exactitude des surfaces déclarées, n'est pas fondée à demander que soit retenue une surface moindre des locaux.
4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que l'immeuble appartenant à la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes, construit en 1974 et exploité à l'origine sous la seule enseigne " Novotel " d'une capacité de quatre-vingt-six chambres, a été scindé au cours de l'année 2005 en deux établissements " Novotel " et " Ibis ", dotés de capacités respectives de cinquante-six et trente chambres et a fait l'objet de travaux d'agrandissement en 2009. En application des dispositions des articles 324 AA et 324 Z de l'annexe III au code général des impôts, la valeur locative des locaux litigieux a été déterminée en retenant comme terme de comparaison l'établissement le " Grand Hôtel de Sète ", référencé sous le n° 6 du procès-verbal 6670 ME de la commune de Sète et en appliquant des coefficients de pondération aux différents éléments les composant afin de tenir compte des différences de commercialité de ceux-ci en fonction de leur affectation et de leur emplacement. Le service a ainsi appliqué aux différents éléments des locaux à évaluer une pondération de 1 pour les chambres, qui constituent l'usage principal du local à évaluer et du local pris comme terme de comparaison. Il a retenu le même coefficient pour le restaurant et le bar, celui de 0,5 pour les bureaux, dégagements, salles de réunion, salons, réception, hall, cuisine office, dépôts, réserves, sanitaires et piscine, et celui de 0,1 pour les aires de stationnement, le sous-sol et un local abritant un transformateur. Il ne résulte pas de l'instruction que ces coefficients ne traduiraient pas les valeurs d'utilisation et de commercialité de ces différentes parties, ni que ceux proposés par la société requérante, qui seraient " usuellement pratiqués ", seraient plus adaptés.
5. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que l'administration a calculé les cotisations litigieuses en appliquant le tarif de 8,44 euros par m² qui résulte des énonciations de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 13 mars 2012 devenu définitif et portant sur le même immeuble. Ce tarif fait référence au local-type n° 6, ajusté par l'application d'un abattement de 10 % pour tenir compte de la différence de surface, d'une majoration de 5 % au titre des facilités de stationnement, et d'une majoration de 20 % pour la différence de situation entre ces deux hôtels, soit au total une majoration de 15 %. La société appelante revendique un tarif minoré de 30 % au bénéfice de la partie exploitée sous l'enseigne " Ibis " pour tenir compte de sa situation géographique, des aménagements " plus luxueux " du local-type et du tarif de la nuitée. Toutefois, s'agissant de la différence de situation entre les hôtels, le " Grand Hôtel de Sète " est un hôtel de villégiature situé au centre-ville, alors que l'ensemble hôtelier " Novotel " et " Ibis " sont des hôtels d'étape, placés à proximité d'une sortie d'autoroute, du centre d'activité du Polygone Nord, d'une zone commerciale et de l'aéroport de Perpignan-Rivesaltes, bénéficiant ainsi d'une fréquentation régulière. Par ailleurs, il n'est établi aucun changement, relatif notamment à l'aménagement ou aux dépendances des locaux par rapport au terme de comparaison, de nature à fonder un ajustement différent de celui qui a été appliqué. En outre, le tarif de la nuitée n'est pas de nature à justifier l'application d'un ajustement sur le tarif du local-type, eu égard aux critères prévus par l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts. Enfin, si la société appelante fait valoir que la partie exploitée sous l'enseigne " Ibis " n'est pas classée avec le même nombre d'étoiles, pratique des tarifs sensiblement différents et n'offre pas le même niveau de prestations et d'aménagement que les locaux exploités sous l'enseigne " Novotel ", toutefois, les dispositions de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts prévoient un ajustement de la valeur locative afin de tenir compte des différences de situation et d'aménagement pouvant exister entre les locaux à évaluer et le local-type retenu comme terme de comparaison. La SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes n'est donc pas fondée à demander l'application d'un tel ajustement à raison des seules différences existant entre les deux locaux à évaluer ni à soutenir que la valeur locative des locaux retenue par l'administration est erronée.
En ce qui concerne l'application de la doctrine :
6. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. ".
7. Les énonciations de la doctrine administrative référencée BOI-IF-TFB-20-10-30-30 ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application ci-dessus. La SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes n'est donc pas fondée à s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit à verser à la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Motel Perpignan Nord Rivesaltes est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Motel Perpignan Nord Rivesaltes et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2019, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. Barthez, président assesseur,
- Mme B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 octobre 2019.
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N° 18MA03615
nc