M. A... C...a, d'autre part, demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les deux arrêtés du 27 janvier 2015 par lesquels le préfet de l'Hérault, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en fixant le pays de destination, et d'autre part, l'a placé en rétention administrative.
Par un jugement n° 1500430 du 30 janvier 2015, le magistrat délégué du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 20 juin 2014 sous le n° 14MA02739, M. C..., représenté par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1400100 du 14 mars 2014, du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 24 octobre 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sa requête ne pouvait être rejetée par voie d'ordonnance sur le fondement de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative ;
- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence et méconnaît les articles 6-1 et 6-5 de l'accord franco-algérien, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- le refus de séjour est entaché d'une erreur de fait, car il vit avec sa compagne et ses enfants ;
- la décision qui fixe le délai de départ est insuffisamment motivée, au regard des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la directive n° 2008/115/CE ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit, le préfet s'estimant lié par le délai de trente jours ;
- la décision qui prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'erreur de droit au regard des critères définis par l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 6 février 2015 sous le n° 15MA00483, M. C..., représenté par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500430 du 30 janvier 2015 du magistrat délégué du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler les arrêtés préfectoraux du 27 janvier 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire : elle est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;
- le préfet a méconnu les stipulations des articles 6-1 et 6-5 de l'accord franco-algérien et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et d'une erreur de droit ;
- en ce qui concerne la décision lui refusant un délai de départ volontaire : elle méconnaît l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
- cette décision méconnaît l'article L. 511-1-II 3) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision le plaçant en rétention est entachée d'une inexactitude matérielle et elle est injustifiée car il dispose de garanties de représentation.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 21 mai 2014 et du 16 juin 2015.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carotenuto,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant que les requêtes n° 14MA02739 et n° 15MA00483 présentées pour M. A... C..., présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que M. C..., de nationalité algérienne, né en 1969, relève appel par la requête n° 14MA02739 de l'ordonnance rendue le 14 mars 2014 par le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 octobre 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre au séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que M. C... relève également appel par la requête n° 15MA00483 du jugement du 30 janvier 2015 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 27 janvier 2015 par lesquels le préfet de l'Hérault, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en fixant le pays de destination, et d'autre part, l'a placé en rétention administrative ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant que si M. C... est entré régulièrement en France en 2002, il ne justifie cependant d'une résidence habituelle en France que depuis 2005 ; qu'il ressort en effet des pièces du dossier et en particulier de l'arrêté contesté du 24 octobre 2014 qu'il s'est marié le 19 août 2005 à Montpellier avec une ressortissante française ; qu'il a obtenu un titre de séjour en qualité de conjoint de français, dont le refus de renouvellement a été annulé par le tribunal administratif de Montpellier par un jugement du 1er juillet 2008 ; que s'il est séparé de son épouse depuis 2009, il ressort toutefois des pièces du dossier que le centre de sa vie familiale est en France dès lors qu'il y vit avec Mme B...D..., de nationalité marocaine, titulaire d'une carte de résident et avec laquelle il a eu deux enfants, Fadila et Maria, nées en France les 26 septembre 2007 et 15 juin 2012, la compagne de M. C... étant également la mère d'un enfant français mineur, E..., né en 2003 d'une précédente union, dont elle a la charge ; qu'il ressort de l'acte de naissance de MariaC..., née le 15 juin 2012, que le requérant, vivait à cette date à la même adresse que Mme D... ; qu'il justifie par la production d'une attestation en date du 3 février 2012 de la directrice de l'école fréquentée par sa fille Fadila, s'occuper régulièrement de celle-ci ; que pareillement, il ressort d'une attestation de la directrice de l'école élémentaire Jean Jaurès de Montpellier que M. C... a pris régulièrement en charge le jeune E...durant les années scolaires 2010/2011 à 2012/2013 ; que par suite, eu égard à l'importance des attaches familiales que M. C... a sur le territoire national, à la situation régulière de sa compagne et à leurs deux enfants nés tous deux en France, et alors même qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, le requérant est fondé à soutenir que les arrêtés contestés ont été pris en méconnaissance des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que par suite, l'arrêté litigieux du 24 octobre 2013, qui rejette la demande de séjour de l'appelant et lui fait obligation de quitter le territoire français, ainsi que l'arrêté du 27 janvier 2015 qui lui fait obligation de quitter le territoire français sans délai doivent être annulés ; que par voie de conséquence, l'arrêté plaçant l'intéressé en rétention administrative est également entaché d'illégalité ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité de l'ordonnance attaquée et les autres moyens des requêtes, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que par l'ordonnance et le jugement attaqués, le président de la 3ème chambre et le magistrat désigné du tribunal administratif de Montpellier ont rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
6. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard à ses motifs, et dès lors qu'il n'est pas allégué et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un changement de droit ou de fait y fasse obstacle, que le préfet de l'Hérault délivre à M. C... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer ce titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant que M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Ruffel, avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Ruffel d'une somme de 1 800 euros au titre des deux requêtes jugées ci-dessus ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du 14 mars 2014 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 24 octobre 2013 sont annulés.
Article 2 : Le jugement du 30 janvier 2015 du magistrat délégué du tribunal administratif de Montpellier et les arrêtés du préfet de l'Hérault du 27 janvier 2015 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. C... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me Ruffel, avocat de M. C..., une somme de 1 800 (mille huit cents) euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au préfet de l'Hérault, à Me Ruffel et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016, où siégeaient :
- M. Martin, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code justice administrative,
- Mme Carotenuto, premier conseiller,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 février 2016.
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