M. C... E...a, d'autre part, demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2014 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par une ordonnance n° 1500066 du 23 mars 2015, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 25 novembre 2014 sous le n° 14MA04691, M. E..., représenté par Me Dessalces, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1301569 du 2 octobre 2014 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 février 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il produit de nombreuses pièces attestant de sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans et de ses attaches familiales en France ;
- sa requête ne pouvait être rejetée par ordonnance en application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;
- le préfet de l'Hérault était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il a établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France aux côtés de sa famille et ce, depuis plus de dix ans ;
- il est marié depuis 2006 avec une ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il a eu trois enfants nés en France en 2008, 2012 et 2013 ;
- il détient une promesse d'embauche ;
- l'article L. 313-11-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 5 mai 2015 sous le n° 15MA01899 et un mémoire enregistré le 23 décembre suivant, M. E..., représenté par Me Dessalces demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1500066 du 23 mars 2015, du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 20 novembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les moyens qu'il a soulevés à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté en litige et, en particulier celui tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, étaient non seulement exprimés en termes clairs mais surtout confortés par de nombreuses pièces versées au débat ;
- sa requête ne pouvait être rejetée par ordonnance en application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et relevait de la compétence du tribunal administratif statuant en forme collégiale ;
- il produit de nombreuses pièces attestant de sa présence habituelle en France depuis plus de dix ans et de ses attaches familiales en France ;
- il a fixé le centre de ses intérêts personnels et familiaux en France ;
- le préfet de l'Hérault était tenu de saisir la commission du titre de séjour ;
- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il est marié depuis 2006 avec une ressortissante marocaine titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il a eu trois enfants nés en France en 2008, 2012 et 2013 ;
- il détient une promesse d'embauche ;
- l'article L. 313-11-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 décembre 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 13 janvier 2015 et du 9 juillet suivant.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carotenuto,
- et les observations de Me B..., représentant M. E..., requérant.
1. Considérant que les requêtes n° 14MA04691 et n° 15MA01899 présentées pour M. C... E..., présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
2. Considérant que M. E..., de nationalité marocaine né en 1977, relève appel par requête enregistrée sous le n° 14MA04691 de l'ordonnance rendue le 2 octobre 2014 par le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2013 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre au séjour ; que M. E... relève également appel, par requête enregistrée sous le n° 15MA01899 de l'ordonnance rendue le 23 mars 2015 par le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2014 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de l'admettre au séjour ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de procéder à l'éloignement d'un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure d'éloignement, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;
5. Considérant que M. E... est entré régulièrement en France en 1999 ; que s'il ne peut être regardé comme justifiant d'une résidence habituelle en France depuis cette date dès lors qu'il bénéficiait en particulier d'un titre de séjour espagnol valable du 28 décembre 2010 au 23 octobre 2015, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il s'est marié en 2006 au Maroc avec Mme A...D..., de nationalité marocaine, titulaire d'une carte de résident, avec laquelle il a eu trois enfants, nés en France les 28 avril 2008, 5 janvier 2012 et 26 juillet 2013 et qu'eu égard à divers courriers administratifs produits, comportant l'adresse du couple, la réalité d'une vie commune avec son épouse est établie depuis le mois de juin 2011 ; que par suite, compte tenu de l'ensemble de ces éléments et alors même que le requérant pourrait bénéficier de la procédure de regroupement familial, celui-ci est fondé à soutenir que les arrêtés contestés ont été pris en méconnaissance des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité des ordonnances en litige ainsi que les autres moyens des requêtes, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que par les ordonnances attaquées, les présidents de la 2ème et de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier ont rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
7. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard à ses motifs, et dès lors qu'il n'est pas allégué et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un changement de droit ou de fait y fasse obstacle, que le préfet de l'Hérault délivre à M. E... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer ce titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que M. E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dessalces, avocat de M. E..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dessalces de la somme de 1 800 euros au titre des deux requêtes jugées ci-dessus ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du 2 octobre 2014 du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 8 février 2013 sont annulés.
Article 2 : L'ordonnance du 23 mars 2015 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 20 novembre 2014 sont annulés.
Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. E... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Me Dessalces, avocat de M. E..., la somme de 1 800 (mille huit cents) euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., à Me Dessalces, au préfet de l'Hérault et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 19 janvier 2016, où siégeaient :
- M. Martin, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code justice administrative,
- Mme Carotenuto, premier conseiller,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 février 2016.
''
''
''
''
2
N° 14MA04691, 15MA01899