Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 mars 2017 et le 31 octobre 2017, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 mars 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 30 janvier 2017 ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le premier juge n'a pas statué dans le délai de quinze jours qui lui était imparti ;
- l'Etat français aurait dû se regarder comme l'Etat responsable de sa demande d'asile sur le fondement de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 ;
- l'arrêté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 26 septembre 2017 et le 1er décembre 2017, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés.
Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 22 mai 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné Mme Chevalier-Aubert, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Antonetti, président de la 4ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B..., ressortissante arménienne née en 1996, a déposé une demande d'asile auprès des services de la préfecture du Gard le 15 septembre 2016 ; qu'ayant constaté, après consultation du fichier Eurodac, que l'intéressée était déjà connue des autorités italiennes, le préfet du Gard a saisi ces dernières, en tant que responsables de l'examen de la demande d'asile de Mme B..., d'une demande de reprise en charge de l'intéressée ; qu'après leur accord, le préfet du Gard a, par arrêté du 30 janvier 2017, décidé de remettre Mme B... aux autorités italiennes ; que Mme B... relève appel du jugement du 7 mars 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant, en premier lieu, que si les dispositions de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient que le président du tribunal administratif, ou le magistrat qu'il désigne à cette fin, statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine sur le recours d'un ressortissant étranger dirigé contre une décision de transfert, ce délai n'est toutefois prescrit ni à peine de dessaisissement ni à peine de nullité du jugement ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
4. Considérant que Mme B... fait valoir qu'elle a épousé un compatriote le 6 décembre 2016, que son époux a une activité professionnelle, qu'elle est enceinte et que sa grossesse lui interdit tout déplacement ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que la communauté de vie serait antérieure au mariage, lequel a été conclu moins de deux mois avant la date de la décision attaquée, ni que la grossesse de Mme B... lui aurait interdit tout déplacement à cette date ; qu'en tout état de cause, la requérante n'établit aucun obstacle à la reconstitution de la cellule familiale à l'étranger en se bornant à produire un extrait d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés d'une entreprise individuelle créée par son époux postérieurement à la date de la décision en litige, alors que la carte de séjour temporaire de ce dernier ne lui donne pas vocation à demeurer durablement en France ; que, dans ces conditions, compte-tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision en litige n'a pas porté à son droit à mener une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée ; que, par suite le moyen tiré de ce que le préfet du Gard aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) " ; que la faculté laissée à chaque Etat membre, par l'article 17 de ce règlement, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, Mme B... ne démontre ni l'ancienneté de ses liens familiaux en France, ni que sa grossesse lui aurait interdit tout déplacement à la date de la décision attaquée ; que, dans ces conditions, le préfet a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, décider de ne pas user de la faculté d'examen de la demande de protection que lui offre l'article 17 précité du règlement du 26 juin 2013 ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que, par suite, ses conclusions présentées au titre des dispositions des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 27 février 2018, où siégeaient :
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Boyer, premier conseiller,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 mars 2018.
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N° 17MA01353