Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 2 août 2019, la commune d'Ajaccio, représentée par la SELARL Parme avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 29 mai 2019 du tribunal administratif de Bastia ;
2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Finnimo les oiseaux du paradis devant le tribunal administratif de Bastia ;
3°) de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- il ne contient pas l'analyse de l'ensemble des conclusions et mémoires des parties, contrairement à l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
- les arrêtés des 18 novembre 2015 et 5 avril 2016 ont été obtenus par fraude.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2019, la SCI Finnimo les oiseaux du paradis, représentée par Me F..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête présentée par la commune d'Ajaccio ;
2°) de mettre à sa charge la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la commune d'Ajaccio ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. E...,
- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par deux arrêtés des 18 novembre 2015 et 5 avril 2016, le maire d'Ajaccio a accordé un permis de construire et un permis de construire modificatif à la SCI Finnimo les oiseaux du paradis pour l'édification de deux immeubles d'habitation sur des parcelles cadastrées section B1, numéros 52 et 64, au lieu-dit Arbajola. Le maire d'Ajaccio a cependant prononcé le retrait des arrêtés des 18 novembre 2015 et 5 avril 2016 par un arrêté du 23 juin 2017 après avoir été saisi d'un recours gracieux le 13 juillet 2016.
2. La commune d'Ajaccio fait appel du jugement du 29 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 23 juin 2017.
Sur la régularité du jugement :
3. Contrairement à ce que soutient la commune d'Ajaccio, qui n'assortit pas ces moyens de critiques circonstanciées, le jugement attaqué est suffisamment motivé et contient l'analyse des conclusions et mémoires présentés par les parties conformément à l'article R. 741-2 du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article R.* 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; / c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. " En vertu du dernier alinéa de l'article R. 4315 du même code, la demande de permis de construire comporte l'attestation du demandeur qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article L. 424-5 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire ".
5. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis de construire vient à disposer, au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif. Enfin, si postérieurement à la délivrance du permis de construire, l'administration a connaissance de nouveaux éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procéder à son retrait sans condition de délai. La fraude est caractérisée lorsqu'il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a eu l'intention de tromper l'administration sur sa qualité pour présenter la demande d'autorisation d'urbanisme.
6. M. B..., gérant de la SCI Finnimo les oiseaux du paradis, et Mme A..., indiquant agir pour le compte de l'indivision issue de la succession de M. C... D..., ont conclu le 22 mai 2000 un acte sous seing privé prévoyant la vente des parcelles d'assiette du projet à M. B.... Une clause de cet acte prévoit de différer le transfert de propriété à la date de régularisation de la vente par un acte authentique, qui n'est jamais intervenue. La convention du 22 mai 2000 suffit pour que la SCI Finnimo les oiseaux du paradis ait qualité pour demander un permis de construire, alors même qu'elle n'est pas propriétaire des parcelles. La commune d'Ajaccio n'est par suite pas fondée à soutenir que les arrêtés des 18 novembre 2015 et 5 avril 2016 auraient ainsi été obtenus par fraude.
7. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ajaccio n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 23 juin 2017.
Sur les frais liés au litige :
8. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune d'Ajaccio le versement de la somme de 2 000 euros à la SCI Finnimo les oiseaux du paradis au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la commune d'Ajaccio sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune d'Ajaccio est rejetée.
Article 2 : La commune d'Ajaccio versera à la SCI Finnimo les oiseaux du paradis la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Ajaccio et à la SCI Finnimo les oiseaux du paradis.
Délibéré après l'audience du 31 août 2020, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. E..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 14 septembre 2020.
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No 19MA03646