Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 juillet 2015 et le 2 septembre 2016, la commune de Grasse, représentée par Me G..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 7 mai 2015 ;
2°) de rejeter la demande de première instance ;
3°) de condamner chacun des intimés à verser une somme de 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la zone en cause n'est pas d'intérêt communautaire ;
- le code général des collectivités territoriales permet le financement par la commune de projet d'intérêt communautaire ;
- des conventions permettent le financement du projet par la commune.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marcovici,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la commune de Grasse.
1. Considérant que le 21 août 2006, la communauté d'agglomération Pôle Azur Provence, dont la commune de Grasse est membre, et l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur ont conclu une convention cadre et opérationnelle pour la période 2006-2010 portant sur la définition des engagements et obligations des deux parties en vue de la mise en oeuvre d'un programme pluriannuel de maîtrise foncière et sur les modalités d'intervention de l'établissement public foncier ; que le conseil municipal de Grasse a, lors de sa séance du 3 décembre 2009, approuvé la passation d'une convention opérationnelle de maîtrise foncière en phase réalisation portant sur le site des hangars, conclue entre la commune, l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur et la communauté d'agglomération Pôle Azur Provence et a autorisé le maire à signer cette convention et tous les documents s'y rapportant ; que la commune de Grasse relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé cette délibération au motif que ladite convention faisait peser sur la commune des obligations financières relevant du champ exclusif de compétences de la communauté d'agglomération ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales : " I.-La communauté d'agglomération exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences suivantes : 1° En matière de développement économique : création, aménagement, entretien et gestion de zones d'activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire qui sont d'intérêt communautaire ; actions de développement économique d'intérêt communautaire ; 2° En matière d'aménagement de l'espace communautaire : schéma de cohérence territoriale et schéma de secteur ; création et réalisation de zones d'aménagement concerté d'intérêt communautaire ; organisation des transports urbains au sens du chapitre II du titre II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, sous réserve des dispositions de l'article 46 de cette loi ; 3° En matière d'équilibre social de l'habitat : programme local de l'habitat ; politique du logement d'intérêt communautaire ; actions et aides financières en faveur du logement social d'intérêt communautaire ; réserves foncières pour la mise en oeuvre de la politique communautaire d'équilibre social de l'habitat ; action, par des opérations d'intérêt communautaire, en faveur du logement des personnes défavorisées ; amélioration du parc immobilier bâti d'intérêt communautaire ;/ 4° En matière de politique de la ville dans la communauté : dispositifs contractuels de développement urbain, de développement local et d'insertion économique et sociale d'intérêt communautaire ; dispositifs locaux, d'intérêt communautaire, de prévention de la délinquance. (...) " ; III.-Lorsque l'exercice des compétences mentionnées aux I et II du présent article est subordonné à la reconnaissance de leur intérêt communautaire, cet intérêt est déterminé à la majorité des deux tiers du conseil de la communauté d'agglomération. Il est défini au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de l'arrêté prononçant le transfert de compétence. A défaut, la communauté d'agglomération exerce l'intégralité de la compétence transférée ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans le cadre de son projet d'agglomération et de son programme local de l'habitat, la communauté d'agglomération Pôle Azur Provence a, avec l'accord de la commune de Grasse, identifié sur le territoire de cette commune deux périmètres d'anticipation foncière, l'îlot Pôle Gare et l'îlot Martelly ; que le site des hangars, d'une superficie totale d'environ 5 600 m², correspondant aux parcelles cadastrées section BL n° 178, 151 et 246 et situées avenue Pierre Sémard à Grasse, fait partie de l'îlot Pôle Gare ; que la délibération du 3 décembre 2009 autorise la signature d'une convention par laquelle la commune de Grasse s'engage à confier à l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur la maîtrise foncière complète du site des hangars dans un objectif de requalification de ce site en logements mixtes, équipements publics et commerces, pour 30 logements en accession libre, 15 logements en accession aidée et 30 logements locatifs aidés auxquels s'ajoutent des commerces de proximité, une salle de judo, un espace activité emploi et une salle de danse ; que l'article 4 de la convention prévoit que l'étude sera réalisée à coûts partagés par la commune et la communauté d'agglomération, et que la commune en sera le maître d'ouvrage ; qu'aux termes de l'article 9 de la convention, la commune de Grasse participera, comme les autres cocontractants, au financement de l'étude pré opérationnelle nécessaire à la mise en oeuvre de l'opération ; qu'aux termes de l'article 13, si le projet engagé n'a pas abouti, la commune de Grasse ou son mandataire s'engage à racheter, dans le délai de validité de la convention, l'ensemble des biens maîtrisés par l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur ne pouvant être rétrocédés à un opérateur ;
4. Considérant que la commune est dotée d'une compétence générale sur son territoire prévue par les dispositions de l'article L. 2121-29 du même code et dispose à ce titre, et notamment, d'une compétence en matière de rénovation urbaine ; que la commune de Grasse pouvait donc s'engager, dans la convention en cause, à assurer le financement de l'aménagement du site des hangars, lequel ne relève pas de la seule compétence de la communauté d'agglomération Pôle Azur Provence, elle-même signataire de la convention en litige pour l'exercice de ses propres attributions ; que cette convention, eu égard au contenu de ses stipulations, n'a pas pour objet de confier à la commune de Grasse des tâches qui incomberait exclusivement en vertu des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales à la communauté d'agglomération, ni ne fait peser sur la commune des obligations financières découlant du champ de compétences transférées à la communauté d'agglomération ; que, par suite et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nice en se fondant sur les dispositions de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales, en votant la délibération en litige, le conseil municipal de Grasse n'a pas exercé des compétences qui auraient été transférées par les dispositions précitées à la communauté d'agglomération ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a annulé la délibération approuvant la convention tripartite ;
5. Considérant qu'il appartient à la Cour, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les moyens invoqués par les requérants en première instance, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune ;
6. Considérant qu'il est constant que le projet de convention a été communiqué aux membres du conseil municipal avant sa séance du 3 décembre 2009 ; qu'ainsi, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ses membres auraient sollicité avant la tenue du conseil des précisions ou des demandes de communication de pièces, notamment le programme pluriannuel d'intervention de l'établissement public qui était visé dans la convention, qui n'auraient pas été satisfaites, le moyen tiré du défaut d'information des membres du conseil municipal ne peut qu'être écarté ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article 5.1 de la convention approuvé par la délibération du 9 décembre 2009 : " La commune de GRASSE a, par délibération du conseil municipale en date du 26 juin 2009, délégué globalement le droit de préemption à l'EPF.PACA sur l'ilot Pôle Gare conformément aux dispositions des articles L. Z10-1, L. 213-3, L. 211-4 dernier alinéa, L.J00-1, L.J00-4 et L. 321·1 du Code de l'Urbanisme. / A ce titre, la commune de Grasse, restant le guichet unique du dépôt des DIA conformément à l'article R. 213-5 du code de l'urbanisme, transmet à l'EPF PACA toutes les DIA concernant ce secteur dès réception. " ; qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code de l'urbanisme : " Lorsque la commune fait partie d'un établissement public de coopération intercommunale y ayant vocation, elle peut, en accord avec cet établissement, lui déléguer tout ou partie des compétences qui lui sont attribuées par le présent chapitre. /Toutefois, lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale est compétent, de par la loi ou ses statuts, pour l'élaboration des documents d'urbanisme et la réalisation de zones d'aménagement concerté, cet établissement est compétent de plein droit en matière de droit de préemption urbain. " ; que si la communauté d'agglomération est compétente, en vertu des dispositions précités de l'article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales en ce qui concerne l'élaboration des schémas de cohérence territoriale et des schémas de secteur, cette compétence ne s'étend pas à l'intégralité des documents d'urbanisme ; qu'ainsi, la communauté d'agglomération n'était pas compétente de plein droit en matière de droit de préemption urbain ; que les stipulations précitées ne sont donc pas illégales, contrairement aux affirmations des requérants, dès lors que la commune était compétente en la matière et pouvait donc déléguer le droit de préemption par la délibération du 26 juin 2009 ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, contrairement aux affirmations des requérants, la commune n'était pas incompétente pour déléguer à l'établissement public foncier sa compétence en matière de maîtrise foncière de l'îlot pôle gare ; que les stipulations de l'article 5.2 de la convention, par lesquelles la commune s'engage à approuver le projet et à lancer la procédure de déclaration d'utilité publique dont devra bénéficier l'établissement public ne sauraient avoir pour objet, ni pour effet, pour la commune, d'abandonner sa compétence en la matière; que le moyen tiré de l'illégalité de l'article 5.2 ne peut donc qu'être écarté ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Grasse est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé la délibération du 3 décembre 2009 ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la commune de Grasse tendant à ce qu'il soit mis à la charge des défendeurs une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice susvisé du 7 mai 2015 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande de Mme I... H...et autres présentées devant le tribunal administratif de Nice sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Grasse fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Grasse, à Mme I...H..., à M. K... H..., à M. AD... H..., à Mme E...H..., à Mme V...H..., à M. M... B..., à Mme W... U...épouseB..., à M. AC... Z..., à Mme T... X...Z..., à M. J... X..., à M. N... Z..., à Mme R...Z..., à M. AG... L..., à M. AA... L..., à Mme P... S...épouseL..., à M. AE..., à M. O... D...et à Mme Q...F....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes, à la communauté d'agglomération Pôle Azur Provence et à l'établissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Délibéré après l'audience du 20 mars 2017, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Hameline, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 avril 2017.
2
N° 15MA02970