Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 février 2016, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er septembre 2015 ;
3°) d'enjoindre à la préfète des Pyrénées-Orientales de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les juges de première instance ont méconnu l'autorité de la chose jugée dès lors que par jugement du 3 juillet 2015 le tribunal a annulé la décision par laquelle la préfète des Pyrénées-Orientales lui avait refusé un titre de séjour en qualité d'étranger malade ;
- la décision contestée méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- sa pathologie qui a empiré ne peut être prise en charge en Albanie comme l'a reconnu le médecin inspecteur de la santé publique ;
- les informations retenues par la préfète sur la prise en charge de sa pathologie en Albanie n'établissent nullement qu'elle y serait effective ;
- sa situation en Albanie est aggravée par le fait qu'il est d'origine Rom ;
- son pronostic vital en cas de retour en Albanie sera engagé ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 31 de la convention de Genève relative aux droits des réfugiés ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marcovici a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant albanais, né en 1960, relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2015 rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du 1er septembre 2015 par lequel la préfète des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étranger malade ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Par un avis du 18 septembre 2014, le médecin de l'agence régionale de la santé a indiqué que la pathologie dont souffrait M. A... était susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et qu'il ne pouvait disposer dans son pays d'origine des traitements nécessités par son état. Par arrêté du 26 février 2015, la préfète des Pyrénées-Orientales a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " étranger malade ". Par un jugement du tribunal administratif de Montpellier du 3 juillet 2015, cet arrêté a été annulé au motif qu'en remettant en cause l'appréciation portée sur la disponibilité des soins nécessaires au requérant en Albanie, notamment en se fondant sur des publications sur la prise en charge du diabète insulinodépendant et de l'insuffisance rénale en Albanie, un rapport établi en 2008 par la fédération internationale du diabète, des informations publiées sur les sites internet d'établissements hospitaliers présents à Tirana et sur l'avis rendu par un médecin conseiller santé du ministère qui ne disposait pas du dossier médical du demandeur et n'avait, par suite, qu'une connaissance très approximative de la nature des pathologies dont il souffrait et de leur degré de gravité, le préfet n'avait pas procédé à un examen approfondi de la situation de l'intéressé. Ce jugement a enjoint à la préfète des Pyrénées-Orientales de statuer à nouveau sur la demande de titre de séjour de M. A....
3. Par arrêté du 1er septembre 2015, la préfète des Pyrénées-Orientales a statué à nouveau en application de l'injonction que lui avait adressée le tribunal. Elle a rejeté la demande de M. A.... Cependant, cette décision ne fait état d'aucun élément nouveau concernant la disponibilité des soins nécessaires au requérant en Albanie, permettant de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de la santé en date du 18 septembre 2014, hormis un certificat médical du 24 mars 2015 établi par un praticien du centre hospitalier de Perpignan, produit par le requérant, et exposant les différentes pathologies du requérant, qui n'a pas cet objet, et ne saurait avoir cet effet. Elle a méconnu, dès lors, l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux motifs constituant le soutien nécessaire du dispositif du jugement du 3 juillet 2015. Si l'arrêté du 1er septembre 2015 se fonde également sur la circonstance que M. A... ne justifiait pas d'une présence habituelle sur le territoire national, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur ce défaut de présence habituelle. Au demeurant, il ne ressort pas davantage du dossier que ce motif serait fondé.
4. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2015 a rejeté la demande d'annulation de l'arrêté du 1er septembre 2015, procédant au réexamen de la situation de M. A....
5. Dans les circonstances de l'espèce, le présent arrêt implique nécessairement, et seulement, que le préfet des Pyrénées-Orientales procède à un nouvel examen de la situation de l'intéressé. Il y a donc lieu d'enjoindre au préfet des Pyrénées-Orientales de procéder à un tel examen dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. A...au titre des frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2015 est annulé.
Article 2 : Le préfet des Pyrénées-Orientales procédera à un nouvel examen de la situation de M. A... dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Pecchioli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 décembre 2018.
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N° 16MA00458