Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2015, M.C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 mai 2015;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 16 décembre 2014 portant refus de renouvellement de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aude de renouveler son titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Aude de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 700 euros à verser à Me B...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de renouvellement de séjour est insuffisamment motivé, a été pris en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors il est dans l'impossibilité d'exercer sa profession de maçon suite à l'accident de la circulation dont il a été victime ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité entachant la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour, est entachée d'une insuffisance de motivation, a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et révèle une erreur manifeste d'appréciation.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 octobre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pecchioli a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par jugement du 22 mai 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M.C..., de nationalité marocaine, né le 1er janvier 1949, tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 décembre 2014 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours ; que M. C...relève appel de ce jugement ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 16 décembre 2014 vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il mentionne que l'intéressé est entré régulièrement sur le territoire français le 23 aout 2011 muni d'un passeport et d'un visa D en cours de validité afin de travailler en qualité d'associé au sein de la SARL " Les enduits d'antan " ; que le 12 décembre 2012, le requérant a été victime d'un accident de la circulation qui lui a provoqué de graves lésions, l'empêchant d'exercer son métier d'enduiseur ; que M. C... a perçu des indemnités au cours de l'année 2013 payées par la Compagnie Swiss Life, assureur du véhicule impliqué dans l'accident ; que cependant, malgré les relances de la préfecture, il n'a pas fourni les justificatifs du jugement se rapportant à ce litige, ni d'une éventuelle indemnisation à l'appui de sa demande de renouvellement de titre de séjour ; que le préfet a estimé qu'il ne justifiait pas disposer des ressources suffisantes et qu'il n'exerçait plus sa profession ; qu'ainsi cet arrêté comporte l'indication des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est donc suffisamment motivé au regard des exigences de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ; que le moyen portant sur l'insuffisance de motivation doit donc être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
4. Considérant que M.C..., célibataire et sans charge de famille, est entrée en France, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le 23 août 2011 ; que si M. C...soutient que à la suite d'un accident de la circulation, survenu le 12 décembre 2012, il n'est plus en capacité d'exercer sa profession de maçon, il ne conteste pas le bien-fondé du motif opposé à sa demande de renouvellement d'une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle visée au 2° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile tenant à l'absence de ressources tirées de son activité professionnelle depuis 2013 ; que si, par ailleurs, M. C...fait valoir qu'il a refusé les termes de la transaction proposée par l'assureur de l'automobiliste qui l'a renversé et a saisi, le 4 juin 2014, le juge des référés du tribunal de grande instance de Carcassonne aux fins d'expertise médicale, ces circonstances ne sauraient révéler une erreur manifeste d'appréciation de la part du préfet de l'Aude ; qu'en outre, le requérant ne peut faire utilement valoir qu'il a assigné en justice, le 3 mars 2015, ledit assureur, dès lors que cette assignation est postérieure à la décision attaquée ; que la circonstance qu'il ait entrepris seulement des démarches antérieurement à la décision en cause est sans incidence sur la légalité de cette décision qui s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise ; qu'enfin, M.C..., n'est pas dénué d'attaches familiales au Maroc où il a vécu jusqu'à l'âge de soixante- deux ans ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'il serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C... n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que la décision en litige n'entrant pas dans le champ d'application de la loi du 11 juillet 1979, dès lors qu'elle est régie spécifiquement par les dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de la loi du 11 juillet 1979, ne peut qu'être écarté comme inopérant ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l' article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...)...II- Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours... " ;
8. Considérant que lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, lequel, par nature, déclare implicitement illégal le séjour de l'étranger en France, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive précitée ; que, par suite, les dispositions susmentionnées du 3° de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas incompatibles avec les objectifs de ladite directive ; qu'en l'espèce, la décision portant refus de titre de séjour, qui indique qu'elle est assortie d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, est correctement motivée en droit et en fait ainsi qu'il a été dit au point 2 ; qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté ;
9. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 4 ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
11. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision litigieuse, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. C...ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d' aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
13. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance soit condamné à verser une quelconque somme à M. C...ou à son conseil, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aude.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2016, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Pecchioli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 décembre 2016.
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N° 15MA04855