Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 20 décembre 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 4 décembre 2019 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 15 octobre 2019 ;
3°) de faire injonction au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ";
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation médicale et familiale ;
- l'arrêté contesté a été pris en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- cet arrêté méconnaît l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du même code ;
- il porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants, en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes le 24 juillet 2020 qui n'a pas produit un mémoire en défense.
Par une décision du 30 septembre 2020, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Par ordonnance du 8 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme C... D..., rapporteure.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., né en 1978 et de nationalité ukrainienne, relève appel du jugement, en date du 4 décembre 2019, par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nice, statuant sur le fondement de l'article L. 512-1 I bis du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 15 octobre 2019 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui assignant l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel, passé ce délai, il pourrait être renvoyé d'office.
2. En premier lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté contesté, laquelle est circonstanciée, celle-ci mentionnant, outre le rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 12 décembre 2016 ainsi que par la Cour nationale du droit d'asile le 25 septembre 2018, sa situation familiale en tant qu'époux d'une compatriote et père, ni des autres pièces du dossier que le préfet aurait pris cet arrêté sans procéder à un examen attentif et personnalisé de la situation de M. A.... Le moyen tiré d'une erreur de droit commise à ce titre ne peut dès lors qu'être écarté.
3. Aux termes, en deuxième lieu, de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République.". Selon l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. M. A... soutient résider en France depuis le 13 juin 2015 avec son épouse, laquelle serait atteinte d'une grave pathologie, et ses deux enfants mineurs sans avoir jamais troublé l'ordre public. Toutefois, il ne justifie pas d'attaches familiales en dehors de cette famille nucléaire et son épouse, déboutée comme lui du droit d'asile, s'est également vu notifier un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français. L'allégation selon laquelle sa conjointe serait atteinte d'un cancer, formulée pour la première fois en cause d'appel et sans autre précision, n'est corroborée par aucun commencement de preuve. Les pièces produites à l'instance, par ailleurs, ne permettent pas de relever une insertion significative des intéressés dans la société française, quand bien même il ne serait pas polygame et que l'aîné des enfants, né en 2009, est scolarisé. Dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas démontré que le requérant serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans, l'arrêté contesté ne peut être regardé comme portant une atteinte excessive à ses intérêts privés et familiaux, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
5. En troisième lieu, la situation de M. A... et de son foyer, compte tenu des éléments retracés au point précédent, ne permet pas de caractériser l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels susceptibles de justifier une mesure de régularisation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pas plus d'ailleurs que les prescriptions ou pièces médicales versées aux débats datées des 28 février 2019, 15 mars 2018 et 17 juin 2015. Le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de cette disposition ne saurait dès lors être accueilli.
6. Enfin, et en quatrième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant susvisée : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale.". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir contre une décision de refus de séjour et d'éloignement que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants, dans toutes les décisions les concernant.
7. Le moyen tiré de la violation de l'article 3-1 de la convention internationale précité relative aux droits de l'enfant, repris dans les mêmes termes qu'en première instance et sans qu'il soit fait état d'éléments nouveaux, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge aux points 9 et 10 de sa décision.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice du 4 décembre 2019 et de l'arrêté du 15 octobre 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a prescrit l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel, passé ce délai, il pourrait être renvoyé d'office. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que les conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
O R D O N N E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2020, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- Mme C... D..., présidente assesseure,
- M. Philippe Grimaud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2020.
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N° 19MA05667
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