Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 18 février 2020, 16 mai 2020 et 27 mai 2020, M. C..., représenté par Me Lê, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 août 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Var du 2 juillet 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me Lê au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'insuffisance de motivation de l'arrêté, qui n'a pas pris en compte les risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine, démontre l'absence d'examen sérieux de sa situation par le préfet ;
- c'est à tort que tribunal a estimé que l'arrêté ne méconnaissait pas les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales eu égard aux persécutions dont il a fait l'objet en Serbie du fait de ses origines roms ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation dans l'examen de sa situation.
La requête et les mémoires ont été communiqués au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Par ordonnance du 29 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 octobre 2020.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 novembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... D..., rapporteure,
- et les observations de Me Lê, représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant serbe, relève appel du jugement du 20 août 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2019 du préfet du Var portant refus d'un droit au séjour au titre de l'asile et obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant notamment la Serbie comme pays de destination en cas de reconduite d'office.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, d'une part, l'arrêté du 2 juillet 2019 vise les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment les articles 3 et 8, ainsi que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier les articles L. 511-1-I-6°, L. 511-4, L. 512-1-I bis, L. 513-2 et L. 743-1 et suivants, dont le préfet du Var a entendu faire application, et précise que M. C... a fait l'objet d'une décision de rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 23 novembre 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 19 juin 2019 et qu'il ne remplit pas les conditions prévues pour l'obtention d'une carte de résident au titre du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, le préfet a fait état dans l'arrêté attaqué, après avoir rappelé sa date d'entrée sur le territoire national le 12 janvier 2018, de sa situation de personne célibataire sans enfant qui ne justifie ni de liens personnels et familiaux anciens, stables et intenses en France, ni être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, ni être exposé à des peines ou traitements inhumains en cas de retour en Serbie. Dans ces circonstances, la décision comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui la fondent et est, ainsi, suffisamment motivée ainsi que l'a jugé, à bon droit, le tribunal.
3. D'autre part, eu égard aux éléments exposés au point précédent, M. C... ne peut utilement soutenir que le préfet du Var n'aurait pas procédé à un examen sérieux de sa situation personnelle et familiale.
4. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 2 juillet 2019 démontre l'absence d'examen sérieux de sa situation par le préfet du Var.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité, l'intensité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. A supposer même que M. C... soit regardé comme présent sur le territoire français depuis le 12 janvier 2018 comme il l'allègue, la triple circonstance qu'il est hébergé, qu'il est titulaire d'un compte bancaire et qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche, au demeurant datée du 20 septembre 2019 soit postérieurement à la date de l'arrêté attaqué, ne suffit pas à démonter l'existence d'attaches familiales ou personnelles anciennes et stables en France à la date à laquelle a été prise la décision contestée. Les pièces du dossier ne permettent pas davantage de démontrer qu'il est dépourvu d'attaches privées ou familiales dans son pays d'origine où il a vécu, selon ses dires, jusqu'à au moins l'âge de 22 ans avec sa famille, alors même qu'il justifie du décès de son père, de nationalité serbe, le 26 mars 2019 à Backi Gracac en Serbie. Par suite, ainsi que l'a jugé le tribunal, l'arrêté par lequel le préfet du Var a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. En troisième lieu, aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
8. Le bien-fondé de la décision de l'Office français pour la protection des réfugiés et des apatrides du 23 novembre 2018 a été confirmé par une décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 19 juin 2019. Si M. C... persiste à se prévaloir des risques qu'il encourrait en cas de retour en Serbie en raison de son appartenance à la communauté rom, il n'apporte cependant pas la moindre justification à l'appui de ses allégations susceptible de remettre en cause la décision de la Cour nationale du droit d'asile, qui a jugé que les pièces du dossier et ses déclarations ne permettaient pas de tenir pour établis les faits allégués et pour fondées les craintes énoncées. Et, contrairement à ce que le conseil de M. C... a soutenu à l'audience, ni le certificat de décès, ni aucune autre pièce du dossier soumis au juge ne permettent de démontrer que le père du requérant serait décédé des suites d'une agression en raison de ses origines roms. Dès lors, dans ces circonstances et ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, l'arrêté du préfet du Var n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points précédents, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation dans l'examen de la situation de M. C....
10. Il résulte de l'ensemble qui précède que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulon du 20 août 2019 et de l'arrêté du préfet du Var du 2 juillet 2019. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A... C..., à Me Lê et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2020, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- Mme B... D..., présidente assesseure,
- M. Philippe Grimaud, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 décembre 2020.
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N° 20MA00864