Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2016, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 17 décembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 6 octobre 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de saisir la commission du titre de séjour ;
4°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour est entachée d'un vice de procédure, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 7 ter d) de l'accord franco-tunisien et viole les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien et en violation de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il remplit les conditions posées par la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Héry.
1. Considérant que M.B..., ressortissant tunisien né en novembre 1972, déclare être entré en France en mars 2003 et s'y être depuis lors maintenu ; qu'il a sollicité le 13 avril 2015 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; que par arrêté du 6 octobre 2015, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que M. B...relève appel du jugement du 17 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens s'agissant de la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...)/ L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
3. Considérant que M. B... a produit en première instance et en appel des documents diversifiés de nature à établir, par leur nombre et leur valeur probante, sa présence en France au moins depuis 2004 ; que, par suite, le préfet était tenu de soumettre le cas du requérant à la commission du titre de séjour, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière et doit, dès lors, être annulé ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'ensemble des moyens, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'eu égard au motif fondant l'annulation de l'arrêté du 6 octobre 2015, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance à M. B...d'un titre de séjour mais seulement qu'il soit enjoint au préfet de procéder à un nouvel examen de sa demande après saisine de la commission du titre de séjour ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de saisir la commission du titre de séjour avant de procéder à un nouvel examen de la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1504410 du 17 décembre 2015 du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 6 octobre 2015 du préfet des Alpes-Maritimes est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de saisir la commission du titre de séjour et de recueillir son avis avant de procéder à un nouvel examen de la demande de M.B..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice.
Délibéré après l'audience du 30 mai 2016, où siégeaient :
- M. Moussaron, président,
- Mme Héry, premier conseiller,
- M. Ouillon, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 20 juin 2016.
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N° 16MA00189