Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 17 avril 2020 et le 24 août 2020, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 février 2020 ;
2°) d'annuler la décision du 11 avril 2018 de l'inspectrice du travail ;
3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de l'UGECAM Occitanie la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en méconnaissance de l'article 48 c) de la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale, sa mise à pied à titre conservatoire n'a pas été précédée d'un entretien en présence des délégués du personnel ;
- le conseil de discipline régional n'a pas rendu d'avis préalablement à la sanction, en méconnaissance de l'article 48 b) de la convention collective ;
- l'inspectrice du travail n'a pas vérifié la régularité de la procédure telle que prévue à l'article 48 b) de la convention collective ;
- il existe un lien entre la mesure de licenciement et sa désignation en tant que conseillère prud'homme ;
- quatre des six griefs retenus par l'inspectrice du travail sont prescrits et, en tout état de cause, la matérialité des faits reprochés n'est pas établie.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 juin 2020 et le 11 septembre 2020, l'UGECAM Occitanie, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme A... la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
La requête a été communiquée à la ministre du travail qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., substituant Me D..., représentant Mme A..., et de Me E..., représentant l'UGECAM Occitanie.
Une note en délibéré présentée pour Mme A... a été enregistrée le 20 novembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a été recrutée par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2012 par l'UGECAM Occitanie, qui est un organisme de sécurité sociale également gestionnaire d'établissements sanitaires et médico-sociaux, et occupait en dernier lieu le poste de de directrice des ressources humaines. Elle a été désignée conseillère prud'homme par arrêté ministériel du 14 décembre 2017 dans le collège employeur de la section encadrement du conseil des prud'hommes de Montpellier. Saisie par l'UGECAM Occitanie d'une demande d'autorisation de licenciement de Mme A... pour motif disciplinaire, l'inspectrice du travail de l'unité départementale de l'Hérault de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie a, par décision du 11 avril 2018, accordé cette autorisation. Mme A... relève appel du jugement du 18 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision de l'inspectrice du travail du 11 avril 2018.
2. En premier lieu, il incombe à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé pour motif disciplinaire, d'apprécier, sous le contrôle du juge administratif, si les règles de procédure d'origine conventionnelle préalables à sa saisine ont été respectées.
3. En l'espèce, et d'une part, l'article 48 c) de la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957 stipule que " (...) En cas de faute grave au sens de la jurisprudence, le directeur peut prendre une mesure conservatoire de mise à pied à effet immédiat et sans traitement, en attendant que le Conseil de discipline se soit prononcé, après avoir entendu l'intéressé en présence des délégués du personnel. Le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. Le conseil de discipline appréciera s'il y a faute grave. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été convoquée dans le bureau du directeur général de l'UGECAM Occitanie à son retour de congés, au matin du 9 janvier 2018, et s'y est vu remettre une convocation à un entretien préalable au licenciement fixé au 16 janvier 2018. Eu égard aux faits qui lui étaient reprochés, le directeur général lui a également notifié une mise à pied conservatoire à effet immédiat. S'il est constant que cette mesure n'a pas été précédée d'un entretien en présence des délégués du personnel, une telle mise à pied revêt un caractère facultatif et ne présage nullement de l'engagement par l'employeur d'une procédure disciplinaire, ni ne constitue un préalable à un éventuel licenciement. Mme A... ne saurait donc utilement soutenir, à l'appui de sa contestation de la légalité la décision de l'inspectrice du travail en litige, que cet entretien s'est effectué en méconnaissance de l'article 48 c) précité de la convention collective nationale applicable. En tout état de cause, un tel entretien n'aurait pu porter, à ce stade, sur les griefs reprochés à l'intéressée, que l'employeur n'était aucunement tenu de lui communiquer avant la tenue de l'entretien préalable au licenciement, prévu sept jours plus tard. Par ailleurs, les délégués du personnel ne tenaient ni de ces stipulations, ni d'aucune autre, de prérogatives particulières susceptibles de faire obstacle à la décision de l'employeur de mettre à pied Mme A... à titre conservatoire et donc de suspendre l'exécution de son contrat de travail la privant ainsi, notamment, de la possibilité d'accéder à l'entreprise. L'appelante ne saurait dès lors valablement soutenir qu'un entretien en présence des délégués du personnel lui aurait permis de " revendiquer un accès sous leur contrôle à son ordinateur afin de récupérer les éléments nécessaires à la préparation de sa défense ". Au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette inobservation par l'UGECAM Occitanie des stipulations conventionnelles en cause aurait eu pour effet d'affecter une garantie attachée en propre à la procédure de licenciement dont elle a fait l'objet. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'inspectrice du travail a estimé, après avoir notamment constaté que le conseil de discipline avait été consulté et que Mme A... avait refusé d'être assistée, lors de l'entretien préalable au licenciement, du délégué du personnel suppléant, que l'absence du délégué du personnel lors de la notification par son employeur de sa mise à pied conservatoire ne l'avait pas privée de garantie et qu'il y avait donc lieu, " au regard de la chronologie de la procédure spéciale ", de regarder la procédure comme régulière. Dans ces conditions, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision querellée serait illégale en raison du vice affectant la procédure de licenciement.
5. D'autre part, l'article 48 b) de la même convention collective stipule que " (...) - le directeur a 5 jours ouvrés maximum à compter du jour de l'entretien pour demander la convocation du conseil de discipline ; / - le conseil de discipline est convoqué par son secrétariat dans un délai de 8 jours suivant la réception de la demande de convocation du directeur de l'organisme concerné et doit se réunir dans les 15 jours suivant la réception de cette demande ; / - le conseil de discipline ne peut valablement délibérer que si le quorum est atteint dans chaque collège et si la parité est assurée. A défaut, le conseil de discipline se réunit à nouveau dans un délai maximum de 8 jours francs et se prononce à la majorité des membres présents ; / - les conclusions du conseil de discipline sont notifiées par écrit dans les 48 heures au directeur et à l'agent en cause ; / - en tout état de cause, la sanction ne peut intervenir avant que le conseil de discipline ne se soit prononcé sur la proposition faite par le directeur, le délai total de la procédure ne pouvant excéder un mois à compter de la date de l'entretien ; - le directeur prend sa décision, compte tenu des conclusions du conseil de discipline qu'il devra rappeler en tout état de cause dans la notification qui sera faite à l'agent intéressé. La sanction doit être motivée et notifiée à l'intéressé. ".
6. Il ressort des pièces du dossier que, saisi par le directeur de l'UGECAM Occitanie par lettre du 19 janvier 2018, reçue par le secrétariat le même jour, le conseil de discipline régional, instance disciplinaire prévue par la convention collective du 8 février 1957, s'est réuni une première fois le 31 janvier 2018 pour examiner la situation de Mme A.... Le procès-verbal de la séance fait état de ce que la convocation de l'intéressée à cette comparution, à laquelle était joint " le dossier complet produit par son employeur ", lui a été adressée par lettre recommandée datée du 19 janvier 2018 et est revenue au secrétariat du conseil de discipline avec la mention " retourné à l'expéditeur pour cause de boîte aux lettres non identifiable ". Le procès-verbal indique également qu'un courriel auquel étaient joints la convocation ainsi que le dossier complet produit par l'employeur a été envoyé à Mme A... et qu'il n'a fait l'objet ni d'une notification de non-distribution, ni d'un accusé de réception de la part de l'intéressée. Le procès-verbal précise que Mme A... ne s'est pas présentée à cette séance. Il indique enfin qu'à défaut de parité, un constat de carence a été dressé et une nouvelle séance a été programmée le 2 février 2018. Le procès-verbal de cette seconde réunion du conseil de discipline, qui, s'agissant des modalités de convocation de Mme A..., reprend les indications de celui du 31 janvier 2018, ajoute que la convocation pour cette seconde séance, à laquelle étaient joints " le dossier complet produit par son employeur " ainsi que le procès-verbal du 31 janvier 2018, a été adressé par " France colis express ". Ce procès-verbal de la séance du 2 février 2018 mentionne que la procédure prévue à l'article 48 de la convention collective a été respectée et qu'elle est donc " régulière en la forme ". Il fait toutefois état de ce que, ayant constaté l'absence de l'intéressée, le conseil de discipline a décidé de ne pas siéger en indiquant que " le conseil n'a pas la preuve de la réception du dossier par Mme A... huit jours avant la première réunion ". Cependant, eu égard aux différentes formalités accomplies par le secrétariat du conseil de discipline pour s'assurer de la présence de Mme A... tant à la séance du 31 janvier 2018 qu'à celle du 2 février 2018, et compte tenu du fait que, dans ses écritures, l'intéressée n'allègue pas même qu'elle n'aurait réceptionné aucune des convocations ainsi adressées, il y a lieu de regarder l'employeur comme ayant régulièrement saisi le conseil de discipline régional, dans les formes prévues par l'article 48 de la convention collective, ce conseil ayant ainsi été mis à même de rendre son avis sur la proposition de sanction qu'il a faite. Lesdites stipulations ne font d'ailleurs aucunement obligation à l'employeur de solliciter un nouvel avis du conseil de discipline dans l'hypothèse où celui-ci décide expressément de ne pas se prononcer. Dans ces conditions, et alors que l'absence d'avis du conseil de discipline ainsi régulièrement saisi ne saurait faire échec au pouvoir disciplinaire de l'employeur ni rendre irrégulière la procédure de licenciement, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision querellée est illégale faute pour le directeur de l'UGECAM Occitanie d'avoir tenu compte des conclusions du conseil de discipline ou à défaut, pour l'inspectrice du travail, d'avoir vérifié la régularité de la procédure dès lors que, dans la décision en litige, l'inspectrice a relevé, au vu des procès-verbaux des séances du conseil de discipline régional, que ladite procédure était régulière.
7. En deuxième lieu, en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives ou de conseiller prud'homme, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.
8. Par ailleurs, aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail : " Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance (...) ". Il résulte de ces dispositions que le délai commence à courir lorsque l'employeur a une connaissance exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié protégé et que l'engagement des poursuites disciplinaires par l'envoi au salarié de la lettre le convoquant à l'entretien préalable interrompt le délai de prescription de deux mois qu'elles prévoient.
En ce qui concerne le grief tenant à l'impact financier du maintien à tort du salaire d'une salariée mise à disposition du groupement de coopération sanitaire " Pôle sanitaire Cerdan " pour un préjudice financier de 94 186,48 euros :
Concernant la matérialité des faits :
9. Il ressort des pièces du dossier que par un courriel du 7 novembre 2017 adressé au directeur général de l'UGECAM Occitanie, la directrice du groupement de coopération sanitaire (GCS) " Pôle sanitaire Cerdan ", auprès duquel sont mis à disposition des salariés appartenant à l'UGECAM, s'est étonnée de ce que deux de ces salariés mis à disposition continuaient d'être rémunérés, à défaut d'instructions contraires de la part du service des ressources humaines de leur structure d'origine qui avaient été sollicité en vain, alors que ces salariés se trouvaient en arrêt maladie depuis une très longue période. L'enquête interne diligentée par le directeur général de l'UGECAM Occitanie a révélé, s'agissant de l'une de ces deux salariés, que Mme A..., en sa qualité de directeur des ressources humaines, avait été questionnée, en date du 12 octobre 2015, par la gestionnaire ressources humaines en charge de la gestion des salariés mis à disposition par l'UGECAM Occitanie au GCS, sur la conduite à tenir concernant la situation administrative et la paie de cette salariée après avoir réceptionné de sa part un arrêt de travail sous la forme d'une prolongation d'accident du travail pour la période du 1er octobre 2015 au 31 octobre 2015 alors que parallèlement, un courrier émanant de la caisse primaire d'assurance maladie de Pyrénées-Orientales indiquait que le règlement des indemnités journalières concernant cette salariée au titre de son accident du travail serait supprimé à compter du 1er octobre 2015. Cette situation incohérente, qui était clairement exposée par la gestionnaire, appelait pour son règlement correct une analyse juridique précise ainsi que, le cas échéant, la collecte d'informations complémentaires et, à tout le moins, un suivi attentif de la part de Mme A.... Contrairement à ce que fait valoir l'intéressée, la citation des stipulations de l'article 41 de la convention collective applicable qu'elle a adressée à la gestionnaire par courriel du 15 octobre 2015 et qui traite de manière très générale du régime de l'accident du travail, ne peut être regardée comme une réponse adaptée à sa demande. Il ressort en outre des pièces du dossier que la gestionnaire ressources humaines du GCS a échangé téléphoniquement à deux reprises au cours du mois d'août 2015 avec Mme A... à propos de la situation de la salariée mise à disposition, ce qui explique que le courriel du 12 octobre 2015 soit présenté par la gestionnaire comme une nouvelle sollicitation concernant cette personne. Mme A... ne saurait dès lors sérieusement soutenir qu'elle ne peut être tenue pour responsable du fait que la salariée mise à disposition est finalement demeurée, jusqu'au 31 décembre 2017, en situation d'accident du travail avec maintien en conséquence de la rémunération afférente durant plus de deux ans, au motif qu'elle ne réceptionne pas elle-même les arrêts de travail des 1 200 salariés de l'UGECAM Occitanie et qu'elle manquait d'information sur cette situation ou encore qu'elle n'a plus été sollicitée à ce propos au cours des deux années qui ont suivies l'échange du mois d'octobre 2015. Enfin, la circonstance selon laquelle l'UGECAM Occitanie dispose de " contrôleurs paie " en interne qui ne sont pas hiérarchiquement rattachés à Mme A... mais dépendent de l'agence comptable n'est pas de nature à l'exonérer de ses propres responsabilités, attachées à sa fonction, en matière de gestion des ressources humaines. La matérialité des négligences ainsi commises par Mme A... est dès lors établie et, eu égard notamment à leurs conséquences financières, ces faits sont constitutifs d'une faute.
Concernant la prescription des faits :
10. Il ressort des pièces du dossier que si le directeur général de l'UGECAM Occitanie a effectivement été informé, dès la réception du courriel du 7 novembre 2017, du versement irrégulier de la rémunération à la salariée mise à disposition, il n'a cependant pris connaissance de l'incidence financière globale de ce versement, donc de l'ampleur des faits, que le 5 décembre 2017, lors d'une réunion au cours de laquelle lui ont été exposées les conclusions de l'enquête interne qu'il avait diligentée à propos de ces faits. Lesdits faits n'étaient donc pas prescrits le 9 janvier 2018 lorsque l'employeur de Mme A... a engagé les poursuites disciplinaires à son encontre.
En ce qui concerne le grief tenant au manque d'attention démontrant un désintérêt total dans la maitrise des risques :
11. Il ressort des pièces du dossier que l'UGECAM Occitanie a mis en place un dispositif de contrôle interne applicable à l'ensemble des établissements qu'elle gère visant à limiter les risques financiers. Alors que la réunion annuelle de mise à jour de la cartographie des risques intéressant ces établissements était programmée le 16 octobre 2017 avec l'ensemble des acteurs concernés, Mme A..., qui devait être la représentante du siège à cette réunion en sa qualité de directeur des ressources humaines, n'y a pas participé, en dépit même de son statut spécifique de pilote du " processus ressources humaines ", prétextant la tenue d'une réunion à cette date dans un établissement situé à 250 kilomètres de distance. Alors qu'elle avait initialement validé sa présence à cette réunion dans l'agenda partagé, l'intéressée s'est abstenue de prendre contact avec le pôle maîtrise des risques, pourtant localisé comme elle au siège, afin de l'informer de son indisponibilité et de permettre la reprogrammation de cette réunion. Au demeurant, Mme A... ne justifie pas de l'urgence ou de l'importance de la réunion à laquelle elle a préféré se rendre. Elle n'a par ailleurs aucunement réagi aux messages produits à la suite de cette réunion par le pôle maîtrise des risques. Outre le fait que cette absence a pu être interprétée par les participants à cette réunion comme un désintérêt de la part de la direction générale à cette démarche de gestion des risques, elle dénote surtout un manque d'investissement de Mme A... dans l'effort d'identification et d'évaluation des risques dans les processus métiers relevant de ses propres attributions, le maintien indu de la rémunération d'une salariée pendant de nombreux mois tel que relevé au point 7 ci-dessus, qui a emporté des conséquences financières significatives, en étant une illustration. Le manque d'implication de l'intéressée dans cette démarche de gestion des risques est dès lors établi et doit être regardé comme étant fautif.
En ce qui concerne le grief tenant à la rédaction de l'accord PSE de l'établissement d'Anduze impactant les prévisions budgétaires liées au projet :
Concernant la matérialité des faits :
12. A supposer même que, ainsi que le soutient Mme A..., l'accord collectif conclu le 21 avril 2016 relatif à la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi concernant le centre de soins de suite et de réadaptation " Les Jardins d'Anduze " n'avait pas à être soumis à l'agrément du ministre chargé de la sécurité sociale au titre des dispositions de l'article L. 123-1 du code de la sécurité sociale et qu'en conséquence, il ne saurait lui être reproché de n'avoir pas transmis cet accord à la direction de la sécurité sociale à cet effet, il ressort des pièces du dossier que la rédaction de ce plan de sauvegarde de l'emploi, confiée à Mme A..., indiquait en montant brut les indemnités prévues pour les salariés au titre des aides à la création d'entreprise, sans tenir compte du fait que la réglementation prévoit que ce type de primes est exonéré de charges dans la limite de deux fois le plafond annuel de la sécurité sociale. Interpellé le 17 octobre 2017 par la fondée de pouvoir au sein de l'UGECAM Occitanie sur le fait que ces indemnités avaient effectivement été soumises à cotisations et donc " tronquées ", selon ses termes, pour les huit salariés qui ont bénéficié de ces indemnités, Mme A... a, dans un premier temps, confirmé qu'il s'agissait bien d'un " montant brut soumis à charge ", avant de reconnaître implicitement, un mois plus tard, que cette réponse était erronée. L'UGECAM Occitanie a évalué le préjudice lié à ces cotisations indues à la fin de l'année 2017 à 36 120 euros et l'appelante ne conteste pas le fait que les prévisions budgétaires ont été perturbées. Si, certes, les sommes indûment versées à l'URSSAF ont fait l'objet d'une demande de reversement, l'erreur commise par Mme A... n'en demeure pas moins fautive et la matérialité des faits reprochés est établie.
Concernant la prescription des faits :
13. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur général de l'UGECAM Occitanie aurait eu connaissance de ces faits avant le 7 décembre 2017, date de la note rédigée par l'agent comptable après la réunion du 5 décembre 2017 mentionnée au point 10 ci-dessus et, au mieux, à la date de cette réunion. Lesdits faits n'étaient donc pas prescrits le 9 janvier 2018 lorsque l'employeur de Mme A... a engagé les poursuites disciplinaires à son encontre.
En ce qui concerne le grief tenant au refus d'attribution de la gratification annuelle et de la prime de vacances à une apprentie comptable :
Concernant la matérialité des faits :
14. Il ressort des pièces du dossier que lors d'une réunion tenue dans son bureau le 20 juillet 2017, en présence d'une fondée de pouvoir et d'un chargé de mission en ressources humaines, Mme A... a refusé à une salariée en contrat d'apprentissage l'attribution de la prime de vacances et de la gratification annuelle au motif qu'elle ne souhaitait pas étendre cet " usage " au sein de l'UGECAM Occitanie aux contrats autres que les contrats de travail à durée indéterminée. Ce refus révèle toutefois une analyse juridique erronée des stipulations conventionnelles applicables dans l'entreprise, erreur que l'appelante ne saurait en tout état de cause valablement imputer à son collaborateur qui a fait état de sa propre analyse près de cinq mois après le refus qu'elle a elle-même opposé. Alors même que la situation a été régularisée au cours du mois de décembre 2017 et que le risque contentieux pour l'entreprise avait donc disparu à la date à laquelle l'employeur a engagé les poursuites disciplinaires à son encontre, l'erreur ainsi commise par Mme A... en sa qualité de directeur des ressources humaines, dont la matérialité est établie, est constitutive d'une faute.
Concernant la prescription des faits :
15. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le directeur général de l'UGECAM Occitanie aurait eu connaissance de ces faits avant le 15 décembre 2017, date de l'attestation établie par la fondée de pouvoir mentionnant ces faits. Lesdits faits n'étaient donc pas prescrits le 9 janvier 2018 lorsque l'employeur de Mme A... a engagé les poursuites disciplinaires à son encontre.
En ce qui concerne le grief tenant aux agissements de Mme A... envers ses collaborateurs directs et indirects :
16. Lorsque l'employeur sollicite de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier un salarié protégé, il lui appartient de faire état avec précision, dans sa demande, ou le cas échéant dans un document joint à cet effet auquel renvoie sa demande, de la cause justifiant, selon lui, ce licenciement.
17. En l'espèce, la demande d'autorisation de licenciement adressée à l'inspection du travail par l'UGECAM Occitanie mentionne expressément le grief tenant aux agissements de de Mme A... envers ses collaborateurs directs et indirects et fait état de nouvelles attestations établies par plusieurs salariés venant s'ajouter à celles qui étaient jointes au courrier du 10 janvier 2018 précédemment adressé à l'inspection informant de la mise à pied conservatoire de l'intéressée. La description des faits reprochés, tant dans ce courrier du 10 janvier 2018, auquel fait référence la demande d'autorisation de licenciement du 9 février 2018, que dans la demande d'autorisation de licenciement, ainsi que dans les attestations qui y étaient jointes, est suffisamment précise.
18. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier, notamment des nombreux témoignages convergents produits lors de l'enquête interne réalisée par l'UGECAM Occitanie qui font état de situations de souffrance résultant des méthodes de Mme A..., que cette dernière, qui a elle-même décrit son comportement comme étant difficile envers ses subordonnés et qui avait une organisation de travail singulière, pratiquait un management agressif à l'égard de ses collaborateurs directs et indirects, conduisant à l'instauration d'un climat profondément délétère. Le fait que les institutions représentatives n'ont été saisies par aucun salarié s'agissant de ce mode de management, que le médecin du travail n'a jamais été alerté et qu'il n'a lui-même jamais alerté l'UGECAM Occitanie ou encore le fait qu'aucun salarié n'a fait l'objet d'un arrêt de travail pour ce motif ne sont pas de nature à mettre en cause sérieusement les témoignages produits. La circonstance selon laquelle certains de ces témoignages ont été recueillis alors que l'intéressée était en congés est sans incidence sur la légalité de la décision querellée, Mme A... ayant pu faire valoir ses arguments dans le cadre de la procédure de licenciement, et notamment lors de l'enquête contradictoire menée par l'inspectrice du travail. Dans ces conditions, les faits reprochés à l'intéressée doivent être regardés comme établis et comme étant fautifs.
19. Les faits relevant de ces cinq griefs reprochés, pris dans leur ensemble, étaient d'une gravité suffisante pour justifier à eux-seuls le licenciement de Mme A..., sans même qu'il soit besoin de retenir celui tenant au non-respect de la procédure de publication des accords propres aux organismes de sécurité sociale. A supposer même ce dernier grief infondé, c'est dès lors par une exacte appréciation des circonstances de l'affaire que l'inspectrice du travail, par la décision contestée, a autorisé le licenciement de l'intéressée.
20. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
21. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et de l'UGECAM Occitanie, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que Mme A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'UGECAM Occitanie et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Mme A... versera à l'UGECAM Occitanie une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et à l'Union pour la gestion des établissements de caisses d'assurance maladie (UGECAM) Occitanie.
Copie en sera adressée au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Occitanie.
Délibéré après l'audience du 20 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 décembre 2020.
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N° 20MA01660
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