Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 décembre 2019, sous le n° 19MA05490, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 juin 2019 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 31 décembre 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jours de retard ou à défaut, de réexaminer sa situation, sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil Me B... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté viole les dispositions des articles L. 313-11 11° et L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 octobre 2019.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., né le 6 mai 1988, de nationalité macédonienne, est entré irrégulièrement en France le 6 mars 2017. Le 27 septembre 2017, il a été débouté de sa demande d'asile par une décision du 29 septembre 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) qui a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), le 28 mars 2018. L'intéressé a déposé, le 27 mars 2018, une demande de titre de séjour mention " étranger malade ". Il relève appel du jugement du 3 juin 2019 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 décembre 2018 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre de séquelles neurologiques résultant d'une encéphalite contractée pendant l'enfance ayant entraîné un retard mental important, une épilepsie et une dépendance totale nécessitant un traitement médical ainsi qu'une prise en charge en institution spécialisée de jour. Pour prendre l'arrêté contesté, le préfet de l'Hérault s'est fondé sur l'avis du 20 novembre 2018 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine. Les certificats médicaux produits par M. A... établis les 31 janvier 2018, 25 mai 2018 et 24 juillet 2018 qui ne se prononcent pas sur l'effectivité d'un traitement approprié en Macédoine, ne sont pas de nature à remettre valablement en cause l'avis précité du collège des médecins de l'OFII. M. A... allègue que ses origines rom l'exposent à une discrimination dans l'accès aux soins et droits sociaux en Macédoine et qu'il ne peut bénéficier d'une couverture médicale dans la mesure où il ne peut pas travailler en raison de son handicap, qu'il est célibataire et que ses parents résident en France. Toutefois, le rapport établi au mois de juin 2013 par l'Open Society intitulé " Roma Health Rights in Macedonia, Romania and Serbia " dont il se prévaut, rédigé en des termes très généraux et dépourvu d'élément personnalisé ne démontre pas qu'il ne pourrait pas être effectivement pris en charge dans son pays d'origine. Sur ce point, le préfet de l'Hérault verse au dossier un courriel du 7 décembre 2018 du consulat de France à Skopje (Macédoine) précisant que l'on trouve l'intégralité de ces services dans ce pays. Par ailleurs, l'extraction de la base du Centre de liaisons européennes et internationales de sécurité sociale (CLEISS) relative au système de sécurité sociale dans ce pays produite par le préfet fait état de l'existence d'une prise en charge des soins pour les personnes sans ressources relevant de l'assistance sociale, d'une indemnité pour les personnes incapables d'effectuer seules les gestes du quotidien, ainsi que d'une pension d'invalidité en cas d'incapacité de travail liée ou non à l'activité professionnelle. Ainsi, la circonstance que le collège de médecin de l'OFII et le consulat n'aient pas eu connaissance de son appartenance à la communauté rom est sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Le seul fait qu'il ait été reconnu invalide à 80 % n'est pas de nature à établir qu'il ne pourrait pas voyager sans risque vers son pays d'origine alors qu'il est entré en France à l'âge de 29 ans, déjà handicapé depuis l'âge de quatre ans. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaîtrait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
5. Il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 et auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Pour les motifs indiqués au point 4, M. A... ne remplissait pas les conditions prévues par ces dispositions. Ainsi, le préfet de l'Hérault n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour précitée avant de rejeter sa demande.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Le moyen tiré de la violation des dispositions du 10° de l'article L. 511-4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 4.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 31 décembre 2018.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
8. Le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A... n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte de M. A....
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 22 janvier 2021, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 février 2021.
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N° 19MA05490
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