Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 août 2017, le 3 octobre 2017 et le 13 septembre 2018 la société GRDF, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 juin 2017 en ce qu'il a rejeté sa demande d'annulation des articles 11 A, 27, 37 C alinéa 2 et 38 A alinéa 2 du règlement de voirie ;
2°) d'annuler les articles 11 A, 27, 37 C alinéa 2 et 38 A alinéa 2 du règlement de voirie ;
3°) de mettre à la charge du département du Gard la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'insuffisance de motivation en ce qu'ils n'ont pas répondu à l'ensemble des moyens soulevés à l'encontre de l'article 27 du règlement de voirie tirés de la méconnaissance des dispositions relatives à la pollution des sols, de la méconnaissance de l'obligation d'entretien à la charge du département, de l'atteinte excessive portée aux droit de la société d'occuper le domaine public en ce qu'elle crée une charge nouvelle et supplémentaire à son encontre et de la méconnaissance du principe selon lequel toute personne a le droit d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques ;
- le jugement attaqué a omis de répondre au moyen tiré de ce que l'article 11 A du règlement de voirie, en imposant des modalités techniques particulières pour l'implantation des réseaux, porte une atteinte excessive aux droits des occupants ;
- le considérant 10 du jugement attaqué est inintelligible ;
- le jugement attaqué a omis de statuer sur la demande tendant à l'annulation de l'alinéa 2 de l'article 37 C du règlement de voirie ;
- les articles 11 A et 38 A alinéa 2 du règlement de voirie imposent une définition conjointe des modalités techniques de réalisation des travaux par l'occupant, conduisant en cas de désaccord à la définition de ces modalités par le gestionnaire lui-même ce qui constitue une atteinte excessive au droit d'occuper le domaine public ;
- les dispositions de l'article 27 du règlement de voirie, imposant aux opérateurs la détection d'amiante, portent une atteinte excessive au droit d'occupation du domaine public routier en ce qu'elles excèdent les prestations qui peuvent être régulièrement mises à la charge des occupants du domaine public prévues par les dispositions des articles L. 4121-3, L. 4531-1, L. 4121-2 et R. 4412-97 du code du travail ; les prestations de diagnostic des sols ne sont pas indispensables à la protection du domaine public et vont au-delà de la simple remise en état de la voirie ; elles relèvent non pas d'une stricte protection du domaine public, mais d'une optimisation de celui-ci ; cette prise en charge revêt un caractère systématique, inutile et excessif ;
- ces dispositions méconnaissent l'obligation incombant au département d'assurer la charge normale d'entretien de la voirie en application des dispositions des articles L. 131-2 du code de la voirie routière et L. 3321-1 du code général des collectivités territoriales ;
- elles méconnaissent le principe du " pollueur-payeur " tel qu'énoncé par les dispositions des articles L. 110-1 et L. 541-2 du code de l'environnement pris pour la transposition de la directive 2008/98/CE dès lors que le département, qui doit être regardé comme le détenteur antérieur ou initial des déchets pollués par l'amiante et a nécessairement consenti ou contribué à la mise en oeuvre de matériaux pollués par l'amiante en sa qualité de propriétaire de la voirie, est tenu de prendre en charge le coût de la gestion des couches de chaussée polluées ainsi que celui correspondant aux investigations nécessaires ;
- ces dispositions constituent un transfert irrégulier des obligations pesant sur le département en exécution des dispositions de l'article L. 556-3 du code de l'environnement ;
- elles méconnaissent le principe selon lequel le département est tenu à une obligation d'information en matière environnementale tel que prévu par le 4° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement ;
- en mettant à la charge des concessionnaires le coût des investigations de recherche d'amiante en toute circonstance, y compris pour les enrobés réalisés postérieurement au décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996, les dispositions de l'article 27 du règlement de voirie méconnaissent les dispositions dudit décret ;
- ces mêmes dispositions sont dépourvues de base légale dès lors que l'article R. 141-14 du code de la voirie routière ne prévoit pas qu'un règlement de voirie puisse porter sur la réalisation d'études préalables portant sur la recherche d'amiante ;
- elles méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques ;
- l'obligation de réaliser une étude prescrite par les dispositions de l'alinéa 1er de l'article 37 C du règlement de voirie porte une atteinte excessive à son droit d'occuper le domaine public.
- en limitant à 100 mètres la longueur maximale d'ouverture sur les voies départementales de classe 1 et 2, l'article 37 C alinéa 2 du règlement de voirie porte une attente excessive à son droit d'occuper le domaine public.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2018, le département du Gard conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société GRDF au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens invoqués à l'encontre du règlement de voirie ne sont pas fondés.
Le département du Gard a présenté un mémoire le 1er octobre 2018 qui n'a pas été communiqué en application des dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 ;
- le code de l'énergie ;
- le code de l'environnement ;
- le code du travail ;
- le code de la voirie routière ;
- le décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l'interdiction de l'amiante ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de M. A...,
- les observations de Me C..., représentant la société GRDF, et les observations de
Me F..., représentant le département du Gard.
Considérant ce qui suit :
1. Par une délibération du 11 décembre 2014, la commission permanente du conseil général du Gard a adopté un nouveau règlement de voirie. Par un arrêté du 11 mars 2015, le président du conseil général du Gard a approuvé ce règlement. La société GRDF a saisi le tribunal administratif de Nîmes d'une demande tendant à l'annulation des dispositions articles 11 A, 27, 37 C alinéa 2, 37 D alinéas 1 et 2, 38 A alinéa 2, et D alinéas 1 et 2 du règlement de voirie, ainsi que l'article 45 B, points 1 et 2, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux du 23 juin 2015. Par un jugement du 29 juin 2017, le tribunal administratif de Nîmes a annulé les articles 37 D, 38 D, ainsi que l'article 45 B, points 1 et 2 du règlement de voirie et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. La société GRDF relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'ensemble de ses conclusions de première instance.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative " Les jugements sontmotivés ".
3. En premier lieu, la société GRDF soutient que le tribunal administratif aurait omis de répondre au moyen tiré de ce que l'article 11 A du règlement de voirie, en imposant des modalités techniques particulières pour l'implantation des réseaux, porterait une atteinte excessive aux droits des occupants. Toutefois, il ressort de la lecture du jugement attaqué que le tribunal a expressément rejeté ce moyen en précisant au point 7 de son jugement " que les dispositions contestées, qui prévoient la mise en oeuvre de modalités techniques définies conjointement n'obligent pas l'exploitant à utiliser des modalités techniques d'intervention, mais préconisent une solution ; que dès lors, les dispositions des articles 11 A du règlement n'ont pas porté une atteinte excessive aux droits de la société requérante d'occuper le domaine public en lui imposant des modalités d'implantation des réseaux particulièrement restrictives ". Les premiers juges ont ainsi suffisamment motivé leur jugement sur ce point.
4. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que devant les premiers juges, la société requérante a soutenu que les dispositions de l'article 27 du règlement attaqué en imposant un diagnostic amiante, la dépollution et le traitement du site, portaient atteinte d'une manière excessive à son droit d'occupation du domaine public routier dès lors qu'elles procédaient ainsi au transfert illégal de l'obligation d'entretien normal incombant au département et méconnaissaient les dispositions du code de l'environnement qui mettent exclusivement à la charge du propriétaire du site et/ou du responsable de la pollution le traitement du sol pollué, et, notamment, les articles L. 110-1 et L. 556-3 du code de l'environnement instituant respectivement le principe du pollueur-payeur ainsi que celui du droit d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et le régime de traitement des sites et sols pollués. Il ressort des mentions du jugement attaqué, en particulier ses points 10 à 12, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble des arguments présentés par la société GRDF, ont suffisamment motivé leur jugement en réponse aux moyens invoqués par cette société en considérant qu'il appartenait au pétitionnaire, donneur d'ordre, de réaliser lui-même les études préalables de recherche d'amiante avant la réalisation des travaux sur tranchée, sans que cette charge ne porte une atteinte excessive aux droits de la société d'occuper le domaine public. Par ailleurs, les dispositions de l'article 27 étant étrangères au régime du traitement et de gestion des déchets susceptibles d'être générés par les travaux, les premiers juges n'étaient en tout état de cause pas tenus de répondre au moyen inopérant tiré de la méconnaissance des dispositions du code de l'environnement régissant la présence de pollution dans les sols.
5. En troisième lieu, le moyen invoqué par la société GRDF tiré de ce que les motifs sur lesquels les premiers juges se sont fondés pour écarter le moyen tiré de l'illégalité de l'article 27 du règlement seraient incompréhensibles n'est susceptible d'affecter que le bien-fondé du jugement. Il ne peut dès lors qu'être écarté.
6. En quatrième lieu, il ressort des écritures de première instance que la société GRDF avait demandé l'annulation des dispositions de l'article 37 C l'alinéa 2 qui prévoient qu'" en l'absence de production d'une telle étude [prévue à l'alinéa 1 du même article], la longueur d'ouverture ne pourra dépasser, sur les routes départementales de classe 1 et 2, une longueur de 100 mètres ". Le tribunal s'est prononcé sur la légalité de l'alinéa 1er de cet article 37 C aux termes duquel, en cas d'implantation de tranchées pour le réseau principal et en cas de réduction du nombre de voie de circulation " le pétitionnaire devra produire l'étude qui permettra d'apprécier l'impact de la phase travaux sur le trafic routier ". Dans ces conditions, la société GRDF est fondée à soutenir que le jugement est irrégulier, faute pour le tribunal d'avoir répondu au moyen tiré de l'illégalité des dispositions de l'article 37 C alinéa 2. Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 juin 2017 doit donc être annulé en tant qu'il omet de statuer sur les conclusions de la société GRDF tendant à l'annulation de l'alinéa 2 de l'article 37 C du règlement de voirie.
7. Il y a lieu de procéder à l'évocation partielle des conclusions présentées par la société GRDF devant le tribunal administratif de Nîmes et la Cour tendant seulement à l'annulation des dispositions de l'article 37 C alinéa 2 et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions.
Sur l'évocation partielle :
8. D'une part, aux termes de l'article L. 113-3 du code de la voirie routière : " Sous réserve des prescriptions prévues à l'article L. 122-3, (...) les services publics de transport ou de distribution d'électricité ou de gaz peuvent occuper le domaine public routier en y installant des ouvrages, dans la mesure où cette occupation n'est pas incompatible avec son affectation à la circulation terrestre. (...) ". Selon l'article L. 433-3 du code de l'énergie : " La concession de distribution confère au concessionnaire le droit d'exécuter sur les voies publiques et leurs dépendances tous travaux nécessaires à l'établissement et à l'entretien des ouvrages en se conformant aux conditions du cahier des charges de la concession et des règlements de voirie, sous réserve du respect des dispositions du code de la voirie routière, en particulier de ses articles L. 113-3 et L. 122-3. (...) ".
9. Il résulte de ces dispositions que le droit d'occupation du domaine public routier reconnu à la société GRDF, en sa qualité de concessionnaire de la distribution de gaz, ne peut s'exercer que dans les conditions prévues, en particulier, par le règlement de voirie.
10. D'autre part, aux termes de l'article L. 141-11 du code de la voirie routière : " Le conseil municipal détermine, après concertation avec les services ou les personnes intervenant sur le domaine public, les modalités d'exécution des travaux de réfection des voies communales dans lesquelles des tranchées ont été ouvertes. Il détermine également l'évaluation des frais qui peuvent être réclamés aux intervenants lorsque ces derniers n'ont pas exécuté tout ou partie de ces travaux. (...) ". L'article 131-7 de ce code précise que " (...) Le conseil départemental exerce les mêmes attributions que celles dévolues au conseil municipal par l'article L. 141-11. (...) ". Aux termes de l'article R141-14 du même code : " Un règlement de voirie fixe les modalités d'exécution des travaux de remblaiement, de réfection provisoire et de réfection définitive conformément aux normes techniques et aux règles de l'art. Il détermine les conditions dans lesquelles le maire peut décider que certains des travaux de réfection seront exécutés par la commune. (...). En vertu de l'article R131-11 du même code, ces dispositions sont applicables aux travaux de remblaiement des tranchées ouvertes sur les routes départementales et aux travaux entrepris pour leur réfection.
11. En application de ces dispositions, les autorités compétentes peuvent, par la voie d'un règlement de voirie, subordonner l'exercice du droit d'occupation du domaine public routier aux conditions qui se révèlent indispensables pour assurer la protection du domaine public routier dont elles ont la charge et en garantir un usage répondant à sa destination, à condition de ne pas porter une atteinte excessive au droit d'occupation du domaine public routier reconnu notamment au concessionnaire du service public de transport ou de distribution de gaz.
S'agissant de l'article 37 C alinéa 2 du règlement de voirie :
12. Aux termes de l'article 37 C alinéa 2 du règlement de voirie : " En l'absence de production d'une telle étude, la longueur d'ouverture ne pourra dépasser, sur les routes départementales de classe 1 et 2, une longueur de 100 mètres ".
13. D'une part, la société GRDF ne peut utilement soutenir que l'obligation qui lui est faite de produire une étude permettant d'apprécier l'impact de la phase des travaux sur le trafic routier résultant des dispositions de l'alinéa 1er de l'article 37 C porte une atteinte excessive à son droit d'occuper le domaine public, dès lors que ce moyen est inopérant à l'encontre de l'alinéa 2 de l'article 37 C qui est seul visé dans les conclusions à fin d'annulation présentées par la requérante.
14. D'autre part, la limitation de la longueur maximale de tranchée prescrite par les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 37 C n'a vocation à s'appliquer qu'en cas de réduction du nombre de voies ouvertes à la circulation pour les seules routes départementales de classe 1 et 2 et ne se trouve imposée que dans la circonstance où l'intervenant n'a pas produit l'étude visée au point précédent permettant au département d'apprécier la nature, l'étendue et l'impact des travaux sur le trafic routier. Par ailleurs, la société GRDF ne soutient ni n'allègue qu'une telle limitation constituerait une contrainte sérieuse dans la technique même d'exécution des travaux et l'organisation des chantiers en vue de la pose d'ouvrages situés sous l'emprise du domaine public. Par suite, les dispositions de l'alinéa 2 de l'article 37 C du règlement de voirie, qui ne posent pas d'interdiction absolue, n'ont pas porté une atteinte excessive aux droits de la société requérante d'occuper ce domaine public.
15. Il résulte de ce qui précède que la société GRDF n'est pas fondée à demander l'annulation des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 37 C du règlement de voirie.
Sur l'effet dévolutif :
S'agissant des articles 11 A et 38 A alinéa 2 du règlement de voirie :
16. Aux termes de l'article 11 A du règlement de voirie : " Les ouvrages doivent être réalisés à l'endroit de la voie qui perturbe le moins possible sa gestion et celle des équipements déjà existants. Dans la mesure du possible, ils sont implantés dans les zones les moins sollicitées. / Sur les chaussées de moins de 3 ans en agglomération et de mois de 5 ans hors agglomération, les travaux seront réalisés selon les modalités techniques définies conjointement par les services de la voirie et l'occupant du domaine public, afin de tenir compte des droits de l'occupant du domaine public et de préserver l'intégrité du domaine public routier ainsi qu'un usage conforme à sa destination ". Aux termes de l'article 38 A alinéa 2 du même règlement : " Afin de limiter la gêne occasionnée aux usagers et de préserver le domaine public, l'implantation de canalisations transversales à la chaussée fera l'objet d'une étude détaillée par le pétitionnaire explicitant le choix technique qu'il propose. Cette proposition devra notamment intégrer le coût de la gêne à la circulation. La recherche d'une solution technique pourra être menée avec l'appui du gestionnaire de la voie mieux à même d'évaluer les contraintes liées au trafic. / En l'absence de ces éléments d'appréciation, le gestionnaire de la voie préconisera la solution de traversée en fonçage ou forage dirigé sur le réseau de niveaux 1 et 2, la solution ne limitant pas la capacité d'écoulement du trafic ".
17. Les dispositions en litige prévoient la mise en oeuvre de modalités techniques définies conjointement entre le département et l'occupant du domaine public routier pour les chaussées récentes et envisagent, dans le cas d'implantation de canalisations transversales à la chaussée, la recherche d'une solution technique avec l'appui du gestionnaire de la voie. De telles prescriptions, qui encadrent les modalités d'exécution des travaux incombant aux intervenants sur le domaine public routier du département du Gard afin d'en garantir la protection, entrent dans le champ d'application de l'article R* 141-14 du code de l'environnement cité au point 8 du présent arrêt. Dès lors, les dispositions des articles 11 A et 38 A du règlement de voirie n'ont pas porté une atteinte excessive aux droits de la société requérante d'occuper ce domaine public.
S'agissant de l'article 27 du règlement de voirie :
18. Aux termes de l'article 27 du règlement de voirie portant sur les modalités de contrôle de la présence d'amiante dans les couches de chaussées : " Des fibres d'amiante ont été utilisées dans certaines formules d'enrobés bitumineux et peuvent donc être présentes dans les couches de la chaussée. Cela engendre des risques d'émissions de fibres dans l'atmosphère, lors des opérations de rabotage. De même certaines formules ont intégré des hydrocarbures aromatiques polycycliques qui restreignent ou interdisent la réutilisation des matériaux enrobés. / Dans le cas où le Département aurait déjà fait réaliser une analyse des couches de chaussées sur lesquelles le pétitionnaire a prévu de réaliser des travaux de tranchées, le Département lui transmettra les résultats de ces contrôles. / Dans le cas contraire, il appartiendra donc au pétitionnaire de s'assurer préalablement à la réalisation des travaux de la présence ou non d'amiante dans les structures de la chaussée sur lesquelles il est amené à intervenir. Le pétitionnaire prendra en charge les frais relatifs à ces investigations et en transmettra le résultat au gestionnaire ".
19. Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;2° Des actions d'information et de formation ;3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". L'article L. 4121-2 du même code précise : " L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : / 1° Eviter les risques ; / 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; / 3° Combattre les risques à la source (...) ". Aux termes de l'article L. 4531-1 du même code : " Afin d'assurer la sécurité et de protéger la santé des personnes qui interviennent sur un chantier de bâtiment ou de génie civil, le maître d'ouvrage, le maître d'oeuvre et le coordonnateur en matière de sécurité et de protection de la santé mentionné à l'article L. 4532-4 mettent en oeuvre, pendant la phase de conception, d'étude et d'élaboration du projet et pendant la réalisation de l'ouvrage, les principes généraux de prévention énoncés aux 1° à 3° et 5° à 8° de l'article L. 4121-2 ". Aux termes de l'article R. 4412-97 du même code : " Dans le cadre de l'évaluation des risques, prévue aux articles L. 4121-3 et L. 4531-1, le donneur d'ordre joint les dossiers techniques prévus aux articles R. 1334-29-4 à R. 1334-29-6 du code de la santé publique et R. 111-45 du code de la construction et de l'habitation aux documents de consultation des entreprises./ Pour les opérations ne relevant pas des articles R. 1334-29-4 à R. 1334-29-6 du code de la santé publique et R. 111-45 du code de la construction et de l'habitation, le donneur d'ordre joint aux documents de consultation des entreprises tout document équivalent permettant le repérage des matériaux contenant de l'amiante, y compris ceux relevant de ses obligations au titre de l'article L. 541-1 du code de l'environnement. / Au vu des informations qui lui ont été données, l'employeur réalise son évaluation des risques, conformément à l'article L. 4121-2 ". Selon l'article R. 4412-96 de ce même code : " Pour l'application de la présente section, on entend par: (...) 4° Donneur d'ordre : le chef d'entreprise utilisatrice (...) ou le maître d'ouvrage mentionné à l'article L. 4531-1 ou l'armateur (...). ".
20. En premier lieu, les dispositions contestées n'ont d'autre objet au regard des dispositions précitées du code du travail, que de rappeler aux intervenants sur le domaine public routier du département du Gard leur obligation de respecter les textes législatifs et réglementaires en matière de prévention des risques et de sécurité des chantiers. En imposant aux intervenants sur son domaine public routier de vérifier, à leurs frais, l'absence d'amiante dans les chaussées avant de réaliser des travaux qu'ils ont eux-mêmes décidé pour accomplir leur mission de gestionnaire de réseaux, sous leur propre maîtrise d'ouvrage, le règlement de voirie du département du Gard ne méconnaît pas les dispositions du code du travail, et plus particulièrement celles concernant les mesures de prévention des risques d'exposition à l'amiante que doit prendre un employeur. Par ailleurs, ces dispositions ne pourraient en tout état de cause, eu égard à l'objet d'un règlement de voirie tel qu'il est défini par les dispositions du code de la voirie routière rappelées au point 8, faire obstacle à l'exécution par le département des obligations qui lui incombent en vertu des dispositions législatives et réglementaires du code du travail relatives à la prévention des risques d'exposition des travailleurs à l'amiante lorsqu'il est donneur d'ordre de travaux sur son domaine. Par suite, les moyens tirés de ce que l'article 27 serait dépourvu de base légale, méconnaîtrait les dispositions des articles L. 4121-3, L. 4531-1, L. 4121-2 et R. 4412-97 du code du travail en faisant peser sur l'intervenant une obligation de recherche d'amiante préalable aux travaux, alors que cette obligation pèserait dans tous les cas, selon la requérante, sur le département en sa qualité de propriétaire de la voirie, de ce qu'elles excéderaient ce faisant les contraintes qui peuvent être imposées aux intervenants dans l'intérêt du domaine public et de ses usagers et déchargeraient le département de son obligation d'entretien du domaine public routier en application des dispositions de l'article L. 131-2 du code de la voirie routière et L. 3321-1 du code général des collectivités territoriales, doivent être écartés.
21. En deuxième lieu, selon le 3° du II de l'article L. 110-1 du code de l'environnement, le principe pollueur-payeur implique que " les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution et de lutte contre celle-ci doivent être supportés par le pollueur ; ".
22. Les dispositions de l'article 27 du règlement de voierie, relatives à une étude préalable, sont par elles-mêmes étrangères au régime du traitement et de gestion des déchets susceptibles d'être générés par les travaux qu'elles concernent et à la détermination du débiteur final du coût de ce traitement. Par suite, les moyens tirés de ce qu'elles méconnaîtraient le " principe pollueur-payeur " posé par le 3° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement et l'article L. 541-2 du code de l'environnement indiquant que " tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d'en assurer ou d'en faire assurer la gestion, conformément aux dispositions du présent chapitre ", ou la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets doivent, en tout état de cause, être écartés comme inopérants.
23. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 556-3 du même code : " I. - En cas de pollution des sols ou de risques de pollution des sols présentant des risques pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques et l'environnement au regard de l'usage pris en compte, l'autorité titulaire du pouvoir de police peut, après mise en demeure, assurer d'office l'exécution des travaux nécessaires aux frais du responsable. (...) II. - Au sens du I, on entend par responsable, par ordre de priorité : (...) 2° A titre subsidiaire, en l'absence de responsable au titre du 1°, le propriétaire de l'assise foncière des sols pollués par une activité ou des déchets tels que mentionnés au 1°, s'il est démontré qu'il a fait preuve de négligence ou qu'il n'est pas étranger à cette pollution. (...) ".
24. Ne peuvent davantage être utilement invoquées en l'espèce les dispositions précitées de l'article L. 556-3 du code de l'environnement, qui déterminent l'obligation de l'exploitant d'une installation classée, de son ayant droit ou de celui qui s'est substitué à lui, de mettre en oeuvre les mesures permettant de remettre en état le site qui a été le siège de l'exploitation dans l'intérêt, notamment, de la santé ou de la sécurité publique et de la protection de l'environnement, dès lors qu'en l'espèce n'est pas en cause une installation classée et pas davantage la charge de la gestion des revêtements qui s'avéreraient pollués.
25. En quatrième lieu, aux termes du 4° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement : " toute personne a le droit d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques ; ".
26. Les dispositions en litige n'ont pas pour effet de contraindre les intervenants à cartographier les zones de travaux dans lesquels la présence d'amiante dans les sols aurait été constatée. Il ne résulte par ailleurs d'aucune disposition législative ou réglementaire qu'une telle obligation s'imposerait au département. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le département du Gard a, avant la date d'entrée en vigueur du règlement de voirie, entrepris la détection de la présence d'amiante dans les chaussées de sa voirie. Il n'est pas sérieusement contesté que le département met à la disposition des intervenants sur son domaine public routier les informations à ce sujet dont il dispose. Par suite, la société GRDF n'est pas fondée à soutenir que l'obligation qui lui est faite de réaliser un tel diagnostic présenterait un caractère systématique et ainsi excessif et méconnaîtrait le principe selon lequel le département est tenu à une obligation d'information en matière environnementale tel que prévu par le 4° de l'article L. 110-1 du code de l'environnement.
27. En cinquième lieu, la circonstance que le premier intervenant sur une emprise supporterait des frais que les intervenants suivants au même endroit n'auraient pas à exposer ne méconnaît pas le principe d'égalité, dès lors que, dans le cas où le département n'aurait pas déjà fait réaliser d'analyse des couches de la chaussée, les différents intervenants sur une même section de route sont placés dans la même situation au regard de l'obligation de repérage de l'amiante en ce qu'ils doivent s'assurer préalablement à la réalisation des travaux projetés de la présence ou non d'amiante dans les structures de la chaussée. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'article 27 du règlement de voierie créerait une rupture d'égalité devant les charges publiques ne peut qu'être écarté.
28. En sixième lieu, les dispositions de l'article 27 n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre la fabrication, la transformation, la vente, l'importation, la mise sur le marché national ou la cession de variétés de fibres d'amiante. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996 doit donc être écarté comme inopérant.
29. Il résulte de tout ce qui précède, que la société GRDF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des dispositions des articles 11 A, 27, 37 C alinéa 2, et 38 A alinéa 2 du règlement de voirie départementale du Gard.
Sur les frais liés au litige :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge du département du Gard, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société GRDF sur le fondement de ces mêmes dispositions, le versement au département du Gard d'une somme de 2 000 euros.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 6 juin 2017, en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de la société GRDF tendant à l'annulation de l'alinéa 2 de l'article 37 C du règlement de voirie, est annulé.
Article 2 : La demande de la société GRDF présentée devant le tribunal administratif de Nîmes tendant à l'annulation de l'alinéa 2 de l'article 37 C du règlement de voirie est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions d'appel de la société GRDF est rejeté.
Article 4 : La société GRDF versera au département du Gard la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société GRDF et au département du Gard.
Délibéré après l'audience du 4 décembre 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président,
- Mme B..., première conseillère,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 décembre 2019.
N° 17MA03696
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